Mercredi 7 mai, une manifestation de travailleurs sans-papiers défile à Bruxelles pour lutter contre le projet de directive sur la rétention et l’expulsion des personnes étrangères – qui sera soumis au Parlement européen le 20 mai prochain. En ces temps de politiques d’expulsion systématique des immigrés, « Bakchich » propose une lecture, « Un goût de miel » (éd. du Seuil), de Dominique Rousset, qui laisse les exilés parler d’eux et de leur espoir d’être, un jour, intégrés en France.
Un Goût de miel, c’est la saveur de l’espérance de jours meilleurs. Dans son premier roman, Dominique Rousset dépeint un tableau éclaté de ces « figures de l’exil », portraits et histoires simples de ces émigrés qui partent, laissant tout derrière eux, dans l’espoir d’une France qui leur donnerait asile.
Tarek par exemple. Un jeune homme. Tous les jours, il traîne au port avec son ami Aziz. C’est sûr, les navires qui appareillent seront un jour leur planche de salut. Cachés dans les entrailles de l’un d’eux, ils traverseront la Méditerranée et rallieront leur eldorado. Mais lorsque, enfin, Tarek « pénètre en vainqueur dans le ventre du navire », Aziz reste.
Tarek, mais aussi Lamine, Anita, Angèle, Micha, sont les figures de l’exil qu’a choisies Dominique Rousset pour son premier roman. Ils viennent du Mali, du Rwanda, des Philippines, d’Afrique du Nord ou d’Europe de l’Est. Leur route est longue et difficile, dangereuse souvent, incertaine toujours. Peu importe. Peu importent les barbelés, les matraques et la faim. Ils rejoindront Paris. « Ce ne sont pas les hommes heureux qui embarquent pour de telles traversées », insiste l’auteur. Mais la si « douce France » ressemble, de loin, à une terre d’accueil. Ils ne savent pas qu’au bout de leur chemin se trouve toujours un bon samaritain pour s’offusquer des dégâts causés sur son terrain par la chute du corps d’un passager clandestin depuis le train d’atterrissage d’un avion. Dire que « ça » aurait pu blesser quelqu’un ! Le bon samaritain peut s’estimer heureux.
« Ainsi va la ronde des émigrants à travers le monde ». Loin des journaux télévisés et des figures consternées des présentateurs qui égrainent leurs statistiques – « Nouveau drame de l’immigration clandestine », « Les corps de 37 passages clandestins ont été retrouvés »… – Dominique Rousset dresse délicatement les portraits de ces candidats à l’exil. Ils portent, comme Lamine, tous les espoirs de leur famille. Ils veulent, comme Anita, une vie meilleure pour leurs enfants, quitte à les laisser derrière eux. Ils errent, comme Angèle, parmi les rescapés des massacres, à la recherche de leurs proches et de leur identité.
Un goût de miel est un roman sur le départ et sur l’absence. C’est un roman sur le désir aussi. Car le « goût du miel », c’est un désir d’ailleurs, l’espoir d’une vie plus belle.