Paupaul Biya a beau être devenu démocrate, il regarde toujours d’un mauvais œil ceux qui lorgnent dans son auge présidentielle. Lesquels sont de plus en plus nombreux à l’approche de l’échéance de 2011, date fatidique si l’on en croit la Constitution de 1996 qui parle d’un septennat présidentiel renouvelable une seule fois…
Confortablement installé sur le trône depuis novembre 1982, « élu » dix ans plus tard et ré-« élu » deux fois depuis 1996, le grand Paul Biya verrait bien son séjour à Etoudi, la présidence camerounaise, se prolonger au-delà du terme. Dieu est, comme chacun sait, éternel. Et déjà s’active une ribambelle de zélateurs qui réclament haut et fort une réforme constitutionnelle pour le chef, et rêvent secrètement de quelques strapontins ministériels pour eux-mêmes. Mais il en est d’autres qui, dit-on, nourrissent de plus grandes ambitions, et voient dans l’échéance de 2011 une bonne occasion de subtiliser la couronne du patriarche d’Etoudi (qui vient de fêter ses 74 ans).
Ce sont ceux que la presse camerounaise appelle depuis quelques mois le « G11 », pour « Génération 2011 », une nébuleuse de « jeunes » barons du RDPC qui comploterait en douce pour arracher la moule présidentielle de son rocher . Et il y aurait du beau linge parmi ces comploteurs de l’ombre : le tout puissant Polycarpe Abah Abah (ministre de l’Économie et des Finances), le non moins influent Urbain Olanguena Awono (ministre de la Santé) mais aussi Jean-Marie Atangana Mebara (ministre des Relations Extérieures et ancien Secrétaire Général à la Présidence de la République) ou Grégoire Owona (Secrétaire Général Adjoint du RDPC et ministre chargé des Relations avec les Assemblées). Et bien d’autres encore, sans qu’on sache vraiment qui.
Accusé de tous les maux par la frange docile de l’intelligentsia locale et par une presse en mal de scoops, le mystérieux « G11 » monopolise les discussions de salon et allume dans les milieux autorisés toute sorte de rumeurs plus ou moins fondées (du sempiternel détournement de fonds à la préparation d’un coup d’État, en passant par l’accointance avec quelque secte). Les accusés nient évidemment tout en bloc, bien conscients qu’il n’y a pire crime au Cameroun que d’afficher des ambitions présidentielles. Voyez l’exemple de Victor Ayissi Mvodo, réputé proche de Paupaul, qui a cassé sa pipe dans un hôpital parisien… quelques mois avant la présidentielle de 1997 à laquelle il s’était porté candidat ! Ou Titus Edzoa, médecin personnel du Président, qui croupit depuis des années dans les cellules du Secrétariat d’État à la Défense pour s’être lui aussi intéressé de trop prêt à l’élection de 1997 ! Au pays de Biya, le turbulent Sarkozy aurait été plusieurs fois fusillé…
Les « pouvoiristes » du G11 qui ne veulent pas, eux, finir au poteau, taisent donc leurs appétits et multiplient les serments d’allégeance. À l’exemple de Grégoire Owona qui lançait il y a quelques jours, sur les ondes de Radio Siantou, cet ode émouvant au potentat : « Paul Biya est beau, jeune et vigoureux pour continuer à tenir les rênes du Cameroun pour au moins 20 ans ! ». Telle est l’inaltérable vertu des « complots » marketés : les chiens aux dents longues vous lècheront les pieds jusqu’à ce que vous fassiez disparaître leur réputation d’enragés…