Paris-Match publie une jolie photo, pour représenter l’entraide entre gens de bonne conduite, pendant cette période de crise. Un cliché… joliment truqué ! Explications.
Ils sont pas mignons, ces dix-là ? Alain, Francette, Rose, Hélie… Et la star, Atanase Périfan, député UMP, fondateur de l’association « Voisins solidaires ». Tout ce petit monde, sensé représenter la France qui lutte contre l’adversité, illustre, sur une double page de Paris Match (daté du 2 avril), un dossier consacré à la crise et au « retour du système D ». C’est sûr, il faut bien s’entraider !
La sympathique brochette, tout sourires, prend la pose : la dame de droite exhibe fièrement (en pleine rue !) son chariot garni de produits estampillés hard discount ; le type du milieu, rouleau de peinture à la main, perché sur son escabeau (en pleine rue !), symbolise le gars serviable qui file un coup de mains aux voisins, etc. La légende nous l’explique : « Dans son immeuble, Alain bricole pour qui a besoin, Rose est gardée gratuitement par une voisine, Hélie visite tous les jours après l’école la vieille dame de son palier… ».
Bien, bien, bien… Sauf que ce joli portrait de « famille » est complètement bidon ! Le cliché est pris dans une ruelle boisée du 17ème, à Paris. Attention, pas dans le coin populaire de cet arrondissement, mais à quelques encablures de la porte Maillot : l’un des quartiers les plus cossus de la capitale. Et nos dix « modèles » sont photographiés devant un bâtiment art déco, bientôt classé, puisque construit par Gustave Eiffel himself.
Enfin, si l’article sous-entend que toute cette petite troupe habite le même immeuble, il n’en est rien ! Le pépé de gauche a été chopé par hasard alors qu’il se baladait sur l’avenue, le cœur ouvert… Atanase ne crèche pas dans cette rue. Et Paris Match fait une fois de plus dans la mise en scène.
Un de nos lecteurs se souvient avoir été photographié, pour le même hebdomadaire, au début des années soixante : « J’avais 13 ans, j’étais scolarisé dans le 16ème et je faisais de la gym au Bois de Boulogne avec un copain. Deux photographes de Match nous ont filé un masque de De Gaulle, et un masque de Khrouchtchev pour qu’on les enfile. La photo a été titrée : « Au bois, les enfants aussi jouent à de Gaulle et Khrouchtchev ». En « dédommagement », ils nous avaient donné les masques ». C’est de l’info coco !
Ah, le joli lièvre levé par les fins limiers de Bakchich ! Une affaire d’état. Dans un papier signé Julie Bolzer et publié le lundi 6 avril 2009 sous la têtière « tricherie », vous nous accusez d’avoir « bidonné une photo », produit « un cliché joliment truqué » représentant l’entraide entre voisins. C’est grave et surtout totalement inexact.
A notre tour de vous signaler que votre enquête de bœuf-carottes de la presse fait fausse route. Contrairement à ce que vous affirmez, notre photo a bien été prise dans la cour de l’immeuble où vivent les protagonistes de notre sujet et non pas dans cette « ruelle boisée » où vous vous êtes égarés. Ainsi que l’indique une légende que vous auriez préféré sans doute plus politique, Atanase Perifan figure sur cette photo en tant que créateur de l’association Voisins solidaires. L’homme, qu’avec élégance vous appelez le « pépé de gauche », n’a pas « été chopé par hasard alors qu’il se baladait sur l’avenue » comme vous l’affirmez. Il est le père d’une des habitantes de l’immeuble et habitant dans ce pâté de maison, bénéficie des services rendus par l’association. Quant « au type perché sur son escabeau en pleine rue » c’est Alain, le gardien du 77 rue Bayen, Paris XVIIème qui, nous vous rassurons, ne passe pas ses journées dans cette position ! Vous auriez sans doute gagné à aller l’interviewer et à nous passer, comme il est d’usage, un petit coup de fil pour vérifier vos informations. Au cas où vous ne le sauriez pas, un éminent conseiller de votre direction, ancien de notre rédaction, connaît par cœur tous nos numéros de téléphone.
En vous souhaitant pour l’avenir des scoops plus consistants.
La Rédaction de Paris Match
Effectivement le titre était sans doute assez survendu. Mais que celui qui n’a jamais "sur-titré" nous jette la première plume…
Bakchich
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