Les coups de gueule de l’administration Obama dans les médias sur une halte aux colonies dans les territoires palestiniens sont plus édentés que jamais.
"Insulte", selon Hillary Clinton ; "Un crachat au visage" d’après un autre conseiller présidentiel : le tollé de l’administration d’Obama sur l’annonce par Israël, pendant la visite du vice-président Joe Biden à l’Etat hébreu, de la construction de 1600 nouvelles habitations exclusivement juives dans la territoire occupé de Jérusalem-Est, n’est qu’une fanfaronnade.
Car les belles paroles d’Obama dans son discours de Caire de juillet dernier adressé au monde musulman, dans lequel il disait qu’Israël devrait « cesser » de bâtir des colonies nouvelles, sont caduques depuis longtemps.
Aussitôt après le discours du Caire, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou l’avait déclaré « inacceptable » ; la construction de colonies nouvelles dans le Cisjordanie est repartie à toute allure depuis un bon moment, et Obama et Cie n’ont rien fait de concret pour l’empêcher. Les colons israéliens sont très satisfaits, et ils ont donc arrêté leurs manifestations.
Certes, Netanyahou a prononcé publiquement des « excuses » à Biden… mais seulement pour le timing de l’annonce. Et dans son discours après l’annonce à l’université de Tel Aviv, dont chaque mot était approuvé d’avance par la Maison Blanche, Biden a signalé clairement que la ligne pro-israélienne des États-Unis n’a pas changé d’un pouce.
Biden a dit alors que « le changement ne viendra au Moyen Orient que lorsqu’il n’y aura absolument aucun espace entre l’Amérique et Israël, » et qu’« on n’a pas besoin d’être juif pour être sioniste. » Qui plus est, Biden a rétrogradé le rôle des États-Unis dans le processus de paix de celui d’un garant et d’un sponsor -ce que les Arabes attendent- à celui d’un « facilitateur » et d’un « mécanisme de pontage. »
Biden avait aussi, à trois reprises, mentionné qu’il était accompagné dans son voyage en Israël par Dennis Ross, le très pro-israélien chef conseiller d’Obama sur le Moyen-Orient et qui, avant d’être nommé par le président, avait fait partie d’un « think tank » sponsorisé par l’AIPAC (American Israël Public Affairs Committee, le lobby pro-israélien). Dans son dernier live, Myth, Illusions, and Peace : Finding a New Direction for America in the Middle East, Ross a proclamé que le processus de paix doit commencer par « trouver ce qui est acceptable par les Israéliens, puis amener les Palestiniens ou les Arabes à s’en accommoder », et il a souligné qu’Israël ne doit jamais être soumis ni a des « pressions » ni à des « surprises » américaines.
C’est pourquoi même la très pro-israélienne agence de presse Jewish Telegraphic Agency a proclamé dans son analyse que « le discours de Biden était la salve d’ouverture d’un effort pour enrayer les inquiétudes israéliennes ravivées par le discours d’Obama » au Caire. En Israël, Biden s’est simplement essuyé le crachat du visage et souriait.
Les « pourparlers indirects » que l’envoyé spécial d’Obama au Moyen-Orient appelle de ses vœux sont au même point qu’il y a dix-neuf ans dans le processus de paix entamé à Madrid et qui, jusqu’à ce jour, n’a pas abouti à un état palestinien. Et les coups de gueule obamiens dans les médias sur une halte aux colonies dans les territoires palestiniens restent plus édentés que jamais. C’est encore une signe de la faiblesse et de la timidité de l’administration d’Obama, qui se révèle chaque jour de plus en plus médiocre et sans convictions fermes.
Comme le dit si bien le dicton français, « chien qui aboie ne mord pas ».
On ne peut comprendre l’attitude d’Israel que si on intègre un facteur essentiel : dans ce pays ou le mode de scrutin proportionnel intégral forme des coalitions politiques impossibles, ce n’est pas le peuple qui gouverne mais quelques personnes, hier des militaires ou des espions, aujourd’hui des industriels de l’armement. Le lobby militaro-industriel est, à l’échelle du pays, bien plus puissant qu’aux Etats Unis. Le conflit israelo palestinien est un gigantesque show room pour les matériels high tech qui équiperont demain les armées et les polices qui auront les moyens de les acheter. Voici pourquoi l’Etat Israelien ne veut la paix a aucun prix.Pour les mêmes raisons que l’Amérique a besoin d’une bonne guerre tous les dix ou vingt ans. Tant pis pour les peuples palestinien et israelien qui aspirent, comme tous les peuples, à vivre en paix et en sécurité.
C’est très bien expliqué par l’économiste canadienne Naomi Klein dans l’excellent livre "La stratégie du choc" (Acte Sud).