Travailler plus pour gagner plus… jusqu’à 62 ans. Les joyeuses réformes sarkozystes des retraites omettent que bien des employés sont cassés – physiquement – dès 50 ans.
Vieillir au travail, ils voudraient bien. Prolonger de deux ans leur carrière, comme le réclame la réforme des retraites, pourquoi pas ? Si seulement ils pouvaient ! En France, deux tiers des salariés de 59 ans et plus n’ont pas de boulot au moment de prendre leur retraite. Derrière ce chiffre, des millions d’employés usés dont les entreprises ne veulent plus ou qui, physiquement, ne peuvent plus travailler.
« Si l’on a pour objectif d’allonger les vies professionnelles, il faut peut-être partir du constat qu’on s’arrête, en réalité, des années avant l’âge légal », explique Serge Volkoff, ergonome et statisticien membre du conseil d’orientation des retraites. Autrement dit, avant d’imaginer faire travailler les salariés jusqu’à 67 ans, les sénateurs feraient bien de regarder de plus près la situation des 50 ans et plus dans l’entreprise. Car le moins que l’on puisse dire, c’est que leur sort, malgré d’immenses disparités, reste globalement peu enviable…
Si aucune statistique nationale officielle n’existe sur l’invalidité des salariés quinquagénaires, les chercheurs estiment que 15 à 20 % d’entre eux sont concernés par une inaptitude partielle ou totale [1]. Plus du tiers des 50-59 ans déclarent un problème de santé de plus de six mois ou un handicap. Et 22%, des limitations de leur capacité de travail. Comment expliquer ces données, trop souvent absentes du débat sur les retraites ?
La productivité française – l’une des plus fortes de l’OCDE –, multipliée par cinq en trente ans, a évidemment son revers. Dans l’entreprise, toujours en quête de plus de performances, d’intensification des cadences, le salarié vieillissant a bien du mal à garder sa place. « Les postes un peu abrités se sont faits plus rares, notamment dans l’industrie. Tout ce qui était gardiennage, petite préparation, balayage… Tout ça n’existe plus. Ils sont soit délocalisés, soit sous-traités », souligne Serge Volkoff.
La généralisation de modes de management privilégiant l’adaptation permanente, la réactivité et l’imprévu fragilise les quinquas. « La répétition des urgences ne fait pas bon ménage avec le vieillissement », explique le statisticien. Changer de collègues, de lieu ou de chef en permanence, comme le préconise toute organisation dite « moderne », affecte en priorité les seniors. « Les modes d’organisation du travail accélèrent l’usure dès lors qu’ils contribuent à cumuler des conditions plus difficiles à tenir avec l’âge. Par exemple, le port de charges lourdes dans un temps très restreint, analyse Annie Jolivet, économiste à l’Institut de recherches économiques et sociales et spécialiste des fins de carrière. Le soutien dont on peut bénéficier via ses collègues – entraide, répartition des tâches, etc. – et son encadrant direct joue aussi un rôle. Par conséquent, des modes de management peu soucieux de ces cumuls, de la stabilité du collectif de travail, de l’existence de marges de manœuvre et mettant à distance l’encadrant direct sont plus nocifs », affirme-t-elle.
Autre facteur de cette nouvelle pénibilité, l’extension du travail de nuit. S’il est limité pour les femmes, aucune restriction n’existe sur l’âge. La généralisation des horaires décalés, auxquels échappent de moins en moins les seniors, n’est pas non plus sans effet sur l’organisme.
Industrie, hôtellerie, hôpitaux, nettoyage, nombreux sont les secteurs où il est dur de se maintenir durablement en bonne santé. Voire de se maintenir tout court. Quand les signes d’usure sont là – troubles musculo-squelettiques, déficiences sensorielles, altération du sommeil –, la médecine du travail n’a que peu de marge de manoeuvre. « Pour un médecin du travail qui a cinq salariés “usés” à réaffecter pour seulement trois postes protégés, le choix est simple : deux d’entre eux attendront un an de plus leur réaffectation, au risque que leur santé se détériore encore plus. L’année suivante, ils seront davantage. Cela créé un effet boule de neige », explique Serge Volkoff.
François Guillon, chef de l’unité des pathologies professionnelles à l’hôpital Avicenne, en Seine-Saint-Denis, déplore l’autisme des pouvoirs publics sur ces questions. « La dispense de recherche d’emploi passé 57 ans et demi a été supprimée en août 2008. Cela engendre des situations dramatiques. Prenons le cas d’un travailleur manuel de 56 ans licencié parce qu’il ne peut plus tenir debout cinq minutes. Il sait que son chômage va durer deux ans maximum, et ensuite ? La réforme va aggraver leur précarité. » Déclaré inapte, l’employé licencié n’a plus qu’à espérer que son invalidité soit reconnue. Pour toucher entre 30 et 50 % de son salaire.
« Résultat, les salariés s’accrochent le plus longtemps possible, constate François Guillon. Dans le BTP, je vois des gens finir leur carrière à près de 50 ans avec deux ou trois maladies professionnelles. » Dernière bonne nouvelle, en concentrant le travail sur ceux qui parviennent à s’y maintenir – les 25-55 ans –, on devient vieux de plus en plus tôt. Réjouissant.
A lire sur Bakchich.info :
[1] Retraite et société n°59, « l’état de santé des travailleurs âgés », par Jean-Marie Robine et Emmanuelle Cambois, La Documentation française, 265 pages, 19 euros.
Bonsoir, je vais peut-être faire "mouche dans le potage" mais bon …
Je ne suis pas salarié mais TNS, ce qu’on appelle "entrepreneur individuel" depuis près de 25 ans mais votre article me touche, pour moi mais aussi pour les salariés qui ont travaillé avec moi.
Je n’ai jamais été le petit chef avec les mains dans les poches et ce que les "gars" font je le fais (et pas 35H !) alors je sais . Je sais ce que c’est d’être cassé le soir au point de ne pouvoir dormir, de ne plus avoir le courage de jouer avec les enfants …. Je sais . Je sais aussi qu’il m’est arrivé de payer des gars malades (craignants pour la carence SS de 3 jours) pour qu’ils rentrent chez eux se soigner alors que mon benef net était inférieur à leur salaire (ben ouais y’a des patrons cons !).
Ma retraite (au dernières nouvelles de ma caisse) sera d’environ 700€ ; n’ayant ni volé mes clients ni mes salariés (je penses) je ne suis propriétaire d’aucun bien immobilier (super le loyer sera payé et je pourrais faire les poubelles). A 50 ans je suis naze : il me reste au moins 15 ans à faire pour obtenir le pactole (700€/mois) et je me demande si c’est une bonne idée ?
Si l’origine de la phrase est piteuse, elle me convient (la phrase) : Mains propres et tête haute .
Oui nous serons nombreux à tomber "mains propres et tête haute" dans l’oubli et dans la misère : travailleurs aux mains calleuses, agriculteurs refusants les compromissions, intellectuels snobant les médias, journalistes virés, artistes non programmés, femmes au foyer sans statut ni droits et plein d’autres… Vivaldis en fosse commune .
Mais bon … C’est quand même nous l’humanité et pas vous les "braves gens qui disent de moi …" Na-na-na-nère !
Le problème, c’est que les millions de gens qui défilent aujourd’hui, tous unis contre une politique, se retrouvent toute proportion gardée comme les afghans en 2001 : basta les taleban, ouais, mais qui ensuite ? En 2010, en France, y’a qui pour proposer quoi ? personne, pour rien ! je parle du "paysage médiatique", de la "scène politique", les seuls qui comptent, malheureusement… la cato socialo ? faut pas charrier, la messe, le drapeau et la soupe, non merci ! l’opportuniste lilloise, adepte du ni oui, ni non ? déjà donné avec son mentor, qui nous disait "mon programme n’est pas socialiste !" le bellâtre du FMI ? Ben, sur l’essentiel, il est d’accord avec la droite, il est de gôôôche, Domi, il est juste là because y’avait plus de places assises à l’avant du bus ! le facteur ? C’est le plus sympa de tous, il dit des choses censées, on le sent sincère, mais enfin, il sent encore fort son parti unique, ca fait encore peur…A voir… Les syndicats ? Faites moi pas rire, y’a que la coupe de cheveux de Thibault qu’est à garder, là dedans, le reste, c’est réformisme mou, compromissions et subventions d’état, ils feront où on leur dit de faire, et encore ! Des crottes de bique ! bref, sonneper, comme on disait dans ma jeunesse… napo, il s’y connaissait en révolution, et il disait qu’en la matière, y’a ceux qui les font, et ceux qu’en profitent… Alors à qui la galette ? sarkozy, dans une interview y’a quelques années, il disait texto qu’il en voulait pas pour un second bail, qu’ensuite, il ferait du business, voila, une autre vie s’offrira à lui, conseils d’administration, tout ca…les rats le savent, qui quittent déjà gentiment les cales, se rapprochent du pont, lorgent sur les chaloupes…Bientôt, il aura plus que Rachida Dati comme soutien…Et quand t’en es là…
Tiens, d’ailleurs, je vois bien un second tour Dati/Tapie, moi, aux prochaines…Ca en jetterait, non ?