Le procès de Khalifa a commencé le 9 janvier. L’intéressé attend au chaud, à Londres
Qui est Rafik Abdelmoumen Khalifa ? « Un type dont on voudrait comme patron-grand frère, parce qu’on sait qu’il vous mènera loin, aussi loin que ses rêves… », écrivait Denyse Beaulieu, une journaliste québécoise, dans un portrait dithyrambique paru aux éditions Servedit et Maisonneuve et Larose en 2001.
Nul ne sait combien cette journaliste a été payée, mais une chose est sûre : elle n’est pas parmi les 104 accusés du procès Khalifa, pompeusement appelé, « le plus grand scandale financier du siècle » par l’ex-chef du gouvernement Ahmed Ouyahia.
Il y a en revanche parmi les accusés des « petits frères » que les rêves du patron ont menés en prison, au scandale, pendant que lui se cache à Londres et ne daigne même pas lever un petit doigt pour les défendre alors que certains risquent jusqu’à vingt ans de réclusion criminelle. Pas classe pour un premier de la classe ! Il se cache avec ses secrets, et son absence, quoiqu’en dise maître Miloud Brahimi affirmant que cela n’aura aucune incidence sur le procès à la chaîne trois de la radio algérienne, rend presque caduque cette affaire dont l’instruction a duré plus de trois ans.
En effet, qui mieux que Abdelmoumen pourrait raconter son incroyable histoire ? L’histoire d’un jeune pharmacien qui, en l’espace de cinq ans, crée à partir de rien une banque privée agréée par le ministère des Finances en 1998, puis un an plus tard une compagnie aérienne, la Khalifa Airways, une télé, Khalifa TV, se paye des villas à Cannes, distribue les chèques entre autres à Deneuve et Depardieu et qui, en passant, s’offre le luxe de sponsoriser l’Olympique de Marseille à hauteur de 18 millions de francs par an pendant cinq ans. Qui mieux que Abdelmoumen pourrait nous dire comment est née la Khalifa Bank dans un pays ou le système bancaire est tenu d’une main de fer par l’État ?
Beau, riche, intelligent…dans l’Algérie de Bouteflika cela ne suffit pas pour réussir. Tout au plus goûte-t-on au statut de fusible. Pas forcément désagréable.
Et s’il s’était rendu au tribunal de Blida, qui juge la faillite de sa Bank, Rafik Khalifa aurait pu sans doute en témoigner. La vie de protégé du régime n’a rien de désagréable, comme le narrent fort bien Lounis Aggoun et Jean-Baptiste Rivoire dans Françalgérie (la Découverte 2004).
Fils d’un ministre du premier président algérien Ben Bella, Rafik a un héritage. Son père fonda le MLAG, l’ancêtre du DRS, le doucereux service de renseignement (et plus si affinités) du régime. C’est donc tout naturellement que le clan du général Belkheir, encore tout puissant patron de la sécurité militaire au tournant des années 2000, lui mit le pied à l’étrier et le missionna pour redresser l’image de l’Algérie en France. Pas bégueules les militaires, ils y ont les moyens. Déjà pourvu d’un groupe pharmaceutique, le petit Rafik se voit très vite construire un empire : télévision, compagnie aérienne privée, banque d’affaires…Autant d’atouts qui en firent en 2001 « le milliardaire algérien qui compte ». D’autant que l’homme se fait bien voir. Sponsor de l’Olympique de Marseille, ami de Depardieu, « employeur » de Catherine Deneuve, hôte de Jamel Debbouze et d’Alain Chabat, Khalifa comble les désirs de ses parrains : faire décerner à l’Algérie le label de pays fréquentable et chasser les fantômes de la guerre civile. Une trajectoire fulgurante, interrompue dès sa mission remplie. L’année de l’Algérie en France en 2003 accompagne sa chute. Une étrange coïncidence.
C’est à cette question que tente d’apporter des réponses le procès laborieux qui se tient à Blida entre un notaire qui déclare avoir été présent par hasard, attendant dans une voiture la signature des Khalifa, puis le frère de « Moumen » cité comme témoin qui ajoute que « cette banque est née dans la panique », en présence de la mère du principal accusé, de lui-même et il ne sait plus si la femme de Abdelmoumen était présente également…
De son côté, le directeur de l’agence de la Banque de Développement Local, grâce aux prêts de laquelle fût fondée, semble t-il, la banque privée avoue « avoir agi sur la base de la confiance » alors que l’hypothèque qui sécurisait la transaction était des plus fragiles.
La mère, refusant d’hypothéquer le bien familial et la sœur, également héritière de ce bien étant absente d’Algérie. Un peu léger tout ça face à un trou estimé à trois milliards de dinars et encore, il ne s’agit là que de la partie visible de l’iceberg Khalifa, un peu léger face à ces centaines de petits épargnants ruinés et ces milliers d’employés mis au chômage après la mise en faillite du château de sable.
On aimerait pourtant croire à ce procès mené, nous dit-on, par une juge impartiale et compétente, mais comment croire à un procès qui d’emblée a été découpé à l’instruction comme une grosse merguez où 104 accusés doivent répondre individuellement de leurs petites turpitudes ? Et si l’on comprend que de petits épargnants se soient laissés séduire par les taux extrêmement favorables que pratiquait la Khalifa Bank, qui nous dira comment l’argent public provenant d’organismes d’État, de caisses d’assurance, des offices publics de financement de logement sociaux, de clubs sportifs, a-t-il pu être transféré aussi massivement vers une banque privée à l’hypothèque truquée ? Alors sans préjuger de la suite des débats, comme disent les journalistes professionnels, permettez moi de demeurer sceptique…
bonjour
l’affaire khalifa est plus complexe que votre analyse et surtout l’idée initiale était vraiment bonne et son développement a été possible par le vide économique en algerie dans les année 90 ( l’histoire khalifa sur le plan économique ressemble de loin a la pub renault qui à chaque nouvelle création ont dit, ils sont fou , ça ne marchera jamais ) car il y avait à l’époque un vide économique énormequi a été comblé par khalifa et à l’époque tout le monde a trouvé son compte .
merci et à la prochaine
@ l’inconnu,
La nationalité marocaine est très difficile à obtenir. Pour avoir une idée, en 50 ans d’indépendance, elle a été accordée à 5 personnes seulement.
On peut tjrs ironiser la dessus style : même en l’ayant qu’est ce qu’elle offre comme avantages ? pour être franche aucun mais c’est comme ca. Les raisons c’est que le roi ne se défait pas de ces sujets. Donc, elle n’est accordée que dans des cas rares. Mais une fois qu’on l’a on ne peut la perdre. La loi marocaine est clair la dessus : "on nait marocain et en meurt marocain".
Donc peut être que ce général demandera l’asile politique mais la nationalité je doute très fort qu’il puisse l’avoir.
Bonjour,
Permettez moi de corriger l’information erroné sur Larbi Belkheir : il n’a jamais été responsables des services -d’aucuns service d’ailleurs. C’est le génral Tewfik -promu entre temps- qui dirige le DRS secondé par le général Smain à la DRE (contre espionage). Belkheir si on veut est en quelque sorte leur parrain à tous ! Mais pour le reste, les informations que vous livrez sont plus que certaines. Merci et bonne continuation