Le match France - Allemagne sur les rails

« Quand je me regarde dans la glace, ça me désole, mais quand je regarde les autres, ça me console ». Cette semaine, Sarko et Anne-Marie Idrac, la patronne du rail pourraient faire leurs cet adage amusant.

Et oui, il n’y a pas qu’en France que des cheminots de mauvaise humeur ont décidé de remiser les trains au dépôt pour une grève reconductible. Certes chez nous, les voyageurs et les marchandises risquent de rester longtemps plantés sur les quais, car « contrairement à la grève du 18 octobre, qui, en fait, a duré une semaine, cette fois-ci, les cadres de terrain sont entrés dans la danse », s’inquiète ce responsable de la SNCF.

Mais il faut atténuer la noirceur de ce tableau. Outre-Rhin, c’est pire ! Fait assez étonnant pour un pays plutôt porté sur le consensus, là-bas, la chienlit dure depuis le printemps. Au centre du jeu, le syndicat allemand des conducteurs de train qui en fait voir de toutes les couleurs au gouvernement de coalition de Merkel. Depuis le printemps, il mène des mouvements sporadiques. Avec la grève totale qui débutait ce mercredi, visiblement ce sera le pompon.

Les conducteurs réclament une convention collective rien qu’à eux et une rallonge salariale de 30%. Pas de réforme de retraites en cause. En fait, les cheminots allemands ont une grève d’avance sur leurs collègues français. Pour eux, il s’agit de tirer les marrons du feu avant la réforme, impensable en France, qui se prépare : l’introduction en bourse de la Deutsche Bahn, envisagée par le gouvernement en 2008, mais qui, du coup, pourrait bien être renvoyée à plus tard.

En Allemagne, le mouvement suscite une vive inquiétude des milieux industriels qui craignent la paralysie des usines. Il faut dire que la DB est un ogre puissant qui réalise moitié plus de trafic que la SNCF dans la marchandise. Numéro 1 en Europe, il a même mis un pied en France en rachetant il y a peu une petite compagnie de fret anglaise, Eurocargo rail, histoire de tailler des croupières à son ex alliée SNCF, en état de survie artificiel dans le fret.

C’en est bien fini du pacte de coopération entre réseaux ferroviaires, même les Allemands désespèrent des performances de notre bon vieux service public à la française !

Pourtant, tout va très bien Madame la Marquise. Il y a deux semaines, Anne-Marie Idrac expliquait devant certains d’entre eux que « la présidente de la SNCF est heureuse tout comme ses clients du transport combiné ». La raison ? Dans le transport de conteneur, le trafic a cessé de s’effondrer et se reprend un peu. Et lors du traditionnel séminaire organisé pour la presse – à Vence cette année - la même expliquait devant un parterre de journaliste tout ouie qu’en 2012, la SNCF serait capable de tracter 50 milliards de tonnes-kilomètres. Belle performance. En somme, même pas ce que l’entreprise était capable de faire au début des années 2000 ! Mais pour plaire à Sarko qui, après le Grenelle de l’environnement, a décrété le transfert des marchandises du camion vers le train, la cheminote en chef, qui joue sa tête, doit faire encore mieux en matière de com’ que notre hyper président.

Reste qu’avec la grève que lui a préparée Sarko, il faudrait inventer un remonte-pente pour train de marchandise.