D’après le monsieur renseignement de Sarkozy, l’otage libéré Pierre Camatte serait un agent de la DGSE, qui travaillait sous couverture au Mali. Ce qu’a démenti, jeudi soir, l’Elysée
La couverture semblait solide. Même les envoyés spéciaux de la presse parisienne dépêchés à Bamako au Mali dans un Falcon 900 spécialement affrêté, pour venir se réjouir avec Sarko de la libération de l’otage français prisonnier d’Al Qaïda Maghreb Islamique s’y sont d’ailleurs laissé prendre. Tous ont présenté Pierre Camatte, détenu trois mois durant en plein désert par les fous d’Allah, comme un paisible retraité versé dans l’humanitaire.
Pour certains, il travaillait à éradiquer le paludisme dans le nord-est du Mali pour le compte d’une ONG jusqu’ici inconnue baptisée Icare. Pour d’autres, un peu mieux informés, ce Vosgien de 61 ans présidait surtout le comité de jumelage entre Gérardmer dans les Vosges et Tidarmené au Mali, association dûment enregistrée à l’hôtel de ville. Camatte paraît donc doté, comme l’on dit dans les services, d’une « légende » très crédible, justifiant ses allers-retours incessants entre la France et le Mali.
En réalité, Pierre Camatte est un agent de la DGSE, qui travaillait sous couverture, pour mieux surveiller les mouvements dans ce qui est devenu l’une des bases arrières des terroristes algériens de l’ex-GIA enrôlés aujourd’hui sous la bannière de Ben Laden. C’est en tout cas ce qu’a déclaré le très officiel Coordinateur national du renseignement à la Présidence de la république, le M. Espionnage de Sarko, Bernard Bajolet.
Ancien ambassadeur en Algérie et en Irak notamment, Bajolet est chargé depuis juillet 2008 de faire en sorte que la DGSE (espionnage) et la DCRI (contre-espionnage), principalement, au pire, ne se marchent pas sur les pieds et au mieux croisent leurs renseignements. Noble tâche si elle est menée de manière professionnelle… Or, le 27 janvier dernier lors d’une très officielle audition à la Commission de la défense nationale et des forces armées de l’Assemblée Nationale dont Bakchich s’est procuré le compte-rendu, Bajolet a – par inadvertance ? - « grillé » la couverture de Camatte, alors retenu en otage.
Ce jour-là, en fin d’audition, Bajolet est en effet interrogé très timidement par le député socialiste Guillaume Garot sur « les informations qu’il pouvait transmettre sur les agents des services retenus en otage ». Et M. Espionnage, tout à sa tâche d’information des parlementaires d’annoncer que huit français étaient alors prisonniers à l’étranger : « quatre au Soudan, un en Somalie, deux en Afghanistan », énumère-t-il et de préciser « un au Mali, Pierre Camatte ».
Un agent secret carbonisé par son propre patron ? Depuis l’affaire de la divulgation publiques des carnets du général Rondot dans l’affaire Clearstream, on avait pas connu plus grosses bourde dans les services depuis des années.
Actualisation vendredi 26 février, 11H
Apparemment, Bajolet a confondu, dans une réponse confuse, le cas de Pierre Camatte, qui d’après les informations de Bakchich, était au Mali, un correspondant des services et celui d’autres otages, qui n’ont rien à voir avec les missions de renseignement de l’Etat français.
N.B.
Ainsi donc, dans la charmante cité de Ménaka, dans le nord du Mali, à 100 km de la frontière avec le Niger, Pierre Camate, l’otage libéré en échange de l’élargissement de quatre membres d’Al Qaida, cultivait-il une plante capable de lutter contre le paludisme. Pierre Camate avait bien raison puisque cette maladie fait un million et trois cent mille victimes par an. Stéphane Picot, professeur à Lyon est l’un des meilleurs spécialistes mondiaux de cette pandémie. Il connait bien le Mali dont il est rentré aujourd’hui 26 février. Là bas, le professeur Picot ne se contente pas de lutter contre la maladie du moustique mais a aussi installé deux maternités, philanthropiques, à Bamako. Pourtant, lui qui là-bas connait tout, n’a jamais entendu parler de l’activité de Pierre Camate comme un chercheur « testant une plante anti palu » et pas d’avantage d’un Camate, jardinier capable de faire pousser cette plante magique : « Dans le nord du Mali, rien ne pousse ou très difficilement. Il ne viendrait l’idée à personne de cultiver raisonnablement dans une telle région. Cette histoire de plante me fait un peu rire… »
Stéphane Picot a-t-il mauvais esprit ? Même pas quand on lit la notice de l’Artemisia Annua une espèce de la famille des Ambroisies, capable de traiter le palu. La plante peut atteindre une hauteur de plus de 2,5 m en culture. Sa répartition naturelle s’étend à l’ensemble des zones tempérées chaudes et également dans certains pays des zones intertropicales. Un apport important en eau est nécessaire. Les feuilles de l’armoise annuelle (Artemisia Annua), originaire d’Asie, renferment une propriété antipaludique "L’ARTEMISINE". Cette plante a été utilisée pendant des siècles par la médecine chinoise traditionnelle. Ne doutons pas que le malheureux Pierre Camate, maintenant rendu à ces Vosges et à l’affections des siens va avoir le temps d’affiner ses découvertes et de rédiger une thèse conséquente…
Jacques-Marie Bourget
A lire sur Bakchich.info :
Voici le copier-coller du compte rendu officiel de l’audition de Monsieur barbouzes de Sarkozy :
M. Guillaume Garot. Quelles informations pourriez-vous nous transmettre sur les agents de nos services retenus en otage, leur nombre, leur situation ? Quelles sont les perspectives les concernant ?
M. Bernard Bajolet. Nous avons actuellement huit otages. Un au Mali, Pierre Camatte, quatre au Soudan, un en Somalie et deux en Afghanistan.