Dominique Baudis a été – très poliment – passé au grill, mardi 27 mai, par la commission des finances du Sénat. Objet de l’audition ? Les mécomptes de l’Institut du monde arabe (IMA), que Baudis préside depuis février 2007. Assis à sa droite, son directeur général, le diplomate algérien Mokhtar Taleb-Bendiab, n’a pas pipé mot sous sa moustache blanche.
Nommé président de l’Institut du Monde Arabe par Jacques Chirac, l’ancien maire de Toulouse, Dominique Baudis, qui fut un temps correspondant de TF1 au Liban, s’est trouvé pris dans un magma politico-diplomatico-financier dont il a le plus grand mal à s’extraire.
Le président de la quatrième chambre de la Cour des comptes, Alain Pichon, qui a épluché les comptes de l’IMA de 2003 à 2006, l’a reconnu hier devant la petite assemblée : si Baudis s’était appelé Duchmol, la Cour aurait balancé sa bombe, en publiant son rapport sur les comptes de l’Institut. « Nous n’avons pas communiqué sur l’IMA dans le rapport public, pour ne pas gâcher le plan de Monsieur Baudis », a lâché Alain Pichon. Joli traitement de faveur ! La Cour des comptes s’est contentée de transmettre au gouvernement un référé, confidentiel, qui pointe « la dérive stratégique et financière d’une institution qui n’est jamais parvenue à déterminer ce que devrait être sa place parmi les grandes institutions culturelles parisiennes ».
La version intégrale du rapport, si elle avait été rendue publique, aurait fait mal. Lors du contrôle, les enquêteurs sont allés de surprise en effarement : 80 pièces manquantes lors de l’inventaire des collections, 250 œuvres venues d’on ne sait où entreposées, à la sauvage, dans un cagibi… Depuis, la quasi-totalité des œuvres disparues a été retrouvée. Mais Brahim Alaoui, directeur du musée depuis sa création, il y a 20 ans, a été prié d’aller exercer ses talents de prestidigitateur ailleurs. Baudis en a profité pour changer aussi de commissaire aux comptes et d’expert comptable. Histoire d’y voir un peu plus clair dans ce fourbi.
Plus fondamentalement, la Cour des comptes et le Sénat ont pointé hier le statut ambigu de l’IMA, imaginé par Valéry Giscard d’Estaing à la fin des années 1980, construit sous le règne de Mitterrand et choyé par Chirac. En gros, c’est l’État français qui paye et les pays arabes qui décident ! La France ne dispose même pas d’un siège au conseil d’administration, alors qu’elle a aligné au total 104 millions d’euros au cours des dix dernières années. En 2008, le ministère des affaires étrangères a versé une subvention de 12,6 millions d’euros. Pourtant, à l’origine, l’IMA a été conçu pour fonctionner avec un financement à 60% français et à 40% arabe. Or, les États arabes, qui ont généreusement contribué à la construction du bâtiment des bords de Seine, dessiné par Jean Nouvel, ont cessé de payer depuis belle lurette. Il a donc été décidé, dès 1995, que les Etats arabes devraient régler leurs dettes… et qu’en contrepartie, on ne leur demanderait plus rien à l’avenir, sauf participation ponctuelle à des événements. Certains ont soldé leur compte, d’autres toujours pas. La Libye doit toujours 15 millions d’euros et l’Irak 14 millions !
Dominique Baudis, il faut lui en faire crédit, s’est démené depuis un an pour trouver des sources de revenus alternatives. Avec un million de visiteurs par an, surtout attirés par les expositions temporaires (comme Pharaon, l’âge d’or des sciences arabes ou Venise et l’Orient), la fréquentation est plutôt bonne, ce qui fait rentrer de l’argent dans les caisses. Le président est aussi allé taper des entreprises mécènes, désireuses de faire briller leur image dans le monde arabe (Total, Suez, Veolia), et il a viré le gestionnaire du restaurant, mal tenu et mal géré, pour le remplacer par le libanais Noura …
Mais cela n’a pas suffi à dissiper le malaise. Combien de temps encore l’État maintiendra-t-il sous perfusion une institution dont le contrôle lui échappe ?
L’IMA totalement inutile ? Pas d’accord : c’est important au contraire que le monde arabe, auquel nos médias font une si mauvaise réputation, ait un lieu pour se montrer dans sa dimension culturelle. C’est important pour les "jeunes issus de l’immigration" (bref, d’origine maghrébine) de pouvoir venir apprendre à connaître leur culture, leurs racines, au moins en partie, et leur langue dans un cadre laïc et ouvert.
Mais, ça, c’est sans doute trop encore pour ceux qui n’ont que mépris pour les arabes… C’est bien Goebbels qui disait : "quand j’entends le mot culture, je sors mon revolver" ?
j’ai travaillé à l’IMA et le public de l’IMA n’est justement pas " les jeunes issus de l’immigration " mais un public de gens intéressés par le monde arabe sans y avoir forcément d’attaches : des journalistes, des profs, etc.
et non ce n’est pas Goebbels qui a dit " quand j’entends le mot culture je sors mon révolver " (elle lui est improprement attribuée). arrêtons de sortir cette phrase de son contexte, et arrêtons d’avoir des clichés sur " les arabes " " les jeunes issus de l’immigration " etc.