Où l’on voit comment, depuis l’invasion de l’Irak, la division entre chiites et sunnites est devenue un axe majeur de conflit, latent ou ouvert, dans tout le Moyen-Orient.
Depuis l’intervention de l’armée américaine en Irak en 2003, les différences confessionnelles entre les Chiites et les Sunnites, dans la région, constituent un obstacle majeur dans la mise en œuvre de la politique moyenne orientale des États-Unis d’Amérique. Ces conflits pourraient changer, à terme, radicalement le paysage politique de cette région et ont déjà mis en difficulté la présence des Américains et leur plan ambitieux du grand Moyen-Orient.
Il faut savoir que la violence confessionnelle ne se limite plus au pays meurtri de l’Irak, mais elle étend sa portée au Liban jusqu’au Golfe Persique, elle se propage en Inde, au Pakistan, de sorte que les conflits déjà existants dans cette région atteignent l’apogée de la complexité de la politique étrangère de tous les pays de la région. Cette violence confessionnelle ajoutée aux conflits ethniques, rend encore plus difficile la faisabilité des efforts des Irakiens pour redevenir un pays à part entière tout en préservant leurs spécificités ethniques et confessionnelles. Au Liban, l’une des conséquences de la guerre du mois d’août entre le Hezbollah et Israël est la fragilisation accélérée de la cohésion nationale et l’aggravation sans précédent de la différence confessionnelle entre les Chiites d’un côté et les Sunnites et les Chrétiens de l’autre. Cette différence se creuse davantage avec l’intransigeance du Hezbollah pour renverser le pouvoir sunnite en place.
L’Iran et l’Arabie Saoudite, par leurs groupes protégés interposés, se livrent à une guerre latente sur la scène des conflits libanais et irakiens. En consacrant une partie importante de leur revenu pétrolier, ils aident, financièrement et logistiquement, des acteurs nationaux et transnationaux dans ces deux pays. Cette violence confessionnelle atteint même les organisations terroristes et des jahadistes salafides en menant une guerre sans merci contre les Chiites en Irak et ailleurs dans le monde musulman. Il est certain que l’issue de cette violence n’est pas pour demain, et sans doute les Américains n’en sortiront pas indemnes, (ni d’ailleurs aucun autre pays de la région).
La manière dont ces conflits confessionnels seront résolus, déterminera non seulement l’avenir de l’Irak, celui des peuples de la région et les relations entre leurs États, mais aussi l’avenir de la politique étrangère ainsi que le sort de l’influence des États-Unis.
Ces conflits deviennent de plus en plus complexes si nous tenons compte des autres conflits entre les Palestiniens et les Israéliens, entre les Chiites et les Sunnites au Liban, entre la revendication de reconnaissance des droits élémentaires des minorités chiites dans les pays du Golfe Persique et l’entêtement des régimes sunnites au pouvoir à vouloir maintenir le statut quo, et enfin entre l’instrumentalisation des chiites de l’Arabie Saoudite par le pouvoir iranien et la répression de cette communauté par les Saoudiens.
L’aspect conflictuel de cette différence s’est considérablement accentué avec les tensions engendrées dès le lendemain du renversement du Chah d’Iran, l’allié le plus sûr des pays Occidentaux et particulièrement des États-Unis, dans cette région. Depuis, l’alliance formée par les États arabes de la région et les Américains face à la menace de l’Iran chiite, ne cesse d’être davantage exprimée sous la forme de cette violence confessionnelle entre les Sunnites et les Chiites du Moyen-Orient.
Il est faux de dire que le conflit chiites/sunnites "s’étend" en Inde et au Pakistan à partir de l’épicentre irakien.
La guerre civile de basse intensité entre groupes chiites et sunnites au Pakistan bat son plein depuis au moins les années 1980.