La France de Sarkozy commence à inquiéter les décideurs économiques européens. A Bruxelles, Jean-Louis Borloo a été l’objet d’abord de curiosité, ensuite d’agacements. Alors que tous les pays de la zone euro réduisent leur déficit budgétaire, la France augmente le sien. La Grèce, qui naguère jouait les moutons noirs du système s’est présentée sereine, avec un déficit budgétaire inférieur de 0,4 points à celui de la France. Quant aux mesures de relance économique annoncées par le gouvernement français, tout le monde a conscience qu’il s’agit davantage de rassurer les habitants de Neuilly que de vraiment dynamiser l’économie du pays. L’odieux ISF va enfin disparaître et l’immobilier si durement acquis va devenir un peu moins cher. Dans le 9-3, évidemment, on se sent peu concerné, mais il est important que le 9-3 comprenne justement assez rapidement qu’on n’a guère envie qu’il soit concerné. La droite est décomplexée et l’Ile de la Jatte a conquis l’Elysée.
Au G8, tout cela n’a pas impressionné et les interlocuteurs de Sarkozy en sont restés à la conviction que la France allait continuer à jouer ce rôle inimitable de pays original, sans que l’on sache si cette originalité était messianique ou grotesque. Les hurlements de Christine Lagarde sur les négociations agricoles ont été sans équivoque : le pli chiraquien est pris plus que jamais par son meilleur disciple, le fils maudit Nicolas Sarkozy. En terme de situation économique globale, la France réussit cette année à être le pays qui a le plus faible taux de croissance du G8 et rien n’indique que la situation va s’améliorer.
En ce qui concerne les débats diplomatiques du G8, personne n’a très bien compris la position de la France sur les missiles américains. Apparemment, le dossier de politique étrangère qui mobilise Nicolas Sarkozy est la libération d’Ingrid Betancourt. Il faut dire que cette libération serait à la fois un beau succès symbolique et une façon ultime d’humilier Dominique de Villepin. Ce dernier connut en effet le ridicule sur les rives de l’Amazone en montant une expédition rocambolesque pour récupérer la malheureuse.
Reste le débat sur l’effet de serre. La décision prise de ne pas reporter les droits acquis automatiquement au-delà de 2008 a fait s’effondrer le marché du CO2, sans que, à quelque moment que ce soit, une autorité politique française ait émis la moindre opinion sur ce choix. La Chine, les Etats-Unis et tous les « charbonniers » sont ravis de cet effondrement tandis que la France, dont les dirigeants semblent assez mal comprendre ce qui se passe, bataille depuis quelque temps pour que les Etats-Unis prennent des engagements à l’horizon de 2050. Bush qui a parlé de tels engagements directement avec Sarkozy, a du se rendre aux arguments du président français qui a fait des gorges chaudes devant les journalistes de sa propre fermeté et de sa capacité de conviction. Certains commentateurs soulignent que Bush se demande comment il va passer 2008. Alors, ce que les usines cracheront dans l’atmosphère en 2050 ne constitue pas forcément une priorité pour lui !!
Quant aux manifestants qui sont venus se battre pour alléger la dette des pays en voie de développement, on a oublié de leur dire que cette dette n’existait plus. Au point que le Fmi, qui tirait ses ressources des intérêts versés par les pays sur-endettés du Tiers monde est en déficit. A Washington, où on ne veut plus payer pour toutes ces bureaucraties issues de la Seconde Guerre mondiale et des enthousiasmes des années Roosevelt, on menace de fermer le Fonds s’il ne trouve pas une solution pour effacer sa perte actuelle de 100 millions $ par an. Peut-être une quête parmi les altermondialistes : sans le FMI, que vont-ils devenir ? Qui vont-ils haïr ?