L’un des avocats des infirmières bulgares décrypte leur libération
Le 17 octobre dernier se réunissait pour la première fois la commission chargée d’enquêter sur les éventuelles contreparties du colonel Kadhafi obtenues par le sieur Sarkozy en échange de la libération des infirmières bulgares et du médecin palestinien. Y a été défini le calendrier des séances futures, et précisé que pour le moment, il n’était pas question d’ennuyer l’ex-couple présidentiel avec cette histoire… Autre bizarrerie : dans cette commission, l’UMP est largement majoritaire, avec 17 membres sur 30. L’on entend déjà siffler les langues de vipère. Mais ne vous méprenez pas, dans cette affaire, la transparence sera assurée. Et elle l’est déjà, de bout en bout. Enfin pas tout à fait, à en croire le contenu du livre d’un des avocats des infirmières, Emmanuel Altit, Dans les geôles de Kadhafi. (L’opus est paru le 18 octobre aux éditions Jean-Claude Gawsewitch).
Dès les premières pages, l’auteur annonce la couleur : « Je dirai ce qui s’est joué là, sur fond de diplomatie internationale, du pétrole et de vente d’armes : nos clientes n’étaient que des pions, je veux montrer tout l’échiquier » (p. 11). La Libye a en effet deux atouts qui semblent intéresser beaucoup ses voisins occidentaux. D’une part, sa Fortune la plus précieuse, l’or noir (le pays est assis sur les onzièmes réserves mondiales de pétrole). Sur ce plan-là, les « anglo-saxons » ont été les plus rapides que les Sarkozy. « Lorsqu’il prendra la présidence de l’Europe pour six mois (c’était en juin dernier), Tony Blair ira voir le leader libyen et reviendra avec, en poche, le plus gros contrat pétrolier jamais signé ». D’autre part, sa position géostratégique.
Aussi, pour Emmanuel Altit, « L’État libyen, redevenu présentable, espère pouvoir lui (l’Union européenne) vendre tout et n’importe quoi. En retour, elle attend de lui qu’il freine l’immigration sauvage des populations africaines et combatte le terrorisme islamique » : la Libye pièce maîtresse dans « le projet sarkozien d’Union méditerranéenne » (p. 124).
Et puis il y a le nucléaire. Kadhafi le réclame depuis si longtemps… La France s’est donc engagée à « lui fournir sa première centrale atomique » (p. 234). Et encore l’armement. Là, l’affaire est d’ores et déjà dans la poche ; l’« Accord de coopération dans le domaine de la défense et du partenariat industriel » entre le pays du Guide et l’hexagone a été publié au Journal Officiel le 10 octobre. Des accords se concluent avec le « Diable », six corps sont torturés des années durant, quatre cent enfants sont presque morts ou déjà enterrés ?
L’essentiel est ailleurs. « Toutes et tous, nous sommes et restons potentiellement de simples jouets dans la gueule des états. » (p. 245).