La Justice l’ennuie ? Jacques Chirac a trouvé la parade : l’humanisme itinérant
Bien sûr, à lire les gazettes et les communiqués de presse rédigés par ses assistants, il est certain que Chirac ira s’expliquer devant les juges. Pas devant ceux en charge de l’affaire Clearstream, qui pourraient en profiter pour l’interroger sur son compte au Japon. Mais, l’ancien chef de l’État est d’accord pour rencontrer la poignée de magistrats parisiens en charge des multiples affaires de la mairie de Paris et qui attendent depuis douze ans de pouvoir enfin le convoquer. Le Chi feint donc de se plier de bon cœur à ces têtes-à-têtes judiciaires. Cette bonne volonté s’explique très simplement par le fait qu’en réalité, il croit dur comme fer qu’il ne risque strictement rien et surtout pas d’être renvoyé en cour d’assises pour « faux en écriture publique » comme certains mauvais esprits se plaisent à le prétendre. Ces conseillers juridiques, au premier rang desquels le fils de Simone, Jean Veil, lui ont en effet présenté une parade anti-juges, à la fois très futée et très efficace. Jacques Chirac ne dispose plus de l’immunité présidentielle ?
Qu’à cela ne tienne ! Et pourquoi ne pas le faire protéger par une autre immunité, diplomatique celle-là ? Bingo ! Le Chi se prépare à lancer une grande fondation humanitaire pour « le développement durable et le dialogue des cultures » (sic). Une bonne œuvre donc, forcément très consensuelle. Et pour mener à bien sa nouvelle mission de pompier du monde, le Chi devra beaucoup voyager, parfois dans des pays hostiles. Il serait donc tout à fait envisageable qu’il demande et obtienne le rang d’ambassadeur extraordinaire. Et les privilèges qui vont avec : le coupe-fil à l’aéroport… et la possibilité d’envoyer paître les magistrats trop collants ! La technique a déjà très bien réussi pour le marchand d’armes Pierre Falcone, très fantôche ambassadeur d’Angola auprès de l’Unesco à Paris. Pourquoi l’Ex n’en profiterait pas également ?
Cinq affaires au moins pendent au nez de l’ancien précident Chirac. Le désormais justiciable ordinaire va devoir affronter les convocations des juges. En tête de liste, Cleastream, sans doute le dossier le plus sensible dans lequel le nom de Chirac est cité. Et pour cause, l’encombrante affaire de son compte japonais est au coeur de cette histoire. Les juges Huys et Pons, qui demandent à entendre le chef de l’État en qualité de témoin au sujet des nombreuses mentions de son nom dans cet épineux dossier, se heurtent, eux, à l’article 67 de la Constitution qui fait du chef de l’État une personnalité inattaquable sur toute la période de sa mandature, soit douze années d’impunité. Invoquant toujours son immunité d’ex chef d’État, Chirac ne répondra vraisemblablement pas, si les magistrats Michèle Ganascia et Fabienne Pous l’ordonnaient, sur l’affaire Borrel, dans laquelle l’ex président de la République aurait plus qu’outrepassé ses droits : le transfert du dossier à Djibouti aurait été ordonné par Chirac lui-même. Mais l’impunité ne vaut pas pour les petites affaires antérieures à 1995, notamment l’enquête sur les emplois fictifs du RPR qui avait valu une condamnation à Alain Juppé. Deux autres enquêtes visent l’ancien président de la République : la Sempap et les vols gratuits dont aurait bénéficié toute la famille Chirac sur la compagnie Euralair
« On voit mal comment Sarko pourrait refuser de faciliter la tâche si honorable que son prédécesseur se propose de remplir », note un ancien familier de l’Élysée chiraquienne. Et cette amnistie déguisée ne choquerait même pas l’opinion publique qui ne verrait que « le noble geste d’un ancien président qui mouille sa chemise pour les générations futures ». Imparable ! La fondation Chirac est d’ores et déjà en place, avec des statuts déposés en préfecture début mai. L’organisation, qui sera financée sur fonds privées, est même munie d’un trésorier, l’expert-comptable conseiller UMP, René Ricol. Et affublée d’un vice-président en la personne de Jean-Pierre Laffon, un ancien ambassadeur au Liban. Ce qui, au passage devrait assurer une contribution fort honorable de la famille Hariri au budget de la fondation. La future secrétaire de la fondation, Valérie Terranova, ancienne envoyée spéciale de Chirac au Japon, devrait également faciliter les relations entre le siège parisien et l’argent nippon, sans même que les fonds ne transitent sur le désormais célèbre compte japonais… Une structure qui assure l’afflux d’argent frais et protège contre les foudres de la justice : décidément, la fondation Chirac est l’idée du siècle.
Rien ne démontre qu’un statut diplomatique français épargnerait à Chirac de devoir rendre visite aux juges : la comparaison avec Falcone n’est pas pertinente puisque le héros de l’angolagate dispose, lui, d’un statut de diplomate étranger -en l’occurence angolais- . Un diplomate français bénéficie d’une immunité hors de France, mais la convention de Vienne ne peut s’appliquer à lui en France, à moins que sa fondation ne soit pas de droit français (mais alors pourquoi déposer ses statuts en préfecture ?) en revanche si elle était marocaine, Chirac pourrait avoir un statut de diplomate marocain.
dans l’attente de clarification
Hubert