Sarko va devoir troquer son joli costume de président « du pouvoir d’achat » pour celui du « retour à l’inflation ». Plus seyant sans doute, mais un poil moins populaire…
Bien que prévisible, le dernier chiffre affiché par l’Insee sur la hausse des prix a fait l’effet d’une douche froide parmi nos aimables dirigeants. Il est désormais évident que le « président du pouvoir d’achat » va devoir se replier vers des sujets moins sensibles que l’évolution du revenu de la population. D’autant que pendant que les prix montent, Bercy continue à faire le forcing pour obtenir une remise en ordre des finances publiques avec à la clef une hausse de la CRDS ou de la CSG.
Ce retour de l’inflation a comme conséquence imprévue de conduire à une relecture de la stratégie de la BCE. Même si certains économistes indiquent que la hausse des prix est largement liée à des facteurs extérieurs, comme l’évolution des cours du pétrole, il n’en reste pas moins que la lutte contre l’inflation est, en temps normal, la mission première de la BCE. De ce fait, Jean-Claude Trichet, son président, après avoir déclaré qu’il serait bon que les salariés fassent preuve de retenue dans leur demande d’augmentation des salaires, va probablement maintenir son taux d’intervention à 4% au moins jusqu’à l’été.
Or, en France, il est de bon ton de lui réclamer une baisse des taux à l’américaine pour soutenir l’activité économique. Il est d’autant plus déterminé à ne pas bouger que la compensation de la hausse du pétrole par l’évolution du taux de change entre l’euro et le dollar est probablement derrière nous. Si certains annoncent déjà l’euro à deux dollars avant la fin de l’année, aujourd’hui, une sorte de consensus se fait autour de l’idée que l’euro va désormais osciller autour de 1,55$, avec quelques pointes vers 1,6$.
Face à cette inflation, dans un premier temps, le gouvernement a réagi avec détermination : le Smic va être augmenté ! En fait c’est obligatoire, mais ne le répétez pas… Puis on envisage de s’engager dans une vaste réflexion sur l’évolution des revenus incorporant en particulier le problème des retraites. Raymond Soubie, l’un des multiples conseillers du Président, qui fut formé du temps de l’inflation des années 70, est tout excité à l’idée de retrouver le bon vieux temps du « grain à moudre », c’est à dire des hausses de revenu à moduler, même si ces hausses sont fictives, car grignotées par l’inflation. Il a proposé à Sarkozy de prévoir des rencontres régulières avec les syndicats afin de préparer une grande conférence des revenus style années 60. Un des problèmes abordés pourrait être celui de la mesure de la hausse des prix.
Les rapports se multiplient dans ce sens, le dernier en date étant celui des députés Alain Muet et Hervé Mariton. Tous deux ont une réelle maîtrise de l’économie ; néanmoins, leurs conclusions restent alambiquées, notamment en ce qui concerne les dépenses obligatoires des ménages. De plus en plus de gens, à Bercy ou ailleurs, s’interrogent sur les raisons de cette volonté apparente des pouvoirs publics de démontrer, en remettant régulièrement en cause les travaux de l’Insee, que le pouvoir d’achat baisse plus qu’on ne le dit.
Il y aurait là comme une balle tirée dans les pieds du « président du pouvoir d’achat », ce qui est fondamentalement incompréhensible. Sauf à admettre qu’en rendant encore plus confus le débat, on favorise la politique du Raminagrobis du social qu’est Raymond Soubie. Négocions, négocions, il n’en restera, en fait, pas grand-chose…
La hausse des prix d’après l’Insee : http://www.insee.fr/fr/indicateur/indic_conj/donnees/doc_idconj_29.pdf
Concernant le rapport parlementaire, il ne s’agit pas de remettre en cause les travaux de l’Insee, au contraire d’en rappeler la crédibilité et de proposer de les compléter.
http://www.assemblee-nationale.fr/13/pdf/rap-info/i0815.pdf