Hommage au Russe Nicolaï Vavilov, aventurier de la plante et philanthrope banquier de la semence.
Ce livre n’est pas follement écrit et contient quelques menues erreurs, mais… Mais il parle d’un héros méconnu, le Russe Nicolaï Vavilov, et montre que ce type a sa place au Panthéon des hommes.
Né en 1887, sous le tsarisme, Nicolaï meurt en 1943, dans une prison stalinienne. Comme des millions d’autres, il n’a rien fait. Ou plutôt, il a existé, ce qui peut passer pour une provocation politique au pays où nul n’existe.
Il a vécu en aventurier de la plante et de la semence, ce qui mérite explication. Après cinq années d’études dans un institut botanique, Vavilov se prend de passion pour ce qu’il appelle les « centres de diversité ». Avant tout le monde, il devine qu’il existe sur terre des points chauds de la biodiversité agricole et alimentaire. Des territoires où se concentre – la géographie, le sol, la température, les précipitations – une immense variété de plantes sauvages à partir desquelles l’humanité a sélectionné celles dont elle s’est nourrie pendant sa longue aventure.
Son rêve est de tout rassembler. Son délire le pousse à tout voir, tout envoyer au pays pour y réaliser une banque de semences qu’on pourrait continûment dupliquer. Grâce à laquelle on pourrait nourrir tous les peuples, à jamais ou presque. À partir de 1916, il est sur les chemins les plus hasardeux, du Pamir au Mexique, de l’Éthiopie à l’Amazonie. On lui tire dessus plus d’une fois, les guerres civiles défilent comme des décors de cinéma, on le voit sur de rares photos avec un chapeau mou à ruban, vêtu d’une chemise blanche à col cassé. La banque est finalement créée et installée à Leningrad, qu’on appelle aujourd’hui Saint-Pétersbourg. Mais l’impitoyable Seconde Guerre mondiale gronde. Le 22 juin 1941, les barbares nazis entrent en Union soviétique. Leningrad compte au moins deux immenses trésors. Le premier est constitué de plus de 1 million d’œuvres d’art rassemblées au musée de l’Ermitage. Staline déménage par train spécial et cars réquisitionnés les tableaux et sculptures. Mais le second joyau de la ville, la banque Vavilov, est laissé sur place.
Commence une tragédie shakespearienne : Leningrad est assiégée et le restera neuf cents jours. Le ravitaillement est presque impossible, et au moins 1,5 million d’habitants périssent avant leur libération. Par la force des choses, le cannibalisme fait sa réapparition. Et les semences ? L’incroyable est que les conservateurs formés par Vavilov, dont les propres enfants claquent des dents, ne touchent pas à la moindre semence, certaines étant pourtant de pommes de terre. Mieux : ils la cachent, dans une ville où l’on tue pour une promesse de repas, et la sauvent. La morale de l’histoire vous appartient.