Un parc naturel des calanques à Marseille, c’est bien. Sans les légionnaires, c’est mieux.
Les choses dégénèrent ? Affirmatif. Ceux de là-haut et des bords supérieurs ont beau dire ce qu’ils veulent, tout le monde se fout de la protection de la nature. Il y a quarante et un ans, dans le courant de l’année 1969, des centaines de milliers de Français signaient une pétition pour empêcher l’amputation du parc national de la Vanoise, créé en 1963. Jeunes gens, c’est vieux mais c’est vrai. En cette époque lointaine de spéculation effrénée et de magouilles immobilières, un promoteur soutenu par le pouvoir gaulliste voulait faire une station de ski en plus. Dans le parc national. Et il ne l’a pas fait. En cette fin d’année 2010, le moindre politicien de banlieue parle de biodiversité et lance des plans – sur la comète – pour montrer qu’il n’y a pas meilleur écologiste que lui.
Le plus rigolo, dans la catégorie, restera évidemment Jean-Louis Borloo, notre ministre de l’Écologie, maître ès moulinets, magnifique bateleur de foire. Qu’a-t-il fait ? À peu près rien. Qu’a-t-il dit ? Tout et son contraire. En ce moment, une vaste farce se joue à Marseille, où de nobles élus poussent les feux d’un projet de parc national des Calanques. Cette zone tant de fois brûlée reste une merveille au bord de la Méditerranée. Le clampin qui réussira à attacher son nom à la protection de ce site fantastique aura droit à sa statue sur le Vieux-Port.
Et le candidat existe, qui s’appelle Guy Teissier, député UMP de Marseille. Il est l’homme du parc national et, accessoirement, il est ancien parachutiste. On notera parmi les menus problèmes liés à l’idée de protéger les calanques, l’existence en plein coeur du futur parc d’un camp d’entraînement militaire de 322 hectares, Carpiagne. Le 4e régiment de dragons y fait circuler ses chars Leclerc, et des légionnaires du camp pourraient être à l’origine d’un incendie terrible qui a fait disparaître 1 300 hectares à l’été 2009. Certaine logique voudrait qu’on choisisse entre le camp et le parc. « Je ne vois aucune contradiction entre les deux », a gentiment déclaré Teissier.
Est-ce tout ? Non. La ville de Marseille vient de lever l’interdiction faite aux voiliers de plus de 20 mètres d’entrer dans les étroites et si fragiles calanques. Les connaisseurs des bateaux apprécieront la perspective. Vingt mètres, c’est géant ! Cette fois, est-ce vraiment tout ? Eh bien, non. En cette année de la biodiversité – rires préenregistrés –, on vient d’apprendre que le budget 2011 diminuait de 8 % les crédits alloués aux parcs nationaux. Mais on ne touchera évidemment pas à celui de l’armée.