Les généraux algériens ont la rancune tenace.
Début juillet, un colloque en l’honneur de l’ambassadeur d’Algérie en France, Missoum Sbih, un fidèle de Bouteflika depuis l’ère Boumediene, se tenait à l’Ecole militaire à Paris. Dans l’assistance, de nombreux gradés et des diplomates. « Monsieur l’ambassadeur, demande un officier français, je ne vous ai jamais entendu expliquer combien la France vous avait soutenu dans la sale guerre qui a opposé en 1994 votre gouvernement aux intégristes algériens. Pour quelle raison ? ». Le diplomate Dejamet, renchérit : « C’est vrai, vous n’en parlez jamais ! ».
Silence gêné dans l’assistance, et notamment du coté de l’ambassadeur d’Algérie, lorsque le patron de la Sécurité Militaire (SM) algérienne à Paris, Ali Ben Daoud, prend la parole visiblement courroucé : « Vous prétendez nous avoir aidés alors que vous ne nous avez pas même vendu un fusil de chasse ». Ambiance ! Ce que n’a pas rappelé le représentant de la SM algérienne, c’est que les Français avaient surtout refusé de livrer des hélicoptères Puma anti-guérilla. Lesquels étaient notamment équipés de matériel utilisable la nuit.
On aura compris que le traité d’amitié entre la France et l’Algérie (et les contrats mirifiques, notamment militaires, qui devaient aller avec) est au point mort. Au début de l’été et avant de disparaître pour presque deux mois, le président Bouteflika s’est rendu à Londres pour proposer aux Anglais d’entrer dans le commonwealth. Un joli pied de nez aux Français. Pour le Commonwealth, a répondu Blair, c’est un peu prématuré ; mais en revanche, ok pour discuter d’un éventuel contrat de satellites. Les Français d’EADS, qui étaient sur les rangs, l’ont eu un peu saumâtre. D’autant plus que les Russes avaient raflé voici quelques mois le marché des avions de combat en Algérie convoités par le groupe Dassault qui avait cru aux promesses de Chirac. Lequel, apparemment, a perdu la main à Alger (et pas seulement à Alger).