Un lycéen participe à une manif et écope de trois mois de prison avec sursis. Son père témoigne.
Bakchich publie la lettre d’un père dont le fils et trois de ses camarades ont été interpellés jeudi 19 novembre, placés 24 heures en garde à vue et condamnés à 3 mois de prison avec sursis pour avoir participé à la manifestation devant le lycée Roosevelt à Reims lors de la visite de François Fillon venu présenter la réforme des lycées.
Bonjour
J’apporte ce jour le témoignage d’un père de famille dont le fils est passé en comparution immédiate suite à cette manifestation et a été condamné à 3 mois de prison avec sursis après avoir passé 24h en garde à vue.
Mon fils Léo B. a 18 ans donc majeur et il est étudiant en fac d’histoire à Reims.
Il n’est pas inscrit à un parti politique et s’est rendu à la manif par solidarité avec ses camarades et amis du lycée Roosevelt.
Il a un casier judiciaire vierge, un attachement profond aux valeurs de justice et de solidarité doublé d’un tempérament doux et pacifiste. Il s’intéresse à l’actualité politique en tant que personne majeure porteur d’un droit de vote particulièrement en ce qui concerne ses pairs.
Mon fils a déjà participé à des manifestations et n’a jamais commis aucune violence ni exaction d’aucune sorte allant même jusqu’à redresser des containers de poubelles en déplorant ces actes susceptibles selon lui de discréditer les actions menées.
C’est ce même jeune garçon qui s’est fait interpeller et menotter jeudi après la manifestation au cours d’une rafle commise par la BAC alors qu’il attendait assis sur un plot pour reprendre son vélo garé devant le lycée, alors que la manifestation était terminée et qu’il avait demandé aux CRS à quel moment son vélo serait accessible.
Cette arrestation brutale est motivée par l’accusation d’avoir jeté des pierres sur les policiers pendant la manifestation avec soi disant pour preuve une vidéo le montrant distinctement. Mon fils fort de son innocence a demandé aussitôt à voir la vidéo qui le mettait en cause.
Il a été placé en garde à vue pour 24 heures, sans jamais pouvoir visionner ce document qui était sensé l’accabler. La raison en était, d’après la police que la vidéo était sous scellés pour le tribunal.
Après 24 heures de garde à vue traumatisantes (refus de l’informer de notre connaissance de sa situation, annonce que sa garde à vue pouvait être prolongée s’il niait, refus de nous contacter pour que nous communiquions aux forces de l’ordre les coordonnées de notre avocat…), il a été jugé en comparution immédiate qu’il a acceptée pour éviter de se retrouver en "préventive" chantage odieux qui ne lui laissait d’autres choix que le procès expéditif ou la prison.
Il n’a rencontré son avocat commis d’office que quelques minutes avant d’entrer dans le prétoire ce qui laisse perplexe sur le temps accordé pour préparer sa défense .
Malgré la demande des avocats et des inculpés, malgré l’absence complète de preuves (le seul témoignage écrit est celui du policier blessé qui disait n’avoir reconnu personne et expliquait que les jets de pierre venant de l’arrière de la manifestation ne leur étaient pas imputables puisqu’ils étaient sur l’avant ) et malgré les dénégations des quatre inculpés, cette bande vidéo n’a jamais été présentée à quiconque et le procès s’est conclu par une peine de sursis de trois mois pour chacun alors même qu’aucun témoin n’avait été entendu et qu’aucune preuve n’existait.
La conclusion de tout cela dépasse ce qu’un citoyen français peut imaginer : la condamnation sans preuve d’un innocent pour l’exemple, un traumatisme psychologique évident provoqué par une garde à vue visant prioritairement à faire d’un innocent un coupable à coup d’intimidation et de brimades de toutes sortes : autorisation d’aller aux toilettes plus d’une demie heure après la demande, nuit passée dans des conditions d’hygiène épouvantables , refus d’appeler les parents pour le choix de l’avocat, refus des policiers du commissariat de Reims alors que je me suis rendu sur place sur leur conseil, de me donner les informations sur les suites de la garde à vue jusqu’à la comparution immédiate après avoir soufflé le chaud et le froid et m’avoir donné des informations erronées ou contradictoires, refus du tribunal de prendre en compte l’absence de preuves et au final une condamnation avec sursis mettant directement en péril l’accès à la vie professionnelle de mon fils au terme de ses études.
J’espère que beaucoup de parents auront accès à cette information pour s’alarmer des conséquences désastreuses d’une politique sécuritaire et paranoïaque capables de briser la vie d’un jeune homme jusque là libre et heureux.
Georges B.
J’affirme avoir autant peur de la police que des criminels.
Il faut donner les moyens aux organes chargés de controler ces personnes qui ont tout les droits et en abuse.
Il faudrait des condamnations examplaires pour tous ces faux témoignages et accusations. Combiens d’"outrages et rebellions" ont été montés de toute piece. Combiens de passages à tabac à l’ombre des postes de police. C’est vraiment un scandale, la honte de la république francaise. La pression qu’on exerce sur eux n’excuse rien.
Pour moi la police ne vaut pas mieux que les milices de Vichy. Ne comptez pas sur moi pour venir en aide à un policier en détresse.
Un témoignage effrayant…
De nombreux autres articles sur la garde à vue se trouvent sur le site de Maître Eolas.
Le syndicat de la Magistrature a récemment sorti un guide que devrait apprendre tous les manifestants : http://www.guidedumanifestant.org/
Il comporte des points de droit très précis sur les gardes à vue.
Témoignage très intéressant et qui, effectivement, donne un bon exemple argumenté de ce qu’est une condamnation arbitraire.
Monsieur B., j’espère que vos propos auront tout l’écho qu’ils méritent. En général, les victimes de ce genre de faits s’appellent Ahmed, parlent en verlan et ont une casquette à l’envers (cf. Morano), et sont donc tout à fait inaudibles dans les médias.
Bien à vous, RémiZ