Avant même de perdre le Mondial, on a gagné le droit d’abriter l’Euro dans six ans. On va donc bâtir des stades…
Quand les archéologues de l’an 3010 découvriront le stade Vélodrome de Marseille, englouti un jour de match par le tsunami de 2537, ils se demanderont sans doute quel culte bizarre était célébré dans cette cuvette : généralement, lorsqu’un bâtiment semble totalement inutile, on en déduit, en archéologie, que c’est un temple. Là, ils ont mis à jour cinquante mille squelettes porteurs d’écharpes brodées de prières rituelles (« Fier d’être Marseillais ! », « On craint degun ! » etc.), deux autels garnis de filets troués, 50 caisses de pastis de messe, un string de dame dans le local nommé « vestiaire visiteurs » et un bout d’article de la Provence évoquant l’hospitalisation d’une jeune fille « en coma semi-éthylique » (authentique : je l’ai lu de mes yeux). On imagine leur perplexité…
Grâce à saint Domenech, dit « l’Obscur », on comprend désormais que le foot est un mystère qui n’a rien à voir avec les neurones et la pensée logique, bref, ce qui distingue l’Homo sapiens de la moule de Bouchot. Donc, puisqu’on nage dans la régression, on peut envisager, pour les besoins du culte, quelques sacrifices humains.
La preuve ? Jamais, en France, il n’a fallu autant d’heures de travail salarié pour acheter un mètre carré d’appartement. Et ceci à Lens comme à Bordeaux. Cette statistique est passée inaperçue, mais c’est normal, on vit dans l’orgasme : avant même de perdre le Mondial, on a gagné le droit d’abriter l’Euro dans six ans. On va donc bâtir des stades et réparer les vieux, qui ont 66 ans en moyenne, ce qui prouve, en passant, la possibilité de repousser l’âge de la retraite. Or l’État, totalement désengagé de l’immobilier social, financera largement nos stades.
Ce serait con de cramer tout ce pognon à faire plein de logis bon marché en cassant la spéculation sur les loyers. Vous avez remarqué, vous aussi, que Stade de France et sans domicile fixe ont les mêmes initiales ?