Les paradis fiscaux, mon beauf voyait pas vraiment le problème. Cocotiers, mer bleue… Le tout sans impôt.
Les paradis fiscaux, mon beauf voyait pas vraiment le problème. Cocotiers, mer bleue… Le tout sans impôt. Un rêve pour Bruno qui serait plutôt pour une généralisation du dispositif.
Le souci, Bruno, c’est que dans ce système, c’est toi qui raques pour les autres. « Oui, mais Sarkozy n’a-t-il pas dit l’autre soir sur TF1 que le secret bancaire, les paradis fiscaux tout ça c’était TER-MI-NE », me rétorque-t-il. Bon, deux trois précisions s’imposent.
1 – Que ceux qui ont fauté se dénoncent.
Sur le thème de l’évasion fiscale, c’est vrai que depuis quelques temps, on s’agite pas mal côté français. A la fin de l’été, on a vu Eric Woerth, notre ministre du budget, brandir une liste des 3000 résidents français qui auraient planqué des comptes en Suisse. Et il avait l’air bien décidé à leur faire la misère. Un bon coup de com’ pour faire oublier que si le bouclier fiscal a plombé le budget, il n’a jamais réussi à faire revenir personne. La cellule de dégrisement destinée à ramener dans le droit chemin les brebis égarées n’avait, à la rentrée, enregistré que quelques dizaines de dossiers. Donc Bruno, les listes, c’est bien mais c’est un poil insuffisant. Tiens, d’ailleurs, on ne parle déjà plus de la liste des deux cents noms de planqués au Liechtenstein. Aux dernières nouvelles, les enquêtes suivent leur (long) cours…
2 – Le vrai gâteau est ailleurs.
En France, toutes les grandes entreprises qui se respectent ont un, voire plusieurs, pied dans ces idylliques territoires… Et, ce qui est sûr, c’est que ce n’est pas toujours « pour accéder à un marché » qu’elles implantent des filiales au Costa-Rica ou aux Bermudes. BNP Paribas, championne toutes catégories, aurait 189 filiales dans les paradis fiscaux, Banque populaire Caisse d’épargne 87, Schneider 131, Danone 47… Le manque à gagner pour le fisc est immense –40 à 50 milliards d’euros de recettes évaporées selon les estimations.
Jusque-là, la question n’empêchait pas vraiment de dormir les dirigeants français longtemps bienveillants, par exemple, vis-à-vis de Monaco ou d’Andorre. En 2007, Bercy enterrait, par exemple, discrètement un rapport de l’INSEE et de la direction du Trésor sur les petites manip’ des multinationales dont les filiales françaises parvenaient à gruger le fisc français. Et jusqu’à aujourd’hui, la question des « prix de transfert », ce que se facturent les sociétés au sein d’un même groupe et qui permet toutes les acrobaties possibles, dès lors que ces sociétés sont logées dans les paradis fiscaux, n’est toujours pas au menu.
3 – La France n’a pas de leçons à donner.
Si Sarkozy a donc fait le fier-à-bras au dernier G20, c’est aussi que la France est loin d’être la première de la classe sur la transparence financière et pourrait être à nouveau épinglée par le GAFI (Groupe d’action financière internationale). Elle possède ainsi des régimes fiscaux bien particuliers comme le bénéfice mondial consolidé qui permet par exemple à une entreprise de faire remonter les pertes de ses filiales étrangères pour réduire sa facture fiscale. Et ce en toute opacité ou presque.