Une interview croisée avec le patron de FO dans l’hebdo communiste a énervé Bernard Thibault, qui réclame que « L’Humanité Dimanche » fasse preuve de « déontologie professionnelle ». Rien que ça.
La présentation sur une double page de L’Humanité Dimanche du 2 octobre des réponses de Jean-Claude Mailly et Bernard Thibault à des questions sur les conséquences de la crise et de la mondialisation a suscité bien des remous. Alors qu’elles avaient été recueillies par email, les interviews pouvaient laisser penser à un entretien croisé. Ce qui provoqué les foudres du patron de la CGT.
Le directeur de la rédaction du magazine a en effet reçu le lendemain de la parution une bafouille de Bernard Thibault au ton cassant et un brin donneur de leçons (voir doc). Lecteur assidu (et même abonné) de L’Huma Dimanche, le leader cégétiste a trouvé plusieurs raisons de s’emporter à propos de l’article du 2 octobre : « L’extrait de mon interview se résumant à l’une de nos propositions pour ’’une conférence sur l’emploi industriel et une nouvelle stratégie de développement’’, laisse inévitablement apparaître que FO est plus combatif que la CGT. Je vous remercie ». Et d’inviter peu après la rédaction de l’hebdomadaire à réfléchir à « sa déontologie professionnelle ». A transmettre au groupe de travail des États généraux de la presse qui planche sur le sujet, peut-être ?
Mais ce qui le met dans tous ses états, c’est le passage consacré à la mobilisation du 7 octobre, décrétée « Journée mondiale pour le travail décent » par la Confédération syndicale internationale (CSI). Mobilisation un peu molle, FO et la CFTC refusant de rallier l’appel unitaire national initié par la CGT : le syndicat de Mailly avait annoncé de longue date préférer s’en tenir au rassemblement de la CSI.
C’en est trop pour Thibault, qui parle dans sa lettre de torpillage de la journée du 7 octobre par FO et dépeint Mailly en « recordman du nombre d’appels à la grêve depuis dix mois sans en avoir organisé aucune. » On sait aujourd’hui que la mobilisation du 7 a connu un succès tout relatif…
Difficile d’expliquer une telle vindicte au seul motif d’une maquette « maladroite » dans un magazine plutôt sympathisant cégétiste. Déjà en juin, Bakchich a raconté que la CGT n’avait aujourd’hui plus de stratégie d’opposition systématique et que son réformisme avait du mal à passer en interne. Ce courrier met un peu plus à jour une inimitié montante entre les deux syndicats ouvriers. A deux mois des élections prudhommales, les salariés apprécieront.
Résultat du coup de sang de Thibault, qui se dit « interviewé déçu », des excuses de L’Humanité Dimanche formulées dans un court texte du numéro suivant de l’hebdomadaire. Un petit pavé « à nos lecteurs » pour un gros mea culpa à l’attention de Jean-Claude Mailly et Bernard Thibault, ainsi qu’aux lecteurs de l’hebdo… qui n’en demandaient pas tant. « L’entame de cet ensemble rédactionnel [sic] aurait dû présenter la méthode d’interview. Faute d’avoir été fait, la confusion s’est installée », précise benoîtement le journal. Contacté par Bakchich, le journal plaide la simple bourde.
Que Jean-Claude MAILLY et FO soient sur des bases de défenses des salariés plus fortes que celles de THIBAULT et de la direction confédérale CGT n’est pas nouveau. En signant la position commune AVEC LE MEDEF remettant en cause le droit syndical au bénéfice des patrons et de l’appareil CGT, THIBAULT aura participé à la mise à mort du syndicalisme en France et à la liquidation de centaines de sections CGT.
edition de bruno tout est dit