Depuis six mois, Moscou détient dans ses geôles un redoutable mercenaire israélien : Yair Klein. Le gouvernement colombien fait des pieds et des mains pour que cet ancien colonel de Tsahal soit extradé.
La Russie s’apprête à extrader le mercenaire israélien Yair Klein vers Bogota, la capitale colombienne. Alors que l’homme est traqué par Interpol depuis une décennie, les services russes ont réussi à mettre le grappin sur l’oiseau le 27 août dernier, alors qu’il s’apprêtait à s’envoler pour Tel-Aviv. Moins une… Car à peine le pied posé en Israël, cet ex-colonel de Tsahal aurait été à l’abri de toute extradition, conformément aux lois de l’Etat hébreu.
Selon le vice-ministre de la justice colombien, Guillermo Francisco Reyes, Yair Klein est attendu à Bogota dans un délai d’une quarantaine de jours. Mais les observateurs du dossier s’accordent à dire que cela prendra beaucoup plus de temps. « Entre six mois et un an », présagent-ils, compte tenu de la complexité et la sensibilité de l’affaire. C’est le moins que l’on puisse dire… D’une part, la procédure administrative d’extradition risque de durer vu qu’aucun traité ne lie la Russie à la Colombie. D’autre part, le scandale pourrait bien éclabousser les plus hautes sphères de l’Etat.
En effet, Jacob Lowi, avocat en Colombie de celui qui se vante de pouvoir « éliminer les Farc en six mois », martèle à tout va que son client Yair Klein n’a fait qu’obéir aux ordres d’oligarques « aujourd’hui au pouvoir » en Colombie. Il jette ainsi l’anathème sur les accointances douteuses d’antan entre le gotha politique colombien et les paramilitaires d’extrême droite. L’opaque triumvirat paramilitaires-politiques-narcotrafiquants se retrouverait ainsi sur la sellette… Avec toutefois un bémol : selon Jacob Lowi, « les règles du jeu ont changé, et aujourd’hui il va être condamné ».
D’autant que le CV de son client vaut son pesant de cacahuètes. Si son premier treillis porte les insignes de Tsahal dés 1962, Yair Klein délaisse vingt ans plus tard son uniforme pour créer sa propre firme de sécurité : Hod He’Hanitin (Fer de lance), basée à Tel-Aviv. A la fin des années 80, muni d’un passeport bidonné, il débarque en Colombie en costume de mercenaire. Sa mission est précise : former et entraîner les milices paramilitaires d’extrême droite aux techniques terroristes. Prolongation de l’action contre-insurrectionnelle de l’Etat, basée sur une économie de narcotrafic, les paramilitaires se présentent, à leurs balbutiements, comme des « autodéfenses paysannes » et jouissent d’un appui des forces publiques pour leurs traques sans merci des forces armées de gauche.
Au service des grands propriétaires terriens désireux de combattre l’insécurité et les guérillas d’extrême-gauche (les marxistes des FARC et les castristes de l’ELN), Klein met sur pied une kyrielle d’armées privées aux pratiques sanguinaires. Pour pérenniser leurs juteux business, les célèbres barons de la drogue tels feu Pablo Escobar ou encore José Gonzalo Rodriguez Gacha, alias « le Mexicain », font aussi appel à ses services pour créer de véritables petits contingents « entraînés à tuer », comme l’explique Andres Penate. L’ancien patron de la police secrète (DAS) n’hésite pas à qualifier Yair Klein de « bandit-terroriste ». Loin d’en démordre, le mercenaire critique au vitriol le processus de démobilisation des paramilitaires (février 2000), jugé « stupide ».
Résultat de ce joli parcours : en 2001, l’ex-colonel de Tsahal écope d’une peine de dix ans et huit mois de mitard infligé par la plus haute cour du Tribunal de Manizales (département d’Antioquia, dans le Nord-Ouest de la Colombie). L’année suivante, un juge spécial de Bogota le condamne pour « délits de terrorisme et port illégal d’armes à feu ». Les griefs sont nombreux et remontent à la fin des années 80. Mais mercenaire pépère n’en a que faire et passe au travers des mailles de la justice.
Aujourd’hui embastillé à Moscou et dans l’attente de son extradition, ce père de l’action paramilitaire « made in Colombia » peut toutefois se réjouir d’un point : les reliquats de son mouvement ont conservé leurs armes chéries et les techniques du mercenaire israélien se transmettent toujours de génération en génération.
Excellent, je reviens d’un an en Colombie et cela fait toujours plaisir de voir des personnes qui ne mélangent pas tout, para, farc et autres amis de la gâchette facile. Je suivrai avec attention les dénouements de cette histoire.
Merci
JH
Intéressant,
J’apprécie le travail de bakchich sur les affaires internationales, mais j’ai ce sentiment de rester sur ma faim. Le dernier articles croustillant selon moi était le papier sur le possible engagement de la france dans un conflit contre l’Iran.
A quand des détails sur les menace du Prince Bandar (attentats en grande bretagne) à propos de cette affaires de gros sous (contrat d’armement et jolis pourboires) A quand le rôle des compagnies militaires privées aux usa, des sccops sur l’étrange affaire AZF etc.
Cordialement