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Le Liban tout feu, tout flamme

jeudi 13 juillet 2006 par J.K.
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L’été commence mal à Beyrouth. Après le rapt de deux militaires israéliens par le Hezbollah, Tsahal est revenu faire un tour au Liban.

Jeudi matin, Beyrouth s’est réveillée avec la gueule de bois. Après les bombardements israéliens qui ont touché le sud du pays, Baalbek mais aussi la capitale libanaise où l’aéroport a fait l’objet d’un raid au petit matin, les Libanais sont effondrés. Les rues de Beyrouth, si bruyantes d’habitude en ces temps estivaux, sont presque désertes. Les touristes ont délaissé les plages. Les Libanais, eux, ont été bien peu nombreux à se rendre au travail, préférant la sécurité de leurs maisons, Israël ayant annoncé de nouveaux raids.

La saison estivale va tourner court

« Depuis le début de la guerre, j'ai un noeud » Dans tous les foyers, on reste scotché à la télévision, dans l’attente de nouvelles. A Hamra, dans un café, les serveurs, silencieux et l’air grave, ont aussi les yeux rivés sur le petit écran. Le patron, un sunnite, ne peut s’empêcher, lui, de crier son désespoir. « Hezbollah, le parti de la résistance ? De sacrés connards, oui, à cause de qui on va tout perdre », s’étrangle-t-il de rage. Avant de s’en prendre à la Syrie : « C’est Assad qui est derrière tout ça. C’est lui qui fournit les armes au Hezbollah pour mettre le Liban à feu. » Quelques passants hochent de la tête. Les serveurs, eux, s’inquiètent de cette saison estivale qui va sûrement tourner court. « Nous n’avons touché qu’un demi-salaire ces derniers mois, explique l’un d’entre eux. La saison touristique s’annonçait très bien cette année (1 million de personnes étaient attendues au Liban cet été, ndlr). On espérait tous que grâce à cette manne étrangère nous pourrions faire vivre nos familles décemment. Mon cousin habite au Sénégal. Même lui ne viendra pas cet été : il m’a téléphoné ce matin pour me dire qu’il avait annulé ses billets d’avion. »

Au centre-ville de Beyrouth, la rengaine est la même. Des employés de bureau font une pause cigarette sur le trottoir. Paul, un chrétien, déplore les méthodes du Parti de Dieu : « Pourquoi le Hezbollah a-t-il pris ces deux soldats israéliens en otage. Ils veulent la mort du Liban ? Israël va nous bombarder, et Israël aura bien raison. Les juifs détruisent Gaza parce que des Palestiniens ont pris un seul otage. Le Hezbollah, lui, veut faire mieux en en raflant deux d’un coup, alors on peut imaginer ce qui va s’abattre sur nous… »

Après les drapeaux du Mondial, les drapeaux du Hezbollah

Un peu plus loin sur le front de mer, un marchand de jouets. Dans son échoppe, télécommande à la main, il zappe sur toutes les chaînes à la recherche de la moindre information qui aurait pu lui échapper. Il tombe sur Al-Manar, la télévision du Hezbollah qui, bien que bombardée dans la nuit, continue d’émettre. Des chansons guerrières à la gloire du Hezbollah remplacent les programmes habituels. Il zappe alors sur la NBN, la chaîne du président chiite du parlement, Nabih Berri. NBN diffuse en continue les images du bombardement du Sud Liban. Gros plan tout en longueur sur un mort qui a eu la tête arrachée. Le patron fond en larmes. « Je ne pleure pas ce mort, s’empresse-t-il de préciser. C’est un combattant du Hezbollah, qu’il aille en enfer. Ces larmes, ce sont celles du désespoir de voir mon pays replongé dans l’horreur, comme il y a 20 ans. »

Dans la banlieue chiite du sud de Beyrouth, des drapeaux jaunes du Parti de Dieu remplacent ceux du Mondial qui flottaient il y encore à peine quelques heures aux balcons. Les miliciens hezbollahis paradent sur leurs jeeps militaires, en promettant « la libération de tous les détenus libanais et palestiniens en Israël ». Pourtant, les habitants de cette banlieue qui est normalement acquise à la cause du Hezbollah, se terrent chez eux, portes closes, et fenêtres fermées. Pas un seul ne voudra s’exprimer sur le sujet. Comme si eux aussi condamnaient finalement l’attitude guerrière de leurs protecteurs.

L’aviation israélienne a effectué une quarantaine de raids au Liban durant la nuit du mercredi 12 au jeudi 13 juillet. Au sud et dans le centre du pays, ces attaques ont visé des cibles du Hezbollah mais aussi des cibles civiles, comme l’aéroport international de Beyrouth. 31 personnes, dont dix enfants, sont mortes dans ces bombardements et 56 ont été blessées. Ces raids ont eu lieu en représailles de la capture de deux soldats israéliens par le Hezbollah. Selon une porte-parole de l’armée israélienne, ces raids ont visé des sites où le Hezbollah entrepose de « très grandes quantités d’armes et de munitions, dont des roquettes utilisées contre le territoire israélien ». Elle a également précisé que l’aviation israélienne a bombardé jeudi matin l’aéroport de Beyrouth, car il servait au « transfert d’armes pour le Hezbollah libanais ».C’est la première fois depuis l’invasion israélienne du Liban en 1982 que l’aéroport de Beyrouth est fermé au trafic. Selon un officier supérieur de Tsahal, d’autres aéroports libanais vont être la cible de raids, tandis que la marine va empêcher les mouvements de navires dans les ports de Saïda, Tyr, Beyrouth et Tripoli. La marine de guerre israélienne est d’ailleurs déjà entrée dans les eaux territoriales libanaises dans le cadre de ce blocus imposé par Israël sur le Liban. La banlieue chiite de Beyrouth, dans le sud de la capitale, a également été la cible de l’aviation israélienne. Le Hezbollah a indiqué qu’un missile avait touché un immeuble abritant des locaux d’Al-Manar, sa chaîne de télévision, qui n’a pas interrompu ses émissions. Plusieurs dizaines de frappes aériennes israéliennes ont visé une douzaine de ponts, interrompant les communications téléphoniques entre Beyrouth et le sud du pays. Ces bombardements ont également endommagé le réseau routier déjà mal en point du Liban-Sud. Le Premier ministre libanais, Fouad Siniora, a assuré que son gouvernement n’avait pas été informé au préalable de l’opération du Hezbollah, ne l’approuvait pas et n’en acceptait pas la responsabilité.

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