La candidate à l’élection présidentielle se serait probablement passée de cette publicité. Le 20 mai sort aux Etats-Unis « La Famille : l’intégrisme secret au cœur du pouvoir américain », de Jeff Sharlet. « Bakchich » l’a lu pour vous en avant-première, et les révélations sont fracassantes. Hillary connait très bien cette famille pour y occuper une place de choix depuis 16 ans. Mais il s’agit là d’une famille un peu particulière. Racisme, homophobie, culte du secret et des réseaux, inspirations fascisantes, autant de mot qui jettent le trouble sur Mme Clinton.
Au cours des 16 dernières années, Hillary Clinton a fait partie d’un groupe d’intégristes chrétiens, destiné aux élites, inconnu, non seulement de l’électorat américain, mais aussi de presque tous les intégristes chrétiens eux-mêmes, tant le goût du secret est cultivé par cette fine fleur de la guerre spirituelle. Mais un livre choc à paraitre le mois prochain lève le voile sur les agissements sinistres et le passé fascisant de ce groupe auquel est affiliée la candidate à la Maison Blanche.
« The Family : the secret fundamentalism at the heart of American power » (« La Famille : l’intégrisme secret au cœur du pouvoir américain »), de Jeff Sharlet, sera publié le 20 mai par la maison Harper Collins. Bakchich a pu consulter en exclusivité les épreuves de ce livre terrifiant.
Connu de ses adeptes sous le nom de « la Famille » ou de « the Fellowship » (un terme religieux qui signifie la camaraderie chrétienne), ce mouvement a été fondé il y a 70 ans, à l’apogée de la Grande Dépression des années 30, à Seattle, dans l’Etat de Washington, par un pasteur intégriste, immigré norvégien, du nom d’Abram Vereide.
A l’origine, « la Famille » fut lancée pour combattre le radicalisme syndical et le communisme. Elle était financée par les patrons des grandes entreprises et des banques. Durant cette époque mouvementée, Vereide, qui pouvait compter sur de solides appuis des princes du business, a rapidement tissé un réseau au sein des élites nationales (le QG de « la Famille » a déménagé à Washington en 1942) et mondiales. Il est ainsi devenu, au fil des années, le conseiller privilégié des présidents et des rois à travers le monde, grâce à « son idéologie expansionniste de contrôle qui convient davantage à un empire qu’à une démocratie. » « La Famille » avait même ses entrées chez le Général De Gaulle ; le collaborateur principal de Vereide en France était Edmond Michelet, cinq fois ministre sous le Général et l’un des piliers des partis gaullistes successifs.
En 1966, Doug Coe, actuel chef du mouvement, qui est alors le lieutenant de Vereide, lui succède à la tête de « la Famille » et donne une nouvelle orientation au mouvement. Il décide d’agir dans le plus grand secret afin de consolider « une véritable avant-garde souterraine des hommes du Christ qui noyautaient tout le gouvernement », comme l’a décrit dans son mémoire « Born Again », un autre membre important de « la Famille », l’ancien conseiller politique du Président Nixon, Charles Colson, après son séjour en prison à la suite du Watergate.
Coe a été un intime de tous les présidents américains depuis Gerald Ford dans les années 70. Quand le magazine Time rassemble, en 2005, une liste des 25 intégristes les plus puissants, Doug Coe est présenté comme « The Stealth Persuader », en français, le persuadeur furtif.
« La Famille » est composée de 20.000 initiés, soigneusement choisis dans les rangs des leaders politiques, militaires, et d’affaires, organisés dans des « cellules » où les deux sexes sont rigoureusement séparés. Un cercle de 350 personnes contrôle le mouvement. Un document interne au cercle clamait qu’ « Hitler, Lénine, et tant d’autres avaient compris le pouvoir d’un noyau dur. » La Famille « n’a pas pour objectif le salut de tous, mais la formation des ‘hommes clefs’ choisis par Dieu pour diriger les affaires de la nation. »
Quand Hillary Clinton est venue habiter la Maison Blanche pour la première fois en 1993, elle est tout de suite devenue membre d’une des cellules féminines de la Famille, un groupe d’étude de la Bible où, 8 années durant, elle a côtoyé les épouses de politiciens conservateurs comme Susan Baker, femme du consigliere et Secrétaire d’Etat de Bush père, James Baker ; Joanne Kemp, femme de l’icône conservateur Jack Kemp, ancien footballeur et membre du Congrès devenu le candidat à la vice-présidence sur le « ticket » du Parti Républicain contre Bill Clinton en 1996 ; Grace Nelson, la femme du Sénateur Bill Nelson, un démocrate très conservateur de Floride ; et Eileen Bakke, femme de Dennis Bakke, le leader du soi-disant « Christian management mouvement », une mouvance patronale antisyndicale.
Dans son bouquin « Living History », Hillary Clinton a décrit sa première rencontre avec le chef de la Famille, Doug Coe, lors d’un déjeuner avec sa « cellule de prière » au magnifique domaine du groupe, « Les Cèdres », situé sur la berge de la Rivière Potomac aux portes de Washington (et acheté par « La Famille » en 1978 grâce aux dons de Tom Phillips, le PDG de Raytheon, un géant industriel de l’armement). Coe, écrivait-elle, « est une présence unique à Washington, un mentor spirituel et un guide suprêmement aimant qui est ouvert à tout ceux qui veulent approfondir leur relation avec Dieu, peu importe leur parti politique ou leur foi ». Puis, Hillary est devenue l’un des visiteurs habituels aux Cèdres, où Coe loge des membres du Congrès et leur dispense des conseils « spirituels ».
En juin 2007, lors de la campagne présidentielle, Hillary répondait à la question suivante devant le groupe intégriste « Sojourners » : comment sa foi l’avait-elle aidé à surmonter l’affaire Lewinsky ? Et Hillary d’expliquer qu’elle s’était appuyée sur « sa famille de foi étendue » qui était venue à son secours. « Ils ont été des guerriers de prière pour moi ». Peu de gens savaient alors qu’elle parlait de « la Famille » dont Coe était le chef.
Aujourd’hui, Hillary a pris du galon dans « la Famille ». Elle a quitté la cellule des femmes politiques pour le « Senate Prayer Breakfast », le petit déjeuner de prière du Sénat, la cellule la plus importante dans la hiérarchie de Coe. Une quarantaine de sénateurs, pour majorité des Républicains, s’y rendent régulièrement.
Clinton y professe sa foi à côté de ses collègues les plus conservateurs, comme Tom Coburn d’Oklahoma, qui demande la peine de mort pour les médecins pratiquant l’interruption volontaire de grossesse ; ou George Allen de la Virginie, éphémère candidat a l’investiture républicaine pour la présidentielle obligé de se désister l’année dernière après ses propos racistes diffusés sur internet ; ou encore Rick Santorum de Pennsylvanie, battu en 2006, et ennemi acharné de l’homosexualité, qui avait l’habitude de la comparer à des actes sexuels « entre hommes et chiens ».
C’est avec l’ignoble Santorum qu’ Hillary avait co-sponsorisé un projet de loi, le « Workplace Religious Freedom Act » qui, au nom de la liberté de la foi religieuse, aurait permit à des pharmaciens de refuser de vendre des préservatifs, à des policiers de refuser de protéger les cliniques pratiquant l’avortement, ou aux infirmières de refuser des soins à des homosexuels !
Et comme l’écrit si bien Jeff Sharlet, « sous la tutelle spirituelle de "la Famille", Hillary se tourne irrémédiablement vers la droite, et dérive de la politique progressiste traditionnelle vers la privatisation de la protection sociale et de l’aide aux défavorisés. Une politique que Vereide [le fondateur de la Famille] a toujours soutenu en réaction au "New Deal" » du Président Franklin D. Roosevelt.
Car « la Famille » a toujours été le fer de lance du « capitalisme biblique », prônant un intégrisme de la richesse qui justifie la cupidité comme force motrice du progrès. Une idéologie répandue dans des livres intégristes devenus depuis des succès de librairie, à l’instar de « Jesus is my CEO » (« Jésus est mon PDG »).
Mais, au delà des révélations sur Hillary, le livre de Jeff Sharlet, mi-journaliste d’investigation, mi-historien, raconte le passé plus que trouble de « la Famille » et l’effrayante évolution de son idéologie. Dans les années 30, son fondateur, Vereide, a recruté autour de lui des gens comme le riche homme d’affaires Merwin K. Hart, un antisémite notoire, catalogué par le FBI comme « un promoteur du mouvement fasciste américain »… Un des premiers soutiens de Vereide dans le Congrès fut le Sénateur Ralph Flanders, un membre du Ku Klux Klan. Du beau linge, en somme.
Après la Deuxième Guerre mondiale, Vereide se rendit en Allemagne dans l’avion du commandant militaire de la zone occupée par les Etats-Unis, et entama une tournée dans les camps de prisonniers pour y recruter de « bons chrétiens ». Des recrues qui n’était en fait que d’anciens nazis capables de servir « la Famille ». Ainsi l’ancien diplomate et chef de la Gestapo en Amérique Ulrich von Geinath, le Docteur Otto Fricke, un spécialiste de la propagande radio au service de Joseph Goebbels, ou encore Hermann J. Abs, le « banquier d’Hitler ».
Devenu très influent dans l’Allemagne de l’après-guerre grâce a ses fidèles au Congrès et dans le commandement de l’armée américaine d’occupation, Vereide a fait échouer de nombreuses tentatives d’épuration qui visaient à écarter d’anciens nazis de la vie publique. Il a réussi à faire blanchir des centaines d’entre eux et parfois même (en féroce combattant de la Guerre Froide qu’il était) à favoriser leur recrutement par les services de renseignements de Washington.
Plus récemment, les fidèles de « la Famille » au Congrès ont fait voté des textes accordant davantage d’aides aux dictateurs Duvalier à Haïti et Park en Corée du Sud. Les « hommes de Dieu », embrassés par « la Famille », comptent parmi eux le sanguinaire dictateur Indonesien Suharto, le Général Gustavo Alvarez Martinez de Honduras, organisateur des escadrons de la mort et le dictateur Siad Barré de Somalie, considéré par Coe comme son « frère », quelques noms d’une longue liste de généraux et présidents meurtriers.
Le livre de Jeff Sharlet n’est pas le brouillon d’un vendeur de sensationalisme mais le fruit de 8 ans de recherches approfondies. Sharlet est un excellent journaliste reputé qui s’est fait une spécialité des sujets religieux. C’est un collaborateur de longue date des magazines Harper’s et Rolling Stone, et il est également chercheur au Centre d’Etudes de la Religion et des Médias de l’Université de New York.
Il ne reste plus qu’à « prier » pour que « La Famille » trouve un éditeur français, car on se doit de lire ses éclairages sur l’intégrisme chrétien des élites et des masses ou comment ils « ne sont pas des nouveaux venus au pouvoir, mais des revenants qui reflètent le tempérament naturel de l’empire américain. »
Cet article montre clairement que Hillary Clinton appartient à des courants de pensée extrêmement dangereux. Sa candidature fait peser une lourde menace non seulement sur l’avenir des USA mais aussi, par voie de conséquence, sur celui du monde entier.
Dans ces conditions, il est très curieux que cette info capitale soit si peu reprise par les médias, qu’il s’agisse des médias US ou des médias français (sauf Rezo.net).
Anecdote : j’ai posté sur différents sites en citant ma source et en plaçant un lien avec l’article, mais ces posts n’ont pas été mis en ligne. Sur le site du Figaro ou du Point, ça n’est pas vraiment étonnant. Mais sur celui de Libé ou du Nouvel Obs, c’est quand même curieux, non ?
STP, Bakchich, quand paraîtra le bouquin de Jeff Sharlet, n’oublie pas de réactiver l’info… On n’a pas vraiment besoin d’une sympathisante du Ku Klux Klan et des fascistes à la tête des USA !!!
C’est troublant, tout de même, toute cette histoire autour d’une candidate à la présidence des Etats-Unis. Pour une fois qu’une femme était susceptible d’accéder au pouvoir ?
Justement, en parlant de complot, si tout ce foin n’était pas fait pour éviter qu’une femme accède à la présidence ? Car c’est bien connu, depuis au moins la Bible, c’est de la femme que vient tout le mal, témoin cette légende juive qui invente à Adam une première épouse, Lilith, encore plus mauvaise que l’officielle Eve.
Certes, les Clinton ne se baignent pas dans ma tasse de thé. Mais quand même.
tellement bien infiltré que j’ai réussi la performance de naître dans une famille de haut-responsables civils et militaires…
Grâce à eux, j’ai compris que ma TV plasma samsung ne sert qu’à une seule chose : Jouer à ma xbox 360…
Côtoyer des officiels et les voir manger à côter de soit, c’est curieux comme sensation. De plus, ils ont disent des choses (souvent le contraire de ce qu’ils pondent en public…)
En plus, ils en ont des anecdotes sur les "journalistes"
"Le monde est gouverné par des personnages très différents de ce qui est imaginé par ceux qui ne sont pas derrière le rideau." Benjamin Disraeli