C’est l’heure du bilan pour le ministre de l’Intérieur et des contraventions, Nicolas Sarkozy. Pas sûr que les exploits du GIR, l’une de ses créations, dans l’Allier, lui valent une bonne presse
Chef-lieu de canton rattaché à Moulins, Saint-Pourçain-sur-Sioule est un « village fleuri » de l’Allier. 5000 habitants certes, un vignoble goûté depuis le Moyen Âge, sans doute, mais des distractions somme toute assez rares. La première gare est à 19km et Clermont, capitale régionale, à 70. L’occasion de vérifier que l’ennui est bien mère de tous les vices…
C’est ainsi que le 11 mars 2004 les gendarmes agissant dans le cadre des fameux GIR (Groupes d’intervention régionaux) investissent Saint-Pourçain.
Créés en 2002 par Nicolas Sarkozy, les GIR rassemblent au sein d’une même structure, policiers, gendarmes, agents du fisc et douaniers. Mission ? « Lutter contre l’économie souterraine » et « éradiquer les zones de non-droit » précisait le ministre de l’Intérieur. Un GIR ne se déplace pas à la légère. Il faut l’accord conjoint du Préfet et du Procureur. Ça ne rigole pas.
Ce matin-là donc, les gendarmes « suite à plusieurs renseignements » foncent sur l’objectif : deux bars de la commune, le Dess et l’Escale. Ce dernier présente l’avantage d’être situé juste en face de la gendarmerie de Saint-Pourçain. Effet de surprise assuré !
L’un et l’autre exploitent un de ces « bandits manchots » qui permettent - parfois - aux joueurs initiés de se faire un peu d’argent de poche mais plus régulièrement d’améliorer l’ordinaire du patron et surtout celui du « placier ». Ce dernier étant le plus souvent lié effectivement à des réseaux mafieux. Sur le plan du délit rien à redire. L’exploitation de ces machines à sous déguisé en simples jeux de hasard est interdite. Aucun gérant de bistrot ne l’ignore comme d’ailleurs nul à Saint–Pourçain n’ignorait l’existence de ces « bandits manchots » en place depuis déjà des années.
Gardes à vue, perquisitions, auditions, aveux, la suite des événements relève de la routine policière dans le cadre d’une enquête qui n’est pas celle du siècle mais qui ne peut logiquement se conclure que par la condamnation des prévenus. Le tout assorti d’un douloureux redressement fiscal pour les gains empochés derrière le comptoir. Le 6 octobre dernier, le Tribunal correctionnel de Cusset en a pourtant décidé autrement en annulant purement et simplement toute la procédure et en relaxant les 4 prévenus. Et demain ce sont peut-être les hommes du GIR qui pourraient êtres appelés à comparaître, pour « faux et usage, détention, recel et atteinte aux libertés ».
En cause l’étonnante décontraction des gendarmes, en matière de procédure pénale. Ainsi ce PV de perquisition (N° 49/2003 pièce N° 5, feuillet n°1) rédigé le 11 mars 2004 à 19h05 et qui indique : « à 18h15, nous présentons pour effectuer une perquisition (…) à l’Escale (…) qui nous paraît détenir des faits ou objets relatifs aux faits incriminés ».
Rédigé à 19h05 ce PV se termine ainsi : « après lecture faite par, C. David signe avec nous le présent Procès-verbal le 11 mars 2004 à 18h15 ». Comprendre donc que le suspect a signé à 18 h 15 un PV dont la rédaction a débuté à 19H05 et relatif à une perquisition entamée elle aussi à 18h15.
Simple erreur ? Le lendemain 12 mars, ça ne s’arrange pas. La pièce N° 9 du P.V. N° 49/ 2003 dresse un point détaillé, dès 11 heures tapantes, du fruit d’une autre perquisition, laquelle se déroule -certes au mois de mars 2004 - mais entre 11 heures et 11h45.
La pièce n° 6 concerne l’audition de D. entamée « à 18h20 » dans les locaux de la gendarmerie. Encore un exploit puisque à cette heure D. assistait à la perquisition menée dans son bar.
Dans le cadre d’une enquête préliminaire- mais la plupart des citoyens l’ignorent – les perquisitions ne peuvent être effectuées « sans l’assentiment exprès de la personne chez laquelle se déroule l’opération » . Faute de quoi, la perquisition est frappée de nullité. Cette autorisation manuscrite est donc un document essentiel. Tellement indispensable que le TGI de Cusset a estimé indispensable de délivrer une commission rogatoire (à la gendarmerie…) pour essayer de mettre la main dessus.
D’intenses recherches ont permis de retrouver un bout de papier égaré « malencontreusement » selon le collègue, dans « les archives » de la Gendarmerie de Saint-Pourçain.
Insuffisant. Car comme s’en attriste le tribunal « cet exemplaire » (sic) ne mentionnant – « aucune indication d’identité ni de référence de procédure » cela « entache » définitivement la validité de la pièce. Le volet pénal avorté, reste la procédure fiscale. Car le GIR n’a pas pour seule mission d’éradiquer la criminalité souterraine. L’action concertée avec des services comme le fisc ou les douanes répond à la nécessité de faire rentrer de l’argent dans les caisses de l’État. C’est dans ce cadre que le conseil de Denis D découvre que tel procès-verbal enregistré sous le numéro 7 dans la procédure pénale se retrouve coté sous le numéro 6 par les gendarmes dans les documents adressés aux services fiscaux de l’Allier. Ce qui va ruiner cette fois tout espoir de recouvrement. Aussi cupide soit-il, le fisc n’est pas fondé à soutirer d’argent sur la base de PV fantômes, inconnus de l’autorité judiciaire, et dont l’existence ne semble ressortir que d’hasardeux bricolages informatiques.
Une « procédure parallèle » pour ne pas dire « souterraine » en langage juridique. Un comble pour ceux chargés d’éradiquer l’économie du même nom.
A l’évidence, il ne s’agit pas de "simples" vices de procédure : après recherches sur le net je suis tombé sur cet excellentissime site !
en effet, j’étais un consommateur parmis une vingtaine d’autres, dans un des bars indiqués ; j’ai vu débarquer des gendarmes qui sans rien demander et sans répondre au garçon qui criait s’ils avaient l’autorisation d’un juge, ont tout fouillé, en l’absence du patron qui était parti faire des courses (le coup était donc calculé). Les pandores ont même relevé l’identité de tous les consommateurs et nous ont empêché de sortir.
Je suis donc un des 20 témoins, qui ont vu qu’aucune autorisation de perquisition n’a été ni produite ni demandée.
Plus tard, nous avons vu arriver le patron avec ses provisions, qui a été cueilli par un gendarme ; il n’était donc pas à la gendarmerie pour y signer on ne sait trop quoi.. C’est bien la preuve d’un super trucage, car avec plusieurs consommateurs, nous avons été à l’audience à Cusset, ou le juge à quasiment hurlé contre les gendarmes, il a expliqué que les autorisations de perquisitions n’existaient pas et une qui a été découverte dans la gendarmerie par perquisition ordonnée par le président du tribunal lui même…était bidon !!!!!!!!!!!!!!!!!!! il a expliqué que les numéros de cotes des PV étaient différents donc nécessairement ceux transmis par les gendarmes au fisc étaient des faux ! la procureuse s’étranglait ! c’était à ce qu’il parait, un coup tordu monté entre des gendarmes et le fisc, encore une affaire de pognon à se partager.
ça a foutu un pétard du tonnerre, sous les applaudissements du public.