Joli coup pour France 3. Pile au moment où Georges W. Bush passe en France pour sa tournée d’adieu (13-14 juin), le parent pauvre du service public sort une interview exclusive du président américain, aujourd’hui 12 juin. Encore un beau tour de Christian Malard, patron du service étranger et interlocuteur privilégié des présidents de tous les pays. Petite ode.
Au cours de la « belle exclusivité », accordée à France 3, Georges Bush s’est décerné un mauvais point : « il est probable que parfois je ne me sois pas bien fait comprendre ». Un message adressé à la « vieille Europe » et plus particulièrement à ces maudits Français dont Condoleezza Rice, sa conseillère pour les affaires de sécurité nationale, estimait en 2003, au lendemain de la guerre en Irak, qu’il convenait de « Pardonner à la Russie, ignorer l’Allemagne, punir la France » !
Une menace qui n’a sans doute jamais inquiété à titre personnel notre confrère de France 3, Christian Malard, interlocuteur privilégié des présidents américains depuis Jimmy Carter soit un bon quart de siècle, et ce, quelle que soit la météo des relations transatlantiques.
C’est peut dire que « W » lors de cette interview réalisée à la Maison Blanche par le patron service étranger de France 3, et diffusé aujourd’hui 12 juin dans tous les journaux de la chaîne, n’a eu guère à souffrir du journalisme à la française. La première question de l’entretien donne le ton : « Comment George Bush juge t-il George Bush ? » Une belle entrée en matière.
On évite toutefois pas les dossiers chauds de la planète avec cette question sur l’Iran et son président Mahmoud Ahmadinejad. Ce dernier du point de vue de Malard ne montre à l’évidence aucun « signe de souplesse ». Une opinion pas démentie par Georges, de même qu’il confirme bien volontiers qu’il soutiendra le républicain McCain à l’élection présidentielle. Bref il ne sera pas dit que le contribuable – français – n’en aura pas eu pour son argent avec cette exclusivité mondiale arrachée par le service public. Ni qu’à la différence du Satan iranien, il manque de « souplesse ».
Fils d’un animateur d’Europe 1, Christian Malard se distingue dans les années 1970 par une interview exclusive de l’ayatollah Khomeiny. Il préfère depuis belle lurette la fréquentation des néo-conservateurs américains et vice-versa. En 1996 lors d’une conférence de presse jointe des présidents Français et américain, Malard se fait quelque peu moucher par Chirac qu’il vient d’interroger en… anglais : « Tout le monde sait que vous parlez anglais » glisse le Chi un brin perfide en demandant à son compatriote de reposer sa question en français. Une exigence présidentielle qui est alors aussitôt traduite en anglais par un interprète à l’attention d’un Christian Malard quelque peu déconfit.
Si le journalisme mène à tout, ce dernier, le moment venu, a peu de chance de se retrouver ambassadeur de la francophonie. Pour l’heure, Christian Malard est plus à l’aise au sein du « Press club » dont il assura la Présidence de 1996 à 1997. « Le Press Club : c’est l’ONU ! Une oasis de bienveillance dans un monde de méfiance et d’hostilité réciproque » explique le journaliste Emmanuel de La Taille.
Autre machin créé à l’initiative de la chambre de commerce franco-américaine où Malard a son rond de serviette, le « French American Press Club » et dont il est l’un des co-présidents.
Comme l’a déjà signalé Bakchich, ce fin connaisseur de la cuisine politique américaine vient de co-signer un livre Sucré d’État, ouvrage relatant les souvenirs de Roland Mesnier, le pâtissier –français – de la Maison Blanche où il officia pendant 25 ans. C’est d’ailleurs le seul ouvrage recensé de Christian Malard. Ce qui est un peu étonnant au regard de son éblouissant carnet d’adresses. De Colin Powell à Arafat en passant par Gorbatchev, Malard a interviewé tous les grands de ce monde.
Un capital dont profite régulièrement le Journal du Parlement une publication qui agrémente ainsi ces « grands entretiens politiques » de nombreuses pages de pub en rapport étroit avec l’interviewé. Pas moins de trois pages en couleurs lors de l’interview du président tunisien Ben Ali. En cliquant sur Amazon.com à la recherche des œuvres de Christian Malard, on ne trouve donc que Sucré État édité par Flammarion.
Maigre pioche, tout de même rehaussé par cet intrigant lien « sponsorisé » qui figurait il y a encore quelques jours sous la présentation de l’ouvrage à l’attention de l’internaute. Lequel proposait d’ « Engagez Christian Malar ».
Une proposition qui émane de l’agence de communication Glamspeak. « Agence conseil en célébrités pour campagnes de publicité et marketing » et dont le catalogue en ligne propose le service de quelques « 5000 exceptionnelles personnalités ». Parmi elles , Claude Allègre, Jacques Attali, David Douillet, Charles Aznavour etc…
Et donc un parfait inconnu avec ce « Malard » dépourvu de « D » qu’on ne saurait confondre avec notre prestigieux éditorialiste de France 3.