Rechercher dans Bakchich :
Bakchich.info
UNE BRÈVE HISTOIRE DE BAKCHICH

Tags

Dans la même rubrique
Avec les mêmes mots-clés
RÉCLAME
Du(des) même(s) auteur(s)
MODES DE VIE

Colonisation : positive attitude

jeudi 5 octobre 2006 par Lounis Aggoun
Twitter Twitter
Facebook Facebook
Marquer et partager
Version imprimable de cet article Imprimer
Commenter cet article Commenter
recommander Recommander à un ennemi

Quelques mois après le retrait de l’article de loi sur les "bienfaits" de la colonisation, Bakchich livre enfin la vérité : oui, le glorieux temps des colonies a laissé de merveilleuses traces. Mais faut-il dire "grâce à elle" ou "en dépit de celle-ci" ?

La une de l’Express monte une Marianne aux yeux voilés de honte. À l’intérieur, si l’hebdo prétend pourfendre les « débats artificiels » sur la colonisation, c’est pour aussitôt tomber dans le travers qu’il dénonce.

Sur les 7 pages de ce dossier, 3 sont consacrées au film Indigènes et une à son antithèse, un livre de Daniel Lefeuvre. L’Express déplore l’absence de « récit commun » et le fait que la « provocation » soit « prise au sérieux au détriment de la vérité historique »… Qui empêche l’Express de donner à l’histoire et aux historiens la place qu’ils méritent ? On n’en saura rien.

Les arguments des adeptes de la glorification de l’histoire coloniale de France sont entendus. La colonisation aurait développé l’agriculture. Argument qui ne résiste pas à la moindre lecture d’un livre d’histoire. Autre bienfait présumé, la scolarisation a formé les élites algériennes. Tocqueville : «  en 1837, il existait dans la ville de Constantine des écoles d’instruction secondaire et supérieure, où 600 à 700 élèves [… apprenaient] l’arithmétique, l’astronomie, la rhétorique et la philosophie. Il existait en outre […] 90 écoles primaires […]. [Dix ans après], le nombre des jeunes gens qui y suivent les hautes études est réduit à 60 et le nombre des écoles primaires à 30. » Selon Alain Mahé [1], l’enseignement français s’est fait en Kabylie vers 1880 après « l’achèvement de la destruction du système d’enseignement traditionnel ». Vive opposition aux «  projets de scolariser des indigènes auprès des Européens d’Algérie. […] C’est une équipe restreinte de républicains laïcisistes militants de l’entourage de Jules ferry […] qui prirent en charge la scolarisation des la Kabylie, aussi bien financièrement qu’au niveau de la mise en œuvre pratique du projet. C’est dire que […] la scolarisation a été impulsée de la France et contre le gré des autorités algériennes ».

Des actes positifs malgré la colonisation

Mais le bienfait que l’on évoque le plus est celui des «  routes » et des « bâtiments » laissés par la France en 1962. Mais, qui au juste a reconstruit et dans quelles conditions, avec quels deniers et avec quelle main d’œuvre ? Exemples. « Les populations de Kabylie ont dû payer deux millions de francs de contribution de guerre suite à l’insurrection de 1855-1857 […] L’argent servit à la construction de routes […] pour relier Sétif à Bougie, une autre de Dellys à Aumale […] et, enfin, une dernière reliant Bougie à Alger en passant par Tizi-Ouzou. » La main-d’œuvre est bien gratuite, des prisonniers réduits à l’esclavage.

« Janvier 1850, raconte François Maspéro [2] , l’Assemblée vote une loi décidant le transfert en Algérie et leur concentration dans un établissement pénitentiaire de quelque 500 “transportés” », ces hommes arrêtés durant l’insurrection de juin 1948 à Paris. Pour enfermer cette « crème de la noue de la canaille de France », Saint-Arnaud décide d’installer un pénitencier à deux kilomètres de Lambessa, une vieille cité numide où la 3éme Légion Augusta avait son camp. «  On comprend mal, ajoute François Maspéro, ce qui condamnait soudain à périr des vestiges qui avaient traversé deux millénaire – sinon l’action délibérée de l’armée française. [… Dans] ses Inscriptions romaines de l’Algérie, l’archéologue Léon Renier qualifiera le traitement infligé à Lambessa de “honte ineffaçable” : pour construire le camp français sur l’emplacement du camp romain, on sciera les marbres, on martèlera les inscriptions, on démolira l’amphithéâtre, le nymphaeum, les temples de Minerve et de Neptune. »

La réalité est que les actes positifs notables durant la période coloniale sont dans la majorité des cas l’œuvre d’anticolonialistes et faits malgré la colonisation et non grâce à elle. Pour mettre cette réalité en évidence, faire le tri et se forger un « récit commun », il faudrait commencer à mettre fin à la censure et à la désinformation. La réalité, c’est que la « vérité historique » est le dernier des soucis de l’Express, qui contribue comme bien de ses pairs à anesthésier l’opinion pour permettre à des négociant d’armes, de béton et de pétrole de sévir en Algérie et à leurs supplétifs locaux de préserver leur pouvoir au prix du malheur de 32 millions d’Algériens aujourd’hui. Il est significatif à cet égard que parmi les financiers du film Indigènes on trouve en vrac et dans leur ordre de citation dans l’article de l’Express d’étonnants « déclinologues » : Fourtou, Bébéar, Méheut, Méhaignerie, Douste-Blazy, Sarkozy, Séguin, Claude Chirac.

[1] Alain Mahé, Histoire de la Grande Kabylie, éditions Bouchène, 2001, Paris

[2] Alain Mahé, Histoire de la Grande Kabylie, éditions Bouchène, 2001, Paris


AFFICHER LES
8 MESSAGES

Forum

  • Colonisation : positive attitude
    le mercredi 20 décembre 2006 à 16:15, une personne lambda a dit :

    Je suis complétement d’accord avec le commentaire de "FABOR". Je ne comprends pas toute cette polémique autour de la colonisation bienfaits ou méfaits. Il est certain que la présence française a apporté de bonnes choses mais qu’elle a aussi causé des dégats.

    Mon point de vue personnel en ce qui concerne l’indignation de certaines personnes qui sont pour une grande partie d’origine algérienne (c’est un constat en aucun cas un reproche) résulte plus de la fin tragique de cette présence. En fait, le départ de la France de l’Algérie s’est passé dans la douleur. Une douleur que les algériens n’ont pas encore digéré. Je veux dire que le Maroc aussi bien que la Tunisie entretiennent avce la France une relation plus apaisée. Non pas que ces derniers n’ont pas milité pour leur indépendance (bien au contraire) mais plutot parce que l’histoire et la durée de la présence dans ces deux pays ne sont pas les mêmes qu’en Algérie.

    Bref, il serait plus judicieux de se concentrer sur l’avenir et au lieu de demander des excuses de part et d’autre, car si on le fait il faut remonter aux phiniciens il faut donc demander à leurs descendants les libanais de nous présenter leurs excuses ca serait quand même aberrant !!! mais plutot de jeter des ponts entre les deux rives de la méditerrannée.

  • Un peu de subtilité s’il vous plaît
    le mardi 19 décembre 2006 à 16:20, François Barrault a dit :

    Il est toujours possible de tourner les choses négativement. Il est toujours possible d’isoler et de spécifier abusivement, de faire de l’angélisme à bon compte, de jouer les vierges effarouchées pour mieux dénaturer une réalité vécue à hauteur d’homme, de forcer le trait, d’occulter ou d’édulcorer ce qui n’abonde pas dans le sens que l’on voudrait…

    La colonisation française a eu, de toute évidence, ses pages sombres, très sombres, ignobles et scandaleuses ; elle a aussi eu ses réalisations glorieuses, ses chapitres merveilleux, ses passages magnifiques.

    Si l’on compare la réalité de la colonisation française dans sa dernière phase (1945-1962) par rapport à l’état précolonial, alors la colonisation française apparaîtra plus souvent qu’on ne le dit aujourd’hui, comme très humaine et très belle au regard de l’ère précoloniale. Oui, très humaine et très belle au regard de l’ère précoloniale. Allez lire ou relire, Monsieur Aggoun, Le Devoir de Violence de Yambo Ouologuem par exemple, bien entendu moins prisé que l’Aventure ambiguë d’un Cheikh Amidou Kane…

    Et, s’il vous plaît, ne me faites pas dire ce que je ne dis pas. Cela ne signifie pas qu’il faille, durant cette même période 1945-1962, oublier Sétif, Madagascar ou le Cameroun : ce sont là des crimes infâmes. Cela ne veut pas dire, non plus, qu’il faille oublier Melouza, le massacre des Harkis et des Français musulmans, l’exode tragique des Pieds-Noirs : ce sont là des crimes infâmes.

    Le manichéisme et le simplisme de votre article, M. Aggoun, me sidère. Surtout de la part de quelqu’un qui prétend adopter des accents apaisés… Lyautey, Faidherbe, Brazza, Diagne, Delavignette, Lamine Guèye, Houphouët-Boigny… : ignorez-vous donc ces noms ?

    C’est de tout autre chose que notre pays a besoin aujourd’hui : un regard départi de tout angélisme et de toute hypocrisie, guidé simplement par l’humanisme et l’amour de l’homme et de la vérité historique, dans sa subtilité et sa complexité.

    Je vous conseille de lire Histoire occultée de la décolonisation franco-africaine de Alexandre Gerbi aux éditions l’Harmattan

    • Un peu de subtilité s’il vous plaît
      le mardi 19 décembre 2006 à 17:03, La rédac’ a dit :
      Cher lecteur, vous devriez lire la tribune que l’ami Gerbi a écrit sur ce site, au sujet de son propre livre.
  • QUE DES MOTS ET DES MAUX
    le jeudi 16 novembre 2006 à 18:21, mariakita garcia a dit :

    Si nous allons du fait que la colonisation est négative, du fait que c’est un viol du respect de la culture et de la vie humaine. Que c’est une atroce preuve d’intolérance et de complexes.Ce terme ne peut donc pas être positif.

    Ces gens dont le destin a été détourné, dont la vie est perturbée et balottée ne savent plus parfois à quel saint se vouer. Mais ils savent au moins que les " droits de l’homme" sont un mythe.Sinon, ilS devraient juste exister :

    LE DROIT A TOUS LES ETRES HUMAINS D’ETRE, DE VIVRE, DE SE DEPLACER ET DE S4EPANOUIR SUR CETTE TERRE.

    Voyagez, allez voir comment les occidentaux sont reçus à l’Etranger.En Afrique par exemple. On ne les jugent pas à leur couleur, à leur origine, sinon beaucoup ne seraient même pas fréquentables ( sans éducation parfois, sans respect, sans valeurs).Ceux qui n’ont rien ou peu sont souvent les plus généreux et les plus ouverts.Les pays riches ne pratiquent-ils pas le protectionnisme quand ils demandent aux pauvres d’opter pour un libéralisme effréné ?!

    Les cultures occidentales ont inventées des notions telles : l’hospitalité, l’amour, la compassion, le partage. Mais ils ne le cultivent pas.Ils ont axés leur vie sur le matérialisme qui rend aussitôt individualiste. Alors les notions de partage, d’humilité et de tolérance du coup n’ont plus leur place.

    Mais les générations actuelles ne se laisseront pas piéger par les aigreurs des anciens. La DISCRIMINATION RESTE UN TERME NEGATIF ; QUELQUE SOIT l’ADJECTIF QU’ON LUI DONNERA, LE MAL EST FAIT, LE MAL EST LA.Ils font creuver l’abcès et reconcilier.

    DISCRIMINATION (-) POSITIF (+). Mathmatiquement Moins et Plus feront toujours MOINS

    Les peuples ne se comprennent pas, car ils ne se connaissent pas.En attendant des relations nord-sud plus humaines…RESPECTONS NOUS LES UNS LES AUTRES

    MARIAKITA GARCIA

  • Colonisation : positive attitude
    le mercredi 25 octobre 2006 à 15:54
    Les prétendus effets positifs de la colonisation sont à analysés à travers des chiffres qui donnent une certaine objectivité à une démarche sereine. Je suis curieux de connaître :
    - la part des muisulmans dans la répartiton des terres agricoles,
    - le nombre de médecins musulmans en 1962,
    - l’importance du réseau routier et sa localisation,
    - Les productions agricoles et leurs destination,
    - le nombre d’ingénieurs agronomes,
    - le pourcentage des enfanrts scolarisés,
    - le nombre de gradés musulmans dans l’armée de la République,
    - le contenu de l’infâme code de l’indigénat,
    - le nombre de mosquées transformées en églises,
    - le nombre de victimes des famines dans les deux communautés,
    - le nombre de "pieds-noires" qui fréquentaient les musulmans. Sil’on a le courage et l’honnêté de répondre objectivement à toutes ces questions, la colonisation française en Algérien apparaîtra comme une abomination
  • Colonisation : positive attitude
    le mercredi 11 octobre 2006 à 21:39, BENCHRIF a dit :
    je ne comprends pas comment la FRANCE est restée 130 ans en ALGERIE … ??? Et pourquoi le peuple Algérien a mis tout ce temps à se libérer ??? Il y avait surement des complicitées …
    • QUI EST PLUS CIVILISE QUE QUI ?
      le jeudi 23 novembre 2006 à 21:46, mariakita garcia a dit :

      Comment le "peuple des lumières" peut-il vivre dans les ténèbres ?

      Ils osent parler de choses qu’ils ne maîtrisent pas. La colonisation…C’est une plaie encore ouverte. Quelle ingratitude ! C’est mieux de fermer les yeux et vouloir que le peuple noir dise " amen" à tout.

      Cela leur écorcherait les lèvres d’avouer qu’ils ont mal agi ? Pourquoi Ce peuple qui parle de "civilisation évoluée" agit comme s’il sortait de l’âge de pierre ?

      Un peuple qui aime à petite dose, donne en comptant, économise même le sourire, laisse mourir son voisin dans l’indifférence, met en quarantaine les personnes agées. le bonjour est même un luxe en France. Ces personnes n’aiment que leur petit job, leur barquette à enfourner dans le micro-ondes.Celui qui n’aime ni ses parents ni ses amis de peut connaître l’amour universel encore moins reconnaître qu’il a participer à la destruction du monde.En France les gens ont des regards inquisiteurs.Comme s’ils étaient eux parfaits…

      Comment ne pas sourire face à un peuple qui chérit le virtuel et se fait mener à la baguette par des chiens et des enfants qui n’ont même pas les fondamentaux ?Certaines civilisations devraient partir en stage d’humanisation pour decouvrir les valeurs esentielles de la vie.

      MARIAKITA GARCIA

    • Colonisation : positive attitude
      le mercredi 6 décembre 2006 à 17:11, Fabor a dit :
      Il faut tout de même préciser que : 1/ En remontant dans les temps historiques qui nous sont connus, mettons depuis - 500 ans avant JC, l’Afrique du Nord a été "colonisée" ou "protégée"successivement, peu ou prou, par les Carthaginois, les Romains, les Wisigoths (qui y ont répendu le christianisme), les Arabes (qui ont éradiqué le christianismes par la force), les Ottomans, et enfin les Français. 2/ Se poser cette question, c’est bien, mais il faut en poser deux autres : a/ Pourquoi les Kabyles et les Berbères tolèrent-ils encore l’oppression des Arabes qui sont minoritaires ? b/ Pourquoi, si la relativement courte présence a été si terrible, les enfants de ceux qui en Algérie, ont voté pour l’indépendance en 1961 sont-ils si nombreux à être candidats à venir en France ?
BAKCHICH PRATIQUE
LE CLUB DES AMIS
BEST OF
CARRÉ VIP
SUIVEZ BAKCHICH !
SITES CHOUCHOUS
Rezo.net
Le Ravi
CQFD
Rue89
Le Tigre
Amnistia
Le blog de Guy Birenbaum
Les cahiers du football
Acrimed
Kaboul.fr
Le Mégalodon
Globalix, le site de William Emmanuel
Street Reporters
Bakchich sur Netvibes
Toutes les archives de « Là-bas si j’y suis »
Le locuteur
Ma commune
Journal d’un avocat
Gestion Suisse
IRIS
Internetalis Universalus
ventscontraires.net
Causette
Le Sans-Culotte