Le ministère de l’Education nationale cherche des surveillants généraux. Salaire motivant, horaires aménageables : de quoi rendre fous de jalousie les syndicalistes enseignants.
Ça devient décidément une espèce de manie, au gouvernement : voilà que les ministères UMP de l’Éducation nationale et de l’Enseignement supérieur (et de la Recherche) veulent à leur tour se doter d’une « veille de l’opinion » – comme si les inquiétait l’idée que des mauvais sujets, incomplètement soumis, pourraient, qui sait, ne pas aimer ce qu’ourdissent Xavier Darcos et Valérie Pécresse.
Un appel d’offres, par conséquent, a été « passé en application des articles 57 à 59 du code des marchés publics », et on cherche, pour ces ministères, les volontaires qui, pour un émolument annuel de 100 à 120.000 euros [1], surveilleront ce qui s’écrit sur le Net – « sur les sources stratégiques en ligne », comme on dit en néo-jargon : « Sites "commentateurs" de l’actualité, revendicatifs, informatifs, participatifs, politiques, etc. ».
Cette surveillance, précise le cahier des clauses particulières, portera, c’est un minimum, « sur les médias en ligne, les sites de syndicats, de partis politiques, les portails thématiques ou régionaux, les sites militants d’associations, de mouvements revendicatifs ou alternatifs, de leaders d’opinion », mais devra « également » porter « sur les moteurs généralistes, les forums grand public et spécialisés, les blogs, les pages personnelles, les réseaux sociaux, ainsi que sur les appels et pétitions en ligne, et sur les autres formats de diffusion (vidéos, etc.) » : rien ne doit, en somme, échapper à cette inquisition.
Pour autant, il va de soi que : « Les sources d’information formelles que sont la presse écrite, les dépêches d’agences de presse, la presse professionnelle spécialisée, les débats des assemblées, les rapports publics, les baromètres, études et sondages seront également surveillés et traitées ».
(Car, en effet, la subversion peut encore emprunter la voie, déjà ancienne, de la presse imprimée.)
L’objectif proclamé de ce « dispositif de veille », qu’en termes pudiques ces choses-là sont dites, vise notamment à « repérer les leaders d’opinion, les lanceurs d’alerte et analyser leur potentiel d’influence et leur capacité à se constituer en réseau », et à « anticiper et évaluer les risques de contagion et de crise », pour enfin « alerter et préconiser en conséquence » [2].
Alerter qui ?
Préconiser quoi ?
Le cahier des clauses particulières ne le précise pas.
Mais nous avons tou(te)s retenu de nos années lycée que dès qu’il y a des surveillants ?
Il y a des punitions.
[1] 100.000 euros (HT) pour le ministère de l’Éducation nationale, 120.000 (HT) pour celui de l’Enseignement supérieur.
[2] Autrement dit : repérer les meneurs, et mesurer leur capacité de nuisance.
Il semblerait en effet, qu’au premier rang de ces "leaders d’opinion", figurent certains journalistes dont les conclusions n’ont pas l’heur de convenir à Monseigneur Darcos. Dans la ligne de mire, notamment : le livre "Main basse sur l’école publique", dont le buzz sur la toile commence peut-être à chatouiller certaines susceptibilités… Voir ce lien :
http://www.guglielmi.fr/spip.php ?article169
Liberté d’expression, sur mes cahiers d’écolier, sur mon pupitre et les arbres, sur le sable sur la neige, et sur les pages d’internet…j’écris ton nom !
Le "risque opinion" est immense, vous ne vous rendez pas compte ?
En résumé, il s’agit de pister les embryons de débats qui constituent un "risque opinion", avec pour objectif de limiter les répercutions politiques négatives. Et au final, "aider le ministère à calculer le retour sur investissement pour cette opération". Bien entendu, il ne s’agit en rien d’une opération politique. Promis, juré, crashé ! Simplement un nouvel outil pour améliorer l’Education, optimiser les réformes, et ainsi compenser les salaires exorbitants alloués à ces Bac+5 qui passent leur temps à surveiller les siestes des enfants ou leur changer les couches.
Extrait de l’article d’un "leader d’opinion", ou pas, Darcos nous dira : http://www.lesmotsontunsens.com/darcos-appel-d-offre-surveillance-internet-gouvernement-blogs-syndicats-partis-politiques-2502
…
Darcos ? C’est bien ce prof qui avait filé les sujets du bac (avant les épreuves officielles) à ses élèves après avoir été membre de la commission qui les avait pondus ?
Ça lui fait donc une casserole de plus. Si ça continue, il pourra bientôt ouvrir une quincaillerie …