La commission Attali n’a rien produit d’original. Mais en faisant court, l’auteur principal espère se placer pour Bercy…
La commission Attali a remis ses premières conclusions. Conclusions d’étape qui se concentrent sur un appel à promouvoir la concurrence et l’affirmation de la nécessité d’accélérer la construction de nouveaux logements. Rassemblement mondain d’économistes, d’hommes politiques, et même de philosophes, la commission est avant tout le reflet de l’état du carnet d’adresse de son président. Si bien que nul ne sait au juste ni ce qu’il faut en attendre, ni ce qu’en attend objectivement Nicolas Sarkozy.
Pour ceux qui suivent ses travaux, ce qui frappe, c’est que, comme à l’heure actuelle dans toutes les administrations, l’Élysée suit ce qui s’y passe avec attention et contrôle très directement ce que publie la commission. Les conseillers de Sarkozy – dont certains croient encore à la mise en œuvre prochaine d’une politique franchement libérale – ont fait parvenir un cadre à Attali lui demandant de bien insister sur tous les avantages qu’il y aurait à généraliser la concurrence. Le chauffeur de taxi parisien est devenu ainsi le symbole du blocage économique, de la France abritée et de la rente mal assumée. Qu’il se rassure néanmoins : il y a cinquante ans déjà, le rapport Rueff Armand réclamait la généralisation de la concurrence, en particulier dans l’attribution des licences de taxi. Et rien ne s’est passé… La victime la plus directe de l’opération pourrait être Raffarin, qui s’est vexé de la mise en cause de sa loi sur l’implantation des supermarchés et qui l’a fait savoir en haut lieu.
Or la réponse élyséenne a traduit un réel agacement à son égard qui a achevé de le persuader qu’il n’était décidément plus en odeur de sainteté. En pratique, la commission ne trouve vraiment rien d’original à dire. Après avoir élucubré sur le logement et sur la concurrence, elle s’apprête à proposer des mesures que l’on trouve déjà dans le rapport Camdessus. Ce rapport avait été commandé en mai 2004 par le ministre des Finances de l’époque. C’était un certain Nicolas Sarkozy, dont on en vient à se demander pourquoi il a encore besoin de conseils. Attali ne se fait guère d’illusions. Il a d’ailleurs annoncé à la commission que ce qui fera l’originalité de son travail, c’est que les conclusions tiendront en deux/trois pages, afin que les décideurs les lisent. En effet, les hommes politiques sont trop occupés pour se pencher sur les rapports multiples et variés que produisent experts, hauts fonctionnaires et autres conseilleurs.
Aussi, Attali espère-t-il qu’en faisant court, il fera efficace. Malgré l’agacement qui monte dans la commission sur les interventions élyséennes, malgré les annonces de multiples consultations par Nicolas Sarkozy d’économistes comme Olivier Blanchard, Jean Paul Fitoussi ou Michel Didier sur des sujets clairement analogues à ceux traités par Attali, celui-ci affiche un grand détachement et joue à merveille les courtisans. Très déçu que personne n’ait songé à lui proposer le poste de directeur du FMI, il rêve à voix de plus en plus haute de Bercy et de devenir le ministre des Finances de la rigueur de 2008, après s’être vanté pendant des années d’avoir été celui qui a inspiré à Mitterrand la rigueur de 83. Le timing lui paraît parfait : il conclut en décembre, commente en janvier et accède à Bercy en mars après les municipales. La croissance aura-t-elle la patience d’attendre si longtemps ?
L’économie n’est pas le point le plus fort d’Attali. Ce qu’il connaît bien c’est l’euthanasie.
Du reste quel âge a-t-il ? Je crois qu’il a dépassé celui où il y a quelque 20 ans il prétendait que nous devions tous faire en sorte de passer dans un autre monde.