En 1944, Tom Cruise fomente un complot pour assassiner Hitler. Mission vraiment impossible à Berlin.
Depuis ses débuts, le cinéaste Bryan Singer, 43 ans, semble fasciné par le nazisme et l’origine du mal. Le diable ou son clone rodait dans l’épatant polar Usual Suspects, Singer parlait de la contamination du mal dans Un élève doué, d’après Stephen King, et débutait le premier X-Men par le plan saisissant d’un camp de concentration. Il semblait donc être l’homme de la situation pour mettre en images les aventures du comte Claus von Stauffenberg (1907-1944), aristocrate allemand, monarchiste, catholique qui considérait que le nazisme était une « tâche » sur l’uniforme allemand et qu’Hitler était un « porc parvenu et petit-bourgeois ». Gravement blessé en Tunisie en 1943, le lieutenant-colonel Stauffenberg est affecté à l’état-major berlinois. Il se joint aux opposants du régime, prend la direction des opérations et décide d’assassiner le Führer. Le 20 juillet 44, Stauffenberg est invité au QG d’Hitler à Rastenburg, dans « la Tanière du loup ». Dans sa sacoche, une bombe à retardement. L’opération Walkyrie est en marche…
Douze ans après Usual Suspects, Bryan Singer retrouve son scénariste Christopher McQuarrie. Mais cette fois, il n’y a pas vraiment de suspense, pas de Keyser Söze, pas de retournement de situation, pas de final vertigineux, tout le monde ou presque sait qu’Hitler s’est suicidé dans son bunker un an après le complot, en mai 1945. Walkyrie devrait donc être un pur objet de mise en scène et Singer tente de marcher dans les pas d’Hitchcock et de Lang. Avec 95 millions de budget, le metteur en scène de X-Men et de Superman returns s’offre des centaines de figurants, de beaux costumes, des décors incroyables. Malheureusement, il n’a pas beaucoup d’idées et seulement une ou deux pauvres scènes d’action. Très vite, le spectateur lâche prise. Produit soporifique, bancal (initialement prévu pour juin, puis en octobre 2008, le film a nécessité le tournage de scènes supplémentaires, avant d’être rebidouillé au montage), Walkyrie est trop bavard, lourdingue, et si Singer multiplie les plans aériens au-dessus des drapeaux nazis, son film ne décolle jamais.
De plus, comme nous sommes au pays de Wagner, chaque événement dramatique est ponctué d’un coup de grosse caisse ou de cymbales. Le summum du pathétique étant atteint avec la séquence où le colonel Stauffenberg, écoutant « la Chevauchée de Walkyrie »(d’où le titre, coco), a la révélation du nom de code de son opération secrète, avec la caméra qui tombe en vrille sur le disque de Wagner. Pour rester dans le grotesque, on mentionnera les apparitions hilarantes d’Hitler, moins drôle que Jacques Villeret dans Papy fait de la résistance, mais pas vraiment crédible (Adolf, son air fumasse, sa mèche, ses gros sourcils). Néanmoins, Singer réussit au moins un plan stupéfiant, quand un haut dignitaire nazi intime à Cruise de faire le salut hitlérien. Filmé de dos, Cruise se fige, se tourne. La caméra passe alors derrière lui et Cruise s’exécute en poussant un tonitruant « Heil Hitler ! ». Puis, Singer le cadre de face : Cruise a le bras droit levé, dans la plus belle tradition du IIIe Reich, et c’est alors que l’on aperçoit son mignon moignon. Saisissant !
Sanglé dans un bel uniforme, Tom Cruise incarne Stauffenberg. Acteur limité, pas vraiment passionnant, Cruise alterne les blockbusters crypto-gay où il exhibe ses petits bras musclés et les films où il se fait humilier, tabasser, mutiler, un peu comme Marlon Brando ou Clint Eastwood. On l’a vu impuissant et lâche dans le Kubrick, défiguré dans Vanilla Sky, énucléé dans Minority Report, paraplégique dans Né un quatre juillet… Le voici borgne, manchot, amputé de deux doigts de la main gauche et… nazi ! Qui dit mieux ? Bref, Cruise serre les maxillaires, affiche un air constipé pendant deux heures et s’offre une performance assez sobre, d’ailleurs, il n’a aucun plan en marcel ! On peut néanmoins se demander ce que nous dit Cruise avec ce film ? Que l’on peut être un nazi cool, un bon aryen, comme il est un scientologue sympathique au sourire ultra-brite ? Et Singer, juif, homosexuel, obnubilé par le nazisme, quel est son message ?
Citation : « Singer […] débutait le premier X-Men ».
Il ne risquait pas, puisque débuter est un verbe intransitif. Il ne peut donc pas avoir de complément d’objet direct ! Qu’est-ce que vous avez contre le verbe commencer ? Il est trop simple ?