Reportage parmi les réfugiés clandestins du Nord. La nuit, ils essaient de passer en Angleterre. Le matin ils dorment, sauf mardi 16 décembre, la police les a réveillés, regroupés et embarqués avant de détruire leurs campements.
Alors que vendredi 19 décembre, Michelle Alliot-Marie a inauguré dans l’agglomération de Dunkerque une des plus grandes casernes de gendarmerie en France, la Police aux Frontières (PAF), sur ordre du préfet, a détruit mardi un camps de réfugiés clandestins surplombant le port autonome de Dunkerque. De là à dire qu’ils ont fait place nette… C’est peut-être surestimé l’importance des réfugiés pour les autorités locales ou peut-être, plus sérieusement, celle de MAM. Reste tout de même que 60 à 70 réfugiés (Afghans, Irakiens, Kurdes) ont été arrêtés et cela malgré la promesse, faite aux associations de protection des réfugiés, du sous-préfet de Dunkerque, Jean-Régis Borius, de ne pas toucher aux camps pendant l’hiver.
Beaucoup de ces réfugiés avaient construit des cabanes qui isolent tant bien que mal du froid et de la pluie. Mais la police en les détruisant les condamnent d’une certaine manière à une plus grande précarité. Comme ces réfugiés veulent à tout prix rejoindre la Grande-Bretagne, ils n’acceptent généralement pas les possibilités d’asile en France. Et vu que la police a obligation de les relâcher avant cinq jours, les réfugiés vont alors revenir, nus comme des vers.
Les associations reprochent à l’État de faire la sourde oreille, à Calais comme à Dunkerque. Pour Michel Candat, président du MRAP Dunkerque, « c’est comme si les clandestins n’existent pas pour les autorités locales » alors « ils les laissent moisir en périphérie puis détruisent le camps au moins une fois par an, c’est pas une solution ». À vrai dire, ce jeune retraité et ancien routier est un peu désespéré car dans la région, les clandestins sont trois à quatre fois plus nombreux et les associations sont débordées. « Ne me dîtes-pas qu’on ne peut pas les placer au chaud pendant l’hiver et leur donner au moins un repas par jour ? ».
Problème, l’Angleterre demande à la France de plus en plus de sévérité et supporte de moins en moins ces réfugiés sur son sol. Pourtant, ces-mêmes réfugiés imaginent toujours le pays de la rose comme un véritable eldorado et espèrent toujours pouvoir obtenir des papiers facilement ainsi qu’un travail. Le terrorisme et la crise ont changé cette réalité. L’Angleterre n’hésite plus à multiplier les contrôles voire à expulser et les chômeurs sont toujours plus nombreux (75 000 de plus en novembre dernier, un record).
Sur le port, les normes de sécurité sont de plus en plus rigoureuses, et agrémentées par des techniques de plus en plus évoluées, utilisant par exemple les détecteurs de chaleur. Aussi les routiers sont soumis à de fortes amendes si des réfugiés occupent leurs camions (à peu près 2000 euros pour chaque clandestin trouvé) mais aussi à des sanctions pénales. « Au début, c’était que des amendes et le patron payait. Plus maintenant », explique le président du MRAP. Du coup, routiers et clandestins font de moins en moins bon ménage comme le prouve l’agression d’un routier polonais par des clandestins le 21 novembre dernier. Une nouvelle qui a fait couler beaucoup d’encre dans la région mais qui ne doit pas faire oublier que « les réfugiés sont nombreux à mourir sous les roues des camions et dans le plus grand des silences », rappelle Michel.
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