Nouvel ouvrage élyséen d’un journaliste off.
Vieil attelage de la vie politique qui n’a su résister à l’usure du temps, le sénateur Pasqua et le toujours président Chirac s’appellent encore de temps en temps. Et s’échangent des amabilités. Des dialogues décrits avec gourmandise par le journaliste Daniel Carton dans son dernier ouvrage, Une campagne off, Chronique interdite de la course à l’Elysée. (Albin Michel), à paraître le 9 mai.
Les propos vindicatifs à l’égard de Charles Pasqua et de Jean-Michel Marchiani que Chirac tient devant son biographe hagiographe Pierre Péan, sont l’occasion d’un petit débriefing. Alors que Pasqua téléphone à l’inconnu de l’Élysée pour obtenir des explications sur les accusations dont il est victime, Chirac lui répond (atterré ?) : « Mais Charles, tu as vu ce bouquin ? C’est scandaleux ! Je suis d’accord avec toi, Péan n’a raconté que des conneries. D’ailleurs, t’as vu sa tête ! J’aurais dû me méfier. » (Cité par Daniel Carton, p. 86).
Une partie de la querelle tourne autour de la libération de trois otages français retenus en Iran par le Jihad Islamique depuis 1985. Et libérés le 4 mai 1988, soit entre les deux tours de l’élection présidentielle.
Dans ses confidences à Pierre Péan, notre futur ex-président de la République affirme que du temps où il occupait le poste de Premier Ministre dans le premier gouvernement de cohabitation (mars 1986 – mai 1988) il ne mettait pas le nez dans les affaires iraniennes. Celles-ci avaient été confiées au ministre de l’Intérieur Charles Pasqua et à son missionnaire Jean-Charles Marchiani. Aussi, d’après Péan, « Jacques Chirac ne sera pas tenu au courant de toutes les tractations secrètes menées par Marchiani avec les Iraniens » (Pierre Péan, L’inconnu de l’Élysée, Paris, Fayard, 2007, p.333). Et Chirac d’ajouter dans les pages du même livre : « Marchiani réclamait sans cesse de l’argent – que je ne lui donnais pas. Pasqua, lui, voulait que je prélève sur les fonds spéciaux de Matignon pour payer Marchiani. » Du petit lait pour Péan, dont l’inimitié avec le préfet « boum-boum » date au bas mot de 17 ans. Du temps, justement où Péan enquêtait sur les prises d’otages au Liban…
La balle ne tarde pas à être renvoyée, par le biais d’une interview de Charles Pasqua menée par Jean-Michel Apathie sur RTL le 22 février dernier, en partie relayée par Daniel Carton. Verdict : « Chirac ment comme il respire » (Pasqua).
Pasqua s’attache à « défendre son fidèle compagnon (Marchiani) qui, sans doute, a dû se salir les mains pour libérer les otages au Liban et d’autres à l’Est, tous services récompensés par Chirac lui-même qui le fit préfet du Var » (Daniel Carton, p. 86). Une affectation qu’il a occupée en partie, à couvrir les sorties nocturnes de Chirac, lors de ses séjours au fort de Brégançon.
De là à savoir à qui, Pasqua ou Péan, Chirac ment…