Nous avons pu entrer en contact avec le président François Mitterrand grâce aux services d’un sphinx grec dont les tarifs ont fortement baissé.
Le nombre et la fureur des événements qui se sont abattus ces derniers mois sur le monde nous ont empêché de saluer à sa juste valeur un exploit journalistique sans précédent. Il s’agit de l’interview post mortem de Claude François qu’ont réalisée, en février dernier, nos confrères de France Dimanche, grâce au fluide exceptionnel d’un médium dûment patenté.
Avec moins de moyens, car nous préférons, à Bakchich, la liberté à la richesse, nous avons pu, nous-mêmes, entrer en contact avec le président François Mitterrand, lequel séjourne dans l’au-delà depuis près de quinze ans.
Nous avons pour ce faire utilisé les services d’un sphinx grec dont les tarifs ont fortement baissé depuis la tourmente financière qui s’est abattue sur son pays. Un peu vexé, dans un premier temps, de ne pas interviewer le roi de Thèbes (les sphinx font presque tous un complexe d’Œdipe), l’Oracle s’est rasséréné en constatant qu’en dépit d’une longue inactivité ses pouvoirs demeuraient efficaces et ne s’étaient point rouillés.
La conversation fut brève mais cordiale. L’ex-Président, là où il est, se tient très au courant de l’actualité, et se montra charmé, sinon charmant, lorsque nous l’interrogeâmes sur les récents propos de Nicolas Sarkozy le concernant, qui vient de déclarer que, « si Mitterrand s’était abstenu de baisser l’âge de la retraite à 60 ans, on aurait beaucoup moins de problèmes aujourd’hui ». « J’avais pris à l’époque cette décision pour emmerder Giscard et Ceyrac [numéro un du CNPF, le Medef de l’époque, ndlr] » nous a déclaré, heureux, l’ancien premier magistrat de France. « Mais dans mes rêves les plus fous, je ne pouvais pas espérer alors emmerder aussi le petit Sarkozy, qui n’était [déjà] qu’un freluquet en ce temps-là. »
Ce contact établi avec le Guide, il importait de savoir si, pour 2012, sa préférence allait plutôt à Martine Aubry ou à Dominique Strauss- Kahn. Mais comme notre intermédiaire venait de lui poser la question, le nuage islandais, qui roulait dans le ciel avec insistance, se déchaîna soudain sur la communication ; et ne demeura audible, au milieu du tonnerre, que cette interrogation quelque peu sphyngique : « Tonton ? demande l’Oracle. Tonton ? Pourquoi tu tousses ? »