Pourquoi tant de vacanciers s’acharnent à rater consciencieusement leurs voyages ? Jean-Didier Urbain, anthropologue, répond à ces « mésaventuriers » dans un nouveau livre.
Lors d’un voyage organisé, des touristes font une excursion dans la mer des Caraïbes, du côté de Saint-Domingue. Et bien, que vous le croirez ou pas, ils ont été mouillés ! Furieux, dès leur retour de vacances, ils écrivent à leur voyagiste : « Mon mari, ma fille et moi-même étions au fond du bateau et nous avons reçu des paquets d’eau de mer à tel point que nous ne pouvions ni garder les yeux ouverts ni parfois reprendre notre respiration ». L’agence de voyages ne leur ayant pas répondu, ces clients mécontents ont saisi carrément le secrétariat au tourisme…
Apparemment, ces « mésaventuriers » ne sont pas les seules victimes de voyagistes sans scrupule. Une dame, en vacances au bord de la mer au Brésil, est aussi la cible d’une inadmissible arnaque : son hôtel est bien situé dans une baie, mais « il n’y a pas de vagues. Bien plus, si l’eau n’avait pas été salée, je n’aurai pas du tout eu l’impression d’être au bord de la mer ». On ose espérer que cette malheureuse a pu se faire indemniser convenablement. Et que penser de l’ignoble tromperie infligée à d’autres touristes à Madagascar : « les rares animaux vus (3 lémuriens et 1 gecko) l’ont tous été au début de la balade dans le tronçon commun à l’ensemble des circuits. Soupçons ». écrivent-ils, persuadés que le guide touristique a manipulé les apparitions d’animaux.
Certains « mésaventuriers » en viennent à dénoncer une mer « trompeuse » ? De « gros rochers auxquels étaient accrochés des milliers de coquillages très coupants », s’indigne l’un d’entre eux. C’est évident, rien ne va plus. « Il faut reconnaître que le monde a parfois des défaillances si pénibles à vivre qu’elles sont en effet difficiles à accepter », sourit Jean-Didier Urbain, anthropologue et professeur à l’université Paris-Descartes. Dès qu’ils quittent leurs maisons, leurs habitudes, ces « mésaventuriers » deviennent des escargots sans coquilles, perturbés par le moindre grain de sable. Un robinet qui goutte dans une chambre d’hôtel sur un autre continent se transforme en un véritable drame.
Le voyage était presque parfait n’est pas un petit bouquin de poche, bâti autour de quelques anecdotes amusantes, mais une vraie réflexion sur les voyages ratés. Car ces milliers de touristes modernes, qui s’acharnent ainsi à gâcher leurs vacances, ont eu de glorieux ancêtres. En effet, Christophe Colomb n’a-t-il pas lui aussi raté son voyage en prenant l’Amérique pour l’Inde ? Et Ulysse, dans son voyage de l’Iliade à l’Odyssée, n’a-t-il pas perdu vingt ans de sa vie ? Beaucoup de compagnons ? Sans parler des accidents, des emprisonnements. Sans oublier le psychorigide Don Quichotte qui « ne supporte pas qu’un décalage s’insinue entre le discours des livres et le discours du monde ».
Dans ce pavé de plus d’un demi millier de pages, jamais ennuyeux, il convient de savourer tout particulièrement les conseils aux lecteurs, ou comment être un « consternant voyageur ». Première leçon : avant de partir, vous devez imaginer le déplacement le plus compliqué et le plus précis. Ensuite, quand le programme est arrêté, il faut s’y tenir absolument, contre vents et marées. Et par principe, n’accepter aucune modification, grande ou petite, détour ou raccourci. Ainsi, on a toutes les chances d’échouer et d’être vraiment déçu.
Un autre conseil : n’élaborez pas tout seul votre programme. Car vous seriez contraint de vous en prendre à vous-même après le désastre. Laissez faire votre conjoint, un ami ou un professionnel. Ainsi, non seulement vous pourrez vous mettre en colère, mais vous réussirez aussi à « vous fâcher de surcroît avec un proche, un ami », assure Jean-Didier Urbain.
J’ai toujours pensé que les gens qui voyageaient étaient des téméraires. Merci pour la confirmation ! Comme si nous ne savions pas que tous les autres, et en particulier hors de france, sont des nuls.
Merci pour cet article.Marre de devoir n’être que sérieux ou pleurnichard !
En outre, il me semble que ce livre doit être une sérieuse invitation à réfléchir sur nos comportements et nos exigences, qui sont une véritable plaie de notre époque. Même si, bien sûr, il faut dénoncer de véritables escrocs de la profession.
HORS-SUJET : je n’arrive pas à accéder à la page abonnement. Ils sont décidément nuls à Bakchich !!!!!!!!!!!!!!
Mmmmmouais. Et alors ? À quoi rime cet article ? Il fait avancer le schmilblick, vraiment ?
En plus, se moquer des gens qui, à fond de cale, ont failli être noyés par des vagues qui n’auraient jamais parvenir à cet endroit, ce n’est pas très fin. Sur un bateau bien tenu, vous en voyez beaucoup, des paquets d’eau à fond de cale ? Ces passagers étaient tout à fait fondés à se plaindre.