Avant d’être des tortionnaires, les potes de Pinochet sont des hommes, sensibles et émotifs.
Quoique très officiellement en « état de démence sénile », Augusto Pinochet, l’ancien dictateur chilien est toujours justiciable. Non seulement dans son pays, pour torture et autres traitements délicieux, mais également en France, où il est poursuivi pour son rôle dans la disparition de quatre Français au Chili au milieu des années 70. Les quatre hommes, avaient-ils, il est vrai le tort de partager les idéaux d’Allende, le président élu que Pinochet renversa militairement en ce beau matin du 11 septembre 1973, l’un d’eux poussant la provocation jusqu’à être son médecin. Bonne fille, la justice française n’a toutefois pas voulu esseuler le vieil homme. Fin décembre 2005, le parquet de Paris a requis le renvoi de l’ex-dictateur devant la cour d’assises, accompagné d’une petite quinzaine de ses anciens affidés, militaires aujourd’hui à la retraite. Reste à la pétillante juge d’instruction Sophie Clément (aussi chargée de l’affaire Borrel et des détenus français de Guantanamo) de prendre la décision ou non de les envoyer dans le boxe des accusés.
Et pour s’attirer ses bonnes grâces, l’avocats d’un des prévenus lui envoie en vain de doucereux courriers. Le 28 mars 2006, Me Baratelli, dans une belle missive à Madame Clément, a plaidé pour son client, Emilio Sandoval Poo. Vieux militaire reconverti, et brillamment, dans le commerce, le bon Emilio « tient à redire à quel point il est soucieux de démontrer qu’il est étranger aux faits qui lui sont reprochés » : avoir, en 1973 séquestré le dénommé Etienne Pesle –un ancien prêtre français converti au socialisme chilien – dont la trace s’est depuis évanouie. D’autant que, malheureusement, sa bonne volonté se heurte à son état de santé, certificat médical à l’appui, et sa grande émotivité… « Son médecin traitant, mais aussi sa femme et ses enfants », avance l’avocat, « m’ont indiqué que, tant du point de vue physique qu’émotionnel, un voyage pouvait présenter un danger médical pour lui ».
Sûr qu’un mandat d’arrêt international et le risque d’être appréhendé sitôt le pied posé sur le sol français, forcément, ça émeut…