Le programme REDD (Reducing Emissions from Deforestation and Forest Degradation) fait entrer la déforestation dans le marché des droits à polluer.
Ce qu’est l’information. Ce qu’est la désinformation. Contrairement à ce qu’on croit, cette dernière ne nécessite pas un personnel nombreux et des objectifs ténébreux. La désinformation est souvent synonyme de vulgaire propagande.
Et en ce sens, le sommet sur les forêts du monde, qui s’est tenu à Paris le 11 mars, aura été un remarquable moment du faux. En avez-vous entendu parler ? C’est peu probable.
En deux mots, notre excellent Sarkozy a réuni des États forestiers des bassins du Congo, d’Asie et d’Amazonie pour de nouveau apparaître comme un écologiste planétaire. Un énième appel a été lancé pour stopper la destruction des forêts tropicales. Sarkozy et Borloo en ont profité pour rappeler que la déforestation représente autour de 20% des émissions de gaz à effet de serre liées aux activités humaines. En clair, arrêter la tronçonneuse, c’est contribuer à sauver le climat.
On applaudit le palabre ? Non, on n’applaudit pas. Ce que ne dit pas la presse, et ce qu’ignorera donc l’opinion, c’est que l’imagination technocratique vient de créer un nouveau monstre appelé Redd (Réduction des émissions résultant de la déforestation et de la dégradation forestière). Créé par des gens que nul ne connaît – par définition incontrôlables –, le Redd est sur le point de faire circuler une nouvelle monnaie. Sans jeu de mots, une monnaie de singe.
Par exemple, l’Indonésie s’engagerait à réduire le rythme infernal de sa déforestation, ce qui lui vaudrait en retour un crédit carbone qu’elle proposerait au plus vite aux industries du Nord les plus polluantes. Lesquelles – quelles veinardes, hein ? – pourraient continuer à envoyer dans l’atmosphère des gaz à effet de serre, mais « compensés » par la « non-déforestation » dans certains pays du Sud. Compliqué ? C’est fait exprès.
Les pays forestiers du Sud auraient alors intérêt à organiser un chantage à la déforestation, du genre : « Payez-moi, ou je rase mes forêts ! » Voyez plutôt le cas du petit État d’Amérique du Sud appelé Guyana. Le gouvernement de Georgetown vient d’annoncer un plan prévoyant la conversion de 90 % de ses forêts en cultures industrielles au cours des vingt-cinq prochaines années. Alors qu’il avait, jusqu’ici, conservé l’essentiel de sa couverture forestière ! Des cabinets internationaux spécialisés – en cette circonstance McKinsey & Company – conseillent plusieurs États du Sud alléchés par ces nouvelles perspectives financières. Dans le cas du Guyana, la rente annuelle pour « ne pas déforester » pourrait s’élever à 580 millions de dollars, soit plus de la moitié de son PNB actuel !
La morale de cette histoire ? Peut-être n’y en a-t-il pas. Ou plutôt, si : lisez Bakchich.