Landis capé du Tour

Incroyable… Floyd Landis se serait donc dopé ! Le cycliste contrôlé positif à la testostérone après sa victoire au Tour de France 2006 a fini par cracher le morceau. Selon le Wall Street Journal, l’Américain a envoyé des e-mails aux autorités du cyclisme pour raconter en détails comment il s’est dopé de façon systématique depuis qu’il s’est engagé dans l’ancienne équipe de Lance Armstrong, U.S. Postal. « Je veux soulager ma conscience », clame-t-il dans une interview pour ESPN au cours de laquelle il balance sur le monde du cyclisme et de la lutte anti-dopage (« une mascarade »).

L’UCI n’a rien vu

Landis "charge" Armstrong (qui n’en n’avait pas besoin…) qui lui aurait même servi de professeur ès dopage en lui racontant comment flouer les techniques de détection. Et l’ancien président de l’Union cycliste internationale (UCI), le Néerlandais Hein Verbruggen aurait « trouvé un accord » avec le septuple vainqueur du Tour de France quand ce dernier « a été testé positif au Tour de Suisse » en 2001 (qu’il a gagné) « pour fermer les yeux sur un contrôle positif », un mois avant le Tour de France. L’UCI, par son président actuel Pat McQuaid, paraît d’ailleurs gênée puisqu’elle parle d’allégations « nuisibles et scandaleuses ». Ceux qui espéraient que les instances mondiales du cyclisme s’empresseraient de balayer devant leur porte risquent d’en être pour leur frais.

Le "courage" de Landis est salué comme il se doit. Dommage que, comme de coutume dans le milieu ("remember" Richard Virenque ou Bjarne Riis), le cycliste ait attendu la fin de sa carrière et d’être acculé par la justice pour « soulager sa conscience »…

1,8 milliards d’euros le mensonge

Car si même les plus crédules soupçonnaient depuis belle lurette Landis de tricherie, l’Américain nie depuis quatre années tout dopage dans ses interviews ici ici ou là pour « laver son honneur ». Des dénégations qui ont coûtées à l’Agence mondiale antidopage (AMA) la bagatelle de 1,8 millions de dollars depuis 2006 pour faire la lumière sur cette affaire. En prétendant continuellement que le laboratoire de Châtenay-Malabry et les chercheurs avaient fait des erreurs, Landis a tenté de jeter le discrédit sur les instances anti-dopage du Tour de France et donc sur ce sport qu’il prétend aujourd’hui défendre. Depuis février et les soupçons de piratage sur le système informatique du labo, sa position devenait intenable.

Les yeux dans les yeux

On avait presque envie de sortir les mouchoirs quand Landis se défendait sur "Stade 2" quatre mois après son contrôle positif. « C’était terrible parce que je ne pouvais pas expliquer ce qui était en train de se passer », se plaignait-il. Après avoir soutenu que son taux anormal de testostérone provenait d’une consommation d’alcool de la veille ( !), Floyd Landis a préféré adopté la technique du "c’est une erreur incompréhensible". « Je ne peux pas expliquer cette affaire de dopage. Je suis aussi surpris et troublé que les personnes qui regardent », expliquait-il à France 2. « Dans mon cas, le laboratoire a commis des erreurs », ajoutait-il en affirmant « les yeux dans les yeux » : « Non, je n’ai pas pris de testostérone ! » « Je voudrais dire aux spectateurs que j’ai fait le Tour en étant propre ».

Armstrong et « le bénéfice du doute »

Et le filou en rajoute : « Si j’étais juste un fan de cyclisme, je serais désabusé. Et je suis un fan de cyclisme. Je pense que cette situation ternit l’image de ce sport. » En bonus, les sentiments de son ancien équipier Lance Armstrong sur cette affaire : « Lui aussi a été accusé de choses. Il est l’une des seules personnes qui peut comprendre ma situation. » Lance lui aurait même prodigué ce précieux conseil : « Sois clair dans ce que tu peux dire et n’attends pas des gens qu’ils t’accordent le bénéfice du doute »

France 2, dithyrambique…

Après le grand coup de balai de 2005 et la soi-disant retraite d’Armstrong, le Tour de France croyait en avoir fini avec ses vieux démons. L’édition 2006, baptisée par quelques spectateurs sur le bord de la route "Le Tour d’amour", était placée sous le signe du renouveau. Le 20 juillet, Floyd Landis, le « mennonite de Pennsylvanie » revient à la surprise générale dans la course du maillot jaune après 133 kilomètres d’échappée. La veille, le coureur était pourtant dans les choux. Mais, peut-être motivée par sa soirée arrosée, il relègue ses poursuivants loin derrière. On apprendra trois jours avant la fin de l’épreuve le contrôle positif de l’Américain. France 2, partenaire du Tour, croyait pourtant dur comme fer à son nouveau champion dans son résumé des "grands moments du tour". La deuxième chaîne était déjà dithyrambique sur « l’exploit » de Landis dans son JT (« digne des plus belles heures de l’histoire de la compétition »). Le « sacré retournement de situation » est imputé à « une bonne nuit de repos »…

… et "rassurée"

La "preuve" que Landis ne s’était pas dopé était sa cuisante défaite : « Coup de tonnerre sur le tour. Le maillot jaune qu’on croyait invulnérable craque. Image saisissante… mais tellement rassurante. Dans ce tour, les défaillances réapparaissent, les rictus de souffrance aussi. » Le lendemain, « Landis passe à l’attaque. L’épopée peut commencer. » « Réaction d’un homme touché dans son orgueil. Réaction d’un champion, tout simplement. » Conclusion de cette victoire : « Du suspens, des rebondissements et des champions un peu plus humains. Ces derniers jours, le Tour s’est trouvé de nouveaux héros et des raisons d’espérer. »

Imaginons Nadine Morano apprendre le savoir-vivre ou Jean-Pierre Pernaut organiser une manif’ de cheminots… Floyd Landis et Lance Armstrong se permettent de donner des conférences. Le thème : "Comment le sport peut-il lutter contre le dopage ?"