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Congo-Kinshasa / vendredi 2 juin 2006 par Paloma Kélélé
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A peine sorti d’une guerre civile qui a laissé sur le carreau trois millions de personnes, le Congo-Kinshasa se prépare à affronter ses premières élections libres. Les hommes politiques, eux, peaufinent leur programme autour d’un axe principal : "la Congolité". ou comment foncer dans le mur d’une nouvelle guerre en klaxonnant…

« Est-ce que tout ça vaut la peine ? » s’interroge un haut fonctionnaire des Nations Unies dont le bureau, installé au cœur de Kinshasa, est mieux protégé que celui du chef de l’Etat.

« Tout ça » ce sont les énormes moyens déployés par la communauté internationale pour les élections de juillet. Il y a plus de 17 000 casques bleus disséminés dans le pays - aussi vaste que l’Europe occidentale. Jamais dans son histoire l’ONU n’a vu aussi grand. Ni aussi cher (plus d’un milliard de dollars engloutis). Et comme si cela ne suffisait pas, dans les prochains jours vont débarquer à Kinshasa les premiers éléments d’une force européenne - qui sera essentiellement française.

Le défilé des candidats congolais « Tout ça » donc pour permettre à la République démocratique du Congo (RDC) - l’ex Zaïre de Mobutu - de choisir ses futurs dirigeants. Une première depuis plus de quarante ans ! Le problème est que le processus est mal engagé. Il faudrait parler « reconstruction », « projet de société ». On préfère viser en dessous de la ceinture et faire campagne sur les thèmes ethniques, mettre en doute la « congolité » des uns et des autres. Rien de tel pour préparer une nouvelle guerre civile alors que le Congo sort à peine d’un conflit qui a fait plus de 3 millions de morts. On n’avait pas fait mieux depuis la fin de la seconde guerre mondiale.

Kabila, chauffeur de taxi tanzanien

Le premier visé est Joseph Kabila, le candidat préféré des Français et des Américains. C’est par hasard qu’il est devenu chef de l’Etat. Son père assassiné par l’un de ses gardes du corps, le fils de Laurent-Désiré a été désigné pour lui succéder. Il n’avait pas trente ans. Mais Joseph Kabila est-il le fils de son père ? Est-ce qu’il ne serait pas rwandais en réalité ? Le flou qui entoure son CV alimente les interrogations. Joseph jure que pendant que son père faisait le coup de feu contre Mobutu il usait ses fonds de culotte dans un établissement d’enseignement français. Mais jusqu’à récemment son français était approximatif. Il jure être diplômé d’une fac américaine mais sans dire laquelle… En revanche, tout le monde est d’accord pour dire qu’il a été chauffeur de taxi en Tanzanie. Les attaques les plus rudes viennent de l’entourage de Kabila, en particulier d’un des quatre vice-présidents, Jean-Pierre Bemba lequel ne cache pas qu’il ambitionne de devenir calife à la place du calife. L’homme pèse un bon quintal. Il est riche comme Crésus. Pas franchement sympathique, il entretient une milice privée de plus d’un millier de soudards dans la banlieue de la capitale. Dans ses réunions électorale, Bemba insiste lourdement sur le thème que lui il est « congolais à 100% ».

Jean-Pierre Bemba feu et à sang

Le candidat Bemba joue gros. Vice-président dans le cadre de la cohabitation version congolaise, il sait qu’après l’élection, il risque de n’avoir plus de fonction officielle. Et donc de se voir demander des comptes par la Cour pénale internationale (CPI) pour deux affaires. Ses hommes, qui pendant la guerre civile, faisaient la pluie et le beau temps, dans une partie de la RDC, ont été accusés d’anthropophagie sur des pygmées et, d’autre part, d’exactions et de sévices en Centrafrique où Bemba était venu prêter main forte il y a quelques années à un autre dictateur de la région. Le dossier est suffisamment lourd pour faire craindre que Bemba ne soit tenté de jouer la politique du pire pendant la campagne électorale. Quand on évoque devant lui sa possible comparution devant la CPI Bemba ne se démonte pas. Il réplique que le criminel de guerre ce n’est pas lui mais Joseph Kabila, « le Rwandais », qu’il rend responsable du massacre de centaines de milliers de personnes dans l’est du pays.

En Côte d’Ivoire on a vu ce que le concept d’ivoirité douteuse avait coûté au pays. Apparemment, la leçon n’a pas été comprise partout…ou trop bien !


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