Quand une enquête de la PJ Niçoise concerne un des fils du guide Libyen…
Faute de grive – Cécilia Sarkozy – la commission parlementaire qui doit se pencher en octobre prochain sur les miracles réalisés par la diplomatie française auprès de Kadhafi serait sans doute bien inspirée d’aller interviewer quelques merles de la PJ niçoise. Ces derniers, appuyés par leurs collègues de l’office central de répression du trafic des êtres humains (OCRETH), ont en effet démantelé au cœur de l’été un joli réseau de call-girls qui sévissait à Cannes « depuis des mois ». Patron présumé du réseau, Elie Nahas, un homme d’affaires libanais, a ainsi été écroué en août avec une demi-douzaine de comparses pour « proxénétisme aggravé en bande organisée, blanchiment habituel de fonds » et on en passe.
Rien de bien nouveau sous le soleil de la Croisette, les accortes jeunes femmes, officiellement « modèles photos » dans l’agence dirigée par l’industrieux libanais ayant pour mission – on l’a compris – d’égayer la clientèle fortunée des grands hôtels ou des propriétaires de yachts. Ceci au prix plancher de 2000 euros et beaucoup plus si affinités.
Unanime, la presse a salué le succès policier comme la dimension « internationale » d’un réseau doté effectivement d’antennes à Beyrouth et jusqu’au Venezuela. L’accent est aussi mis sur le caractère « tentaculaire » des investigations, et des mois d’enquête qui furent nécessaires au démantèlement du réseau. À se demander pourquoi après un aussi joli succès, le ministère de la Justice s’est empressé de dessaisir le magistrat de Grasse en charge du dossier et a privé de dessert les hommes de la PJ de Nice qui avaient si bien travaillé. C’est en effet au juge marseillais Dominique Voglimacci-Stephanopoli et à une juridiction spécialisée, le JIRS (Justice interrégionale spécialisée) qu’est immédiatement confié le dossier.
Une décision « technique » explique t-on qui se justifierait justement en raison de « la dimension internationale » de l’affaire. L’explication fait sourire jusque dans les colonnes de Nice matin où l’on peut lire : « Deux bateaux, fréquemment utilisés par des proches d’une famille régnante du Golfe Persique pour l’un et par les enfants d’un homme d’État nord africain pour l’autre, sont susceptibles d’avoir accueilli à leur bord des filles alors qu’ils mouillaient en baie de Cannes lors du dernier Festival du film. »
De source policière – assez remontée – on apprend en effet que l’un des mouilleurs en eaux troubles se trouve être l’un des rejetons du guide suprême, Mouammar Kadhafi. « Son nom apparaît en toutes lettres dans le dossier » précise-t-on à Bakchich. C’est la raison de sa délocalisation brutale.
De l’intéressé, Le Monde dressait il y a quelques mois un portrait haut en couleurs : « Dans la famille ( Kadhafi) Motassim Bilal est sans doute le plus allumé, un mélange de Robert de Niro et de Massimo Gargia. Aussi connu sous le nom d’Hannibal, il a fait parler de lui en septembre dernier après une bagarre sur les Champs-Élysées qui a envoyé trois policiers français à l’hôpital. Interpellé à 140 km/h en plein centre de Paris après avoir grillé plusieurs feux rouges, cet amateur de jolies filles et de belles voitures a évité la prison uniquement grâce à son passeport diplomatique. De passage à Paris début 2005, il a à nouveau fait parler de lui. La justice française lui reprochait cette fois-ci d’avoir tapé sa jolie compagne Aline Skaff alors enceinte. Il a finalement été condamné par le tribunal correctionnel de Paris, le 23 mai 2005, à quatre mois de prison avec sursis pour violences et port d’un pistolet de calibre 9 mm sans possession de permis. » Avec un tel profil, Hannibal n’a pas besoin de publicité supplémentaire. Alors même, que l’on discute fiévreusement d’infirmières bulgares, de nucléaire et de canons, était-il utile d’indisposer le papa du chaud lapin ? Mettre un peu de pression puis arranger l’affaire suffisait. Une fine affaire de diplomatie.
Bonjour,
Une petite rectification : le fils à papa a en fait menti à propos de son statut, puisqu’il n’est absolument pas diplomate mais normalement en France, un citoyen de passage comme les autres. Les flics se sont fait avoir en réalité, mais ils l’ont appris trop tard.
Le sud est de la France est de toutes façons l’objet de nombreuses histoires similaires, dans lesquelles politiques et mafieux en tous genres se côtoient et festoient ensemble.
Mais ça ne date pas d’aujourd’hui. Un reportage sur l’histoire de la French Connexion diffusé sur Planète ou Arte l’année dernière, parle d’un parrain de la drogue à propos de Gaston Deferre, et de complicités au plus haut de l’état en ce qui concerne son impunité et le fait que même le DEA Américain n’ait rien pu faire.
A la même période, une enquête judiciaire était lancée sur Bordeaux. Il se disait dans des milieux bien informés que Chaban Delmas avait commandité un ou plusieurs assassinats.
L’affaire récente du juge Borel mouille aussi l’Elysée et la fripouille présidentielle de l’époque a décidé d’utiliser son statut d’immunité pour ne pas répondre aux questions de la justice. Bref, en France, rien de nouveau…
Fred de Poitiers