C’est plus fort que lui : le nouveau ministre du Budget, François Baroin, ne peut pas être sectaire quand il s’agit de gouverner.
Le masochisme qu’il faut pour être ministre ! Et aux postes les plus exposés ! Le nouveau titulaire du Budget, François Baroin, vient d’en donner à son tour une illustration. Il n’y a pas trois mois, les mesures gouvernementales qui agréaient à cet entreprenant garçon se comptaient sur les doigts d’une main. Le débat sur l’identité nationale ? « La ficelle est trop grosse. » La désignation, par l’Élysée, du patron de France Télévisions ? « Un recul de vingt-cinq ans. » L’équipe Fillon ? « Un gouvernement d’apparatchiks. »
François l’a raconté, à sa façon, à Paris-Match : il n’aura fallu qu’un rendez-vous avec le Président avant le second tour des régionales et un coup de fil du même, quelques jours plus tard, pour vaincre ces préventions outrancières. Une semaine de plus, et, nouvelle éminence du régime, le maire de Troyes le jurait, aux Échos cette fois : le bouclier fiscal répond à « un principe d’équité ». Pour les intéressés, sans aucun doute.
Avec le Budget, portefeuille périlleux et souvent dévolu à un inconditionnel du chef de l’État, Baroin, 45 piges en juin, accède à son quatrième maroquin. Déjà député, il décroche le premier à 29 ans, un record inégalé depuis Mitterrand (à la Libération). Fugitif porte-parole du premier gouvernement Juppé (juin-octobre 1995), il fait à l’époque sourire jusque dans son parti, le RPR : « François », c’est à l’époque surtout « Harry Potter », « Tintin », ou bien encore « le p’tit Baroin ». Par opposition au « grand » Baroin, son père, Michel, disparu dans un accident d’avion en 1987, patron de la GMF et de la Fnac, dignitaire du Grand Orient, ami personnel de Chirac, lui-même premier tuteur politique de François.
Le « p’tit » ne réapparaît au gouvernement que douze ans plus tard, sous Villepin. À l’Outre-mer d’abord, puis, pour moins de deux mois, à l’Intérieur, quand Nicolas part en campagne présidentielle (officielle). Déjà, son affabilité naturelle, ou étudiée, aidant, notre ami se révèle adaptable. Bébé Chirac donc, il joue, dès 2004, les porte-parole (encore !) de Sarkozy à la présidence de l’UMP. Parole assez soporifique, d’ailleurs.
Une surprise : jeune journaliste (sur Europe 1), il était assez vif. Surtout, ce pêcheur du dimanche (dans les rivières de la Creuse) répète qu’il est « chiraco-villepino-sarkozocompatible ». Le goût du risque, certainement. Suppression de quelques niches fiscales ? Création d’une nouvelle tranche d’impôt sur le revenu ? Sortie de la CSG et du RDS du bouclier fiscal ? En cette fin de semaine, pour apaiser les parlementaires en grogne, le gouvernement n’avait pas encore tranché, mais on est bien tranquilles : quelle que soit la formule retenue, le très « compatible » et un rien « pipolisé » Baroin viendra de toute façon nous expliquer, plus rad-soc’ que churchillien, qu’elle répond à « un principe d’équité ».
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