Un président fantôme, un scrutin vide, une violence islamiste résiduelle…Le temps s’écoule en absurdistan mais rien ne passe.
Les Algériens se désintéressent du scrutin législatif qui a lieu le 17 mai. L’absence de programmes des partis en lice et la médiocrité des discours ont eu raison de l’esprit citoyen. Dans certaines villes il a fallu annuler les réunions publiques faute de participants. L’abstention sera très élevée, mais sans doute relativisée par les services du ministère de l’Intérieur. Pourtant l’enjeu est de taille ; quelle place dans le champ politique pour les islamistes ? Quel parti pourra capter cet électorat ? Toutes ces questions n’ont pas été débattues, pour une raison principale : le retrait forcé du Président de la République pour des raisons de santé.
Le Premier ministre Abdelaziz Belkhadem et secrétaire général du FLN, souvent qualifié de « barbefélènes » et favorable à l’intégration des anciens militants du FIS dans le FLN, n’a pas osé mettre en avant ce thème pour ne pas hypothéquer ses chances de succéder à l’actuel chef de l’Etat qui pourrait abréger son mandat pour des raisons de santé.
D’autre part, il ne voulait pas prendre le risque de heurter un électorat déjà échaudé par la loi sur l’amnistie sans que l’Etat ne s’engage dans un travail de vérité sur les événements qui se sont déroulés au cours de la décennie 90.
Aujourd’hui la démocratie de façade installée depuis 1999, n’intéresse pas les Algériens qui savent depuis longtemps que le personnel politique est avant tout préoccupé par ses intérêts. D’autant que la plupart des partis politiques se réclament de l’actuel président et se gardent bien de le critiquer. Les timides… Même si ce dernier concentre entre ses mains tous les pouvoirs, il a même réussi à renvoyer les militaires dans leurs casernes et les y maintenir.
Qu’il s’agisse du FLN, du RND ou des islamistes du Mouvement de la société pour la paix (MSP), chacun a intérêt à se prévaloir de son appartenance à la mouvance présidentielle, sans avancer d’idées qui n’auraient pas obtenu au préalable l’assentiment du chef de l’Etat. Le contexte est pourtant favorable à un débat de fond sur l’avenir du pays, alors que l’Algérie ne cesse d’engranger les milliards que rapporte l’exploitation des hydrocarbures. L’argent est là, mais la réflexion est absente des discussions.
Cette absence de projets est le point noir d’un Etat incapable de se projeter dans l’avenir, ni d’offrir des perspectives à une jeunesse qui rêve d’exil.
Cette situation dramatique provoque des tensions sociales et continue d’alimenter en partie les maquis ou des réseaux de soutiens qui permettent à ceux qui se sont rangés sous la bannière d’Al Qaida de conserver une importante capacité de nuisance.
Ils ont pu le prouver le 11 avril dernier en frappant au cœur de la capitale le palais du gouvernement et qui avait fait 30 morts.
Aujourd’hui la grande crainte des services de sécurité algériens sont les attentats de kamikazes à motos, beaucoup plus difficile à intercepter. Un mode opératoire utilisé par les tigres Tamouls au Sri Lanka.
Le résultat de cette consultation ne devrait pas révéler de modifications dans les rapports de force. Le FLN devrait arriver en tête, comme c’est le cas actuellement, le reste sera affaire de tripatouillages internes au sérail en fonction des intérêts du moment. Les partis de l’Alliance Présidentielle, MSP, RND, MRN devraient conserver le même nombre d’élus.
Le Premier ministre sera reconduit dans ses fonctions, la seule incertitude concerne le temps que pourrait encore passer aux affaires Abdelaziz Bouteflika. Déjà le puissant général-major Mohamed Médiène dit Tewfik patron des services de renseignements prépare l’après-Bouteflika et les modalités de désignation d’un candidat. Ce climat d’incertitude n’est pas favorable aux affaires, notamment pour les Français, qui ne se précipitent pas pour investir. La maladie du Président, le risque d’une reprise des attentats dans les villes et l’instabilité chronique du régime ne plaident en faveur d’un changement d’attitudes pour des hommes d’affaires plutôt en quête d’environnements sains et sûrs.