Sable chaud, soleil toute l’année et méditerranée. Le tout sans beaucoup de touristes. Les marchands d’armes ont fleuré l’aubaine et ne risquent pas de décamper de sitôt de la Libye. Surtout que dans un tel désert, vendre du Mirage relève de l’évidence.
À défaut de vendre du rêve au colonel Kadhafi, le si sympathique guide libyen, le fleuron de l’armement français va peut-être enfin lui requinquer ses Mirage achetés dans les années 70.
Et pas une simple remise en vol des zincs – « comparable à un simple coup de peinture » dixit un spécialiste de l’aéronavale- mais une vraie cure de jouvence : du « retrofit »…Derrière ce terme un poil barbare se cache une réalité toute simple : une sorte de « tuning » des chasseurs en vue de pouvoir les monter de nouveaux missiles derniers cri et de mettre au goût du jour tout leur appareillage électronique. Du neuf avec du vieux.
Une méthode éprouvée par l’aviation pakistanaise au début des années 90 et que les militaires du « pays des purs » ont chaleureusement recommandé à leurs homologues libyens.
Timides, les généraux de Kadhafi n’ont matérialisé leurs vœux que mi-2006. Le temps que leur colonel de guide deviennent un peu plus fréquentable. Mais les gradés savent ce qu’ils veulent. Et le détaillent fort précisément dans un fax du 13 août 2006 à la direction générale des armées françaises. Tombées dans les innocentes mains de Bakchich (cf. doc en bas de page), le texte se veut limpide, ou presque. « Complete Overhaul of 12 A/C Mirage (F1), overhaul of 18 engines… » Bref des termes techniques constitutifs d’un « retrofit complet », ainsi que le confirme un fin connaisseur du marché.
Las, aucune oreille attentive à Paris n’a alors accédé aux demandes libyennes. Non qu’aider l’armée libyenne à se moderniser effraya quiconque, mais une lubie courrait à l’époque : refourguer coûte que coûte le Rafale, le joyau de Dassault encore jamais vendu à l’étranger, à l’export. Pas question donc de moderniser des vieux avions, autant essayer de leur refiler des Rafale neufs. Et en signe de bonne foi, accepter de remettre en vol quelques zincs. L’entourloupe a failli marcher. Un accord est ùêùe scellé en dcembre dernier.
Mais une élection présidentielle et une libération d’otages bulgares plus tard, le deal a explosé.
Un peu à cause de la Sofema, qui devait gérer le contrat. Déjà bien empêtré dans des remous internes par feu le contrat libyen (cf. En Libye, la Sofema rame), l’office craint maintenant des poursuites judiciaires. Intermédiaire du deal, Roger Tamraz est fort gêné de ne pas avoir récupéré de commissions dans l’affaire et espère bien obtenir réparation, 9 millions d’euros à croire quelques indiscrets.
De son côté l’ami Kadhafi n’a pas beaucoup pleuré sur le défunt deal. Entre acheter des Rafale (45 millions d’euros pièce) et booster ses mirages (12 millions) le guide a fait ses comptes… D’autant que le bonhomme a été fort marri de constater que la France lui refuse ce qu’elle a accordé au Maroc.
Heureusement, entre gens de bonnes compositions, un règlement est toujours possible. Et Kadhafi devrait enfin avoir droit à un lustrage de ses joujoux volants. L’Astrac (Assocation Sagem Thalès pour le Retrofit des Avions de Aombat) qui a vu le jour à l’occasion du contrat de rénovation des 27 mirages marocains (350 millions d’euros), devrait remettre le couvert en Libye. Et en plus de mise au goût du jour des avions, leur refourguer des missiles derniers cris, les AASM déjà achetés par les Marocains.
Mieux, les grosses têtes de l’armement rêvent d’un petit ménage à trois, qui pourrait leur rapporter gros, entre France, Libye et…Grèce.
Fort désireux de changer sa flotte aérienne, les Grecs ne seraient pas contre l’idée d’acheter du Rafale, à condition qu’on leur reprenne leurs Mirage. D’où l’idée de génie : la Libye choppe les 30 F1 grecs, la France les booste, et la Grèce achète des Rafale.
Projet en cours : un ménage à trois, ça ne s’improvise pas.
Rappelez-moi le nombre de jeunes ingénieurs français en aéronautique ?… Ils ne sont pas assez bons pour les polonais, lesquels n’avaient pas attendu que leur signature à l’entrée dans l’ U.E. soit sèche pour acheter des avions américains.
Pour une fois qu’il y a un client à la porte, vous n’allez quand même pas en faire une ’affaire d’ Etat’ !…
Chris du Fier