Bientôt mis à la porte, notre glorieux Président a heureusement déjà trouvé un nouveau gîte. Mieux, presque une concession funéraire. Un appartement de 180m2 prêté par la veuve de son grand ami Rafic Hariri.
Enfin ! la principale, l’irréductible, l’inconciliable pierre d’achoppement philosophale entre Nicolas Sarkozy et Jacques Chirac a été révélée. Trop longtemps les journalistes ont suivi des fausse-pistes. Vision du monde, classique drame de César et Brutus, complexe oedipien, talonnettes, sumo…
Autant d’hypothèses et de pis aller échaffaudés en pure perte par des générations de gratte-papiers. Les choses sont bien plus simples. Si, si. Plus humaines, plus palpables et dévoilées alors même que Jacques Chirac quitte ses fonctions de président de la République. L’alpha et l’omega de l’inimitié de ces deux là n’est autre qu’immobilière. Quand Sarko, as de le revente avec gros bénéfice (appartement de l’île de la Jatte) revendique sa vision d’une France de propriétaires, Chirac préfère le squat viager. Et ne compte pas s’arrêter à la sortie de l’Élysée. 18 ans à la mairie de Paris, 12 ans à l’Élysée, ça crée des habitudes. Pas question d’acheter. Ni de payer son logement. Faut pas pousser.
Heureusement les mannes des disparus se sont portées à sa rescousse. Une fois de plus. En d’autre temps, ils votaient pour lui à la mairie de Paris. Désormais, ils lui prêtent le gîte. En l’occurence, le premier ministre libanais assassiné en septembre 2005, Rafic Hariri, lui a trouvé un toit. Sa veuve a mis à disposition un appartement de 180 m2 quai Votaire, avec une vue imprenable. Pas rancunière la Naazec. Au bas mot, entre 5000 et 7000 euros de loyer, passé à la trappe au nom de la grande amitié Hariro-chiraquienne, forgée par plus vingt ans de compagnonnage. À l’enterrement de son mari, elle avait pourtant lâché au Chi « Tu m’avais promis qu’il ne lui arriverait rien » [1].
L’idylle a commencé dans les années 80. Prospère homme d’affaires, doté d’un passeport saoudien – un temps diplomatique puisque Rafic a été troisième conseiller de l’ambassade d’Arabie Saoudite à Paris –, Hariri joue aux guides de l’Orient compliqué pour son pote Jacquot. En approfondissant, quitte à jouer les missi dominici, la connaissance de l’alors maire de Paris de nombreux dirigeants arabes : Hosni Moubarak, Cheikh Zayed des Émirats ou Saddam Hussein, l’ami irakien.
Mais les cours de géopolitique ne sont pas tout. Il faut bosser, se plonger dans la vie d’ici-bas aussi. Et les deux compères le savent. Entre renflouement de l’Institut du monde arabe, campagne présidentielle de 1988 et 1995, voyage à Oman, la paire a beaucoup fonctionné. Et toujours dans le bon sens. Des poches de Rafic vers les comptes de campagne. Mais toujours au service de la France tant Hariri excelle en VRP, intermédiaire crient les vierges effarouchées, de « la société Total et des industries d’armement durant la guerre Iran/Irak » [2].
Et Jacques n’a pas été ingrat, soutenant corps et âme son ascension politique, avec son autorité de chef d’État. Quitte à renier la politique française au Proche-Orient et se brouiller avec le fort peu commode partenaire syrien. Quand en 2004 Hariri démissionne de son poste de chef de gouvernement pour protester contre l’ingérence syrienne, le Chi le soutient. Et fait voter à l’ONU la résolution 1559 qui met Damas, longtemps partenaire privilégié de la France, au ban des nations. Incidemment la doctrine du Quai, « ne pas séparer l’équation libanaise des autres questions proche orientales » (plateau du Golan, Palestine etc…) vole en éclats. Comme Rafic, un an plus tard.
Et depuis le Président s’évertue à vouloir traîner les coupables de l’assassinat d’Hariri devant un tribunal pénal international, sous l’égide de l’Onu. Rien de moins. Une si belle amitié ne pouvait que résister à la mort.