La une de tous les journaux, la démission du vice-président ultra populaire du pays, un procès pour corruption. Thalès a démontré en Afrique du Sud l’étendue du « french flair » et provoqué le plus grand scandale politico-financier depuis la fin de l’apartheid… pour seulement 60 000 euros. Un coup de maître !
Au tournant des années 2000, la justice sud-africaine met le nez dans une vieille affaire, un contrat d’armement. De peur d’être chatouillé de trop près, Thalès se met en quête d’un protecteur. Une chance, ce genre de mission est la spécialité du directeur de ses filiales locales, Alain Thétard. Pur produit du groupe d’armement français, le Français est le spécialiste ès intermédiaire de la maison, à l’œuvre notamment dans l’affaire dite « des frégates de Taiwan ».
Thétard ne faillit pas à sa réputation. Parti à la pêche, il ramène un gros poisson. Ni plus ni moins que le vice-président d’Afrique du Sud. Ultra-populaire, charismatique, successeur potentiel de Thabo Mbekhi, Jacob Zuma est inattaquable… et peu gourmand. Via son conseiller et ami Shabir Shaïk, déjà en cheville avec Thalès, un arrangement est vite trouvé et envoyé par fax crypté au siège du groupe à Paris. Une fois de plus, Thétard a fait montre de maestria. Pour que « Zumajax » devienne le rempart de Thalès contre de mauvais enquêteurs, il n’en coûtera à l’entreprise française que 500 000 rands par an. Environ 60 000 euros, une misère. On a connu des entreprises plus généreuses en matière de graissage de patte.
Las, le fax réapparaît en 2005. Et quelques juges chagrins trouvent cet accord peu honnête. Jacob Zuma, mis en examen pour corruption, est gentiment démissionné par le président Mbeki, ravi de voir chuter cet encombrant bras droit. Depuis il comparaît en procès mais pour… viol. Shaïk accusé de fraude et de corruption, est condamné à 15 ans de prison pour son rôle d’intermédiaire dans l’opération. Selon le jugement, « il n’y a aucun doute qu’un accord a été trouvé par Shabir Shaïk et Alain Thétard pour que Thalès paie Jacob Zuma ».
Malgré cette sentence peu favorable, le groupe d’armement français a cru pouvoir s’en tirer à bon compte. En effet, un arrangement avec le procureur avait été trouvé qui suspendait les poursuites contre l’entreprise. Mais, en novembre, un juge chafouin a estimé que le marchand d’armes devrait passer devant un tribunal.
Ce sera le 31 juillet prochain. Thint et Thint Holdings, les deux filiales locales de Thalès, partageront l’affiche avec Jacob Zuma, toujours vice-président de l’ANC, le parti au pouvoir.