Pour avoir, « à l’insu de son plein gré », obtenu des documents confidentiels sur la défense sud-coréenne, le patron de Thalès-Corée du sud risque quinze ans de prison.
Bernard Favre d’Echallens a bien travaillé. En vue de préparer l’appel d’offre de l’état coréen pour une commande de radars militaires, le patron de Thalès Corée du Sud -également trésorier de la chambre franco-coréenne de commerce- a obtenu des renseignements de première main : des documents de l’agence de développement pour la défense (ADD), un organisme gouvernemental chargé, entre autre, du suivi des systèmes-radar actuellement utilisés au pays du matin calme. Le tout sans grand effort. Il lui a suffi de débaucher, pour 480 000 euros, l’ancien numéro 2 de l’ADD et d’en faire son « consultant ». Une manœuvre « légale » selon le groupe et qui peut rapporter gros. Avec ces informations, Thalès se retrouve en bonne position en vue de l’obtention d’un marché de plusieurs dizaines de millions d’euros.
La récompense n’a pas tardé : le 21 mars dernier, un mesquin juge sud-coréen inculpe Favre pour « atteinte à la sûreté nationale ». Une décision assortie d’un séjour à l’ombre de quelques semaines et le risque de passer les quinze prochaines années de sa vie en cabane. Selon le procureur taquin, les documents obtenus par Favre sont classés confidentiels. Et avant d’être transmis par le « consultant » à Bernard Favre, ils auraient été exfiltrés de l’ADD par un analyste de l’agence.
Ingénu, Bernard Favre nie s’être procuré de tels documents ou à défaut plaide la « bonne foi » : si j’ai consulté des documents secret-défense, c’est à l’insu de mon plein gré, argue-t-il en substance. Une naïveté qui devrait toucher les juges. Lancés dans une vaste opération mains propres qui a déjà fait tomber le premier ministre et le fondateur de Samsung, les magistrats coréens font actuellement preuve d’une grande mansuétude.