Rechercher dans Bakchich :
Bakchich.info
UNE BRÈVE HISTOIRE DE BAKCHICH

Tags

Dans la même rubrique
Avec les mêmes mots-clés
RÉCLAME
Du(des) même(s) auteur(s)
FILOUTERIES

Parfum de Camorra dans « la cité la plus violente du 9-3 »

Justice / mercredi 26 novembre 2008 par Anne Steiger
Twitter Twitter
Facebook Facebook
Marquer et partager
Version imprimable de cet article Imprimer
Commenter cet article Commenter
recommander Recommander à un ennemi

Plongée au tribunal correctionnel de Bobigny où cinq hommes comparaissaient pour « association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un crime ».

Par peur et vengeance, ils avaient projeté de tuer ceux qui, selon eux, étaient les meurtriers de leurs amis. Les cinq hommes qui comparaissaient lundi devant le tribunal correctionnel de Bobigny pour « association de malfaiteurs en vue de la préparation d’un crime » et « détention d’armes sans autorisation » reconnaissent les faits. Pour leur défense, ils expliquent : « Nous étions les prochains sur leur liste ».

Avaler un dossier en une matinée

Leurs larges épaules sont serrées les unes contre les autres. Assis en rang d’oignon sur le banc des accusés, les cinq hommes, âgés de 23 à 34 ans, semblent détendus. Deux d’entre eux pourtant comparaissent sans défense. Leur demande pour obtenir un avocat commis d’office s’est « perdue dans la nature » et l’avocate de permanence dit n’avoir pu « avaler un tel dossier en une matinée ». La présidente demande aux prévenus concernés s’ils sont « certains de vouloir comparaître sans défense », sachant qu’ils « risquent gros ». Ils le sont. Cela fait dix-huit mois qu’ils attendent ce procès en détention provisoire.

À les entendre, c’est bien la vengeance et la peur qui les auraient poussé à fomenter ce plan : « On a eu un coup de chaud, un gros coup de folie après la mort de nos amis ». La Présidente entame le rappel des faits. Entre mars et mai 2007, trois jeunes sont effectivement assassinés dans, ou à proximité de la cité du Clos-Saint-Lazare, à Stains (Seine-Saint-Denis). On s’attend à chaque fois à une nouvelle réplique. Avec une quatrième victime quelques semaines plus tard, le Clos est même étiqueté « cité la plus violente du 9-3 » par certains médias. Le deuxième meurtre, celui d’un repris de justice de 30 ans, abattu au volant de son véhicule de plusieurs balles de gros calibre, date du 28 avril 2007. Deux des prévenus donnent alors des noms à la police criminelle et font part de « rumeurs de meurtre » sur un autre de leurs amis : « Nous savions qu’il était aussi visé et c’est exactement ce qui s’est passé ». Quinze jours plus tard effectivement, ce jeune de 20 ans est retrouvé dans une voiture, tué par balles.

« Prévoir un meurtre, à la limite, c’est pas difficile »

Affolés car persuadés d’être « les prochains sur la liste », les prévenus quittent la cité pour un hôtel de banlieue d’où ils élaborent un projet de vengeance sur « deux membres du clan adverse à l’origine des meurtres », selon eux. Un plan d’assassinat intercepté par la police qui enquête sur les assassinats précédents. Ces écoutes, où les cinq hommes semblent « déterminés et excités », sont réalisées le 20 mai 2007. Trois jours plus tard, les cinq prévenus sont interpellés. Entre temps cependant, ils disent s’être « dégonflés » : « Ce ne sont pas les policiers qui nous ont empêchés de faire quoi que ce soit, on s’était ravisé nous-même ». Cet animateur de nationalité malienne reconnaît qu’il devait être l’un des deux tireurs du groupe : « J’avais la rage, c’est vrai. Mais on a renoncé de notre propre chef. Ma copine était enceinte et je savais au fond de moi que répondre à la violence par la violence nous mènerait à rien… Prévoir un meurtre, à la limite, c’est pas difficile. Mais de là à agir… »

La défense plaide le « désistement volontaire de l’association de malfaiteurs » et demande qu’on ne leur retire pas leur « statut de victime » qui les a poussés à agir. « Vous étiez sûrs qu’on allait vous tuer ? », demande la Présidente. Réponse : « Madame, mettez-vous à notre place. Deux de nos amis se font tuer à quinze jours d’intervalles, la police ne fait rien et les rumeurs nous désignent clairement comme les prochains. On n’allait pas rester les bras croisés ».

Guerre entre les « grands » et les « petits »

Cette théorie de la peur, le procureur Quentin Dandoy ne veut l’admettre complètement. Dans son réquisitoire, il revient sur l’histoire de la cité du Clos-Saint-Lazare où des « bandes rivales s’affrontent depuis quinze ans pour s’approprier le marché d’héroïne ». Il remonte en 1995, année de l’assassinat de Georges, alias « Rico », dans des conditions « extrêmement violentes ». Le meurtre de ce caïd de quartier est pour le procureur le point de départ de « guerres de succession multiples », à coup d’assassinats et de fusillades entre les « grands » et les « petits ». Des trafics démantelés en 2003 et une reprise des hostilités fin 2006 – celles dont on parle aujourd’hui : « Depuis, tout le monde s’arme et dort dans des hôtels de banlieue, se sachant recherché par le camp adverse ». Pour le procureur, aucun doute, la reprise des fusillades dans la cité du Clos-Saint-Lazare a « clairement un lien avec le trafic de stupéfiants ». Il regrette de fait que les prévenus « essaient de se faire passer pour victimes ». Qu’ils aient été des cibles ? « Je veux bien le croire, mais ils ont leur part dans ces événements – la preuve, c’est que la cité s’est calmé depuis leur arrestation ». Le procureur requiert sept ans de prison contre quatre d’entre eux, huit ans contre le cinquième, considéré comme le leader.

Après délibérations, le tribunal ordonne le maintien en détention et condamne les prévenus à deux à trois ans de prison ferme selon les casiers judiciaires des uns et de autres. À l’énoncé des peines, la présidente du tribunal demande à l’un d’eux de rester sur le banc des accusés. Il comparaît dans la foulée pour une affaire de « détention en prison d’un téléphone portable » et écope pour ces faits de trois mois supplémentaires.

Lire aussi sur Bakchich Juridique Park, le blog d’Anne Steiger


AFFICHER LES
13 MESSAGES
0 | 5

Forum

  • Parfum de Camorra dans « la cité la plus violente du 9-3 »
    le jeudi 11 décembre 2008 à 17:31
    je connais tres bien la cité CSL, effectivement le trafic d heroine, la guerre pour controler le terrain est a l origine de tout ces drames. cependant, la police est au courant de tout, et en particulier des CONTRATS qui ont été passé sur certaines tetes.Cela n a pas empecher les forces de l ordre de laisser faire tout ça,( un jeune de cité a la morgue , c est un jeune de moins a la barre) et le ministere de l interieur de diminuer les effectifs de police,alors que la situation est plus que tendu, on peut dire que dealer de l heroine au clos est tres facile, voir meme tolerer par le gouvernement….
  • Parfum de Camorra dans « la cité la plus violente du 9-3 »
    le mardi 2 décembre 2008 à 00:04, Harys732 a dit :
    Au vu des réflexions ( ?) de certains qui reflètent bien une certaine tolérance, un certain laxisme et même une certaine accoutumance face à cette violence qui nous entoure, je suis stupéfait de voir des gens intellectualiser ce phénomène en citant des écrivains dans une sorte de caution et de garantie spirituelle à leur maigre pensée. Vouloir comparer des faits sans aucun rapport entre eux pour en excuser d’autres que ça en devient nauséabond. Et cette volonté de vouloir utiliser toujours les mêmes arguments concernant cette fameuse justice de classe que ça en devient risible pour ne pas dire consternant. Allez les gangs, vendez de la drogue, défoulez-vous, entretuez-vous, faites de l’argent sur le dos des gamins, ça sera la faute de la société et tant pis si quelques innocents passant par là y laissent leur vie…
  • Parfum de Camorra dans « la cité la plus violente du 9-3 »
    le dimanche 30 novembre 2008 à 17:41
    On aurait voulu connaître la teneur exacte des écoutes : laissaient elles effectivement augurer d’un probable abandon du projet et la peur d’être "prochains sur la liste" des prévenus était-elle réelle (qu’elle fut ou non fondée) ?
  • Parfum de Camorra dans « la cité la plus violente du 9-3 »
    le samedi 29 novembre 2008 à 11:12, DIBA a dit :
    Ah bon je croyais que l’immigration était une chance pour la France.
  • Parfum de Camorra dans « la cité la plus violente du 9-3 »
    le vendredi 28 novembre 2008 à 00:09, hedona a dit :
    La justice est appliquée différemment selon les endroits. Je connais une petite ville de province bien tranquille, où une mère de famille a mis le feu à deux voitures, mais louper la troisième, car failli se brûler elle-même. Elle a été mise en liberté, a eu deux ans de mise à l’épreuve et 3 mois avec sursis. Obligation pour elle d’aller une fois par semaine en hôpital psychiatrique pour son suivi médical. Elle est suivie depuis 86 !! Dangereuse pour elle-même et pour les autres, cette brave femme est en liberté. (Centre - Bléré - tribunal de Tours). Citation d’un flic :"Si on devait enfermer tous les psychopathes qui se baladent, il ne resterait pas grand monde en liberté en France ! (sic).
0 | 5
BAKCHICH PRATIQUE
LE CLUB DES AMIS
BEST OF
CARRÉ VIP
SUIVEZ BAKCHICH !
SITES CHOUCHOUS
Rezo.net
Le Ravi
CQFD
Rue89
Le Tigre
Amnistia
Le blog de Guy Birenbaum
Les cahiers du football
Acrimed
Kaboul.fr
Le Mégalodon
Globalix, le site de William Emmanuel
Street Reporters
Bakchich sur Netvibes
Toutes les archives de « Là-bas si j’y suis »
Le locuteur
Ma commune
Journal d’un avocat
Gestion Suisse
IRIS
Internetalis Universalus
ventscontraires.net
Causette
Le Sans-Culotte