Michalak blessé, Michalak soigné mais Michalak canné ! Pauvre petit, mal conseillé ou dyslexique, Micha boîte. La faute aux cannes anglaises qui, comme tout ce qui est britannique ont l’habitude d’être du mauvais côté.
Michalak passe à droite. Bizarre, ce titre, juste après les élections. Le beau garçon qui fait frémir, sur les affiches, les acheteuses de parfum. Frédéric, en Afrique du Sud, avait-il perdu tout repère dans le temps ? En fait, l’interpellation de Bakchich n’a rien à voir avec la politique mais tout à voir avec la santé. Comme des milliers de blessés, d’opérés, Michalak place sa canne anglaise du mauvais côté. Au lieu de se soigner, il aggrave son cas. Nous qui aimons et Michalak et le rugby, nous voulons que le macho revienne au plus vite croiser ses passes.
Ce n’est pas parce que je suis médecin du sport que je ne regarde pas des hommes, ou des filles en culottes courtes courir à la télé. Même, parfois, ces sportifs sont en costard. Pour des émissions de variété ou pour le sacré saint Stade 2. Ce 18 mai, sur France 2, que vois-je ? Le Michalak marchand avec sa canne anglaise placée à gauche, donc du côté de sa blessure au genou. Que personne dans l’important « staff » médical qui entoure ce joueur professionnel lui ait indiqué le mode d’emploi de cette troisième jambe me semble incroyable… Ce jour là, un reportage nous informait que le demi-d’ouverture français, aux 50 sélections internationales, venait de signer pour trois ans au Stade Toulousain, son club d’enfance, après une saison passée chez les Natal Sharks d’Afrique du Sud. Le reporter, Philippe Lafon, annonce que les images que nous allons voir ne sont pas « tournées au ralenti mais à vitesse réelle : à 2 à l’heure ». On voit Michalak, la jambe engoncée dans une genouillère articulée, la canne anglaise du même côté que la blessure, se déplaçant très lentement. [2]
Les cannes anglaises n’ont qu’un seul objectif : soulager l’appui pour permettre une cicatrisation optimale de la blessure. Bon c’est un peu technique, je vous l’accorde mais… si la synchronisation entre l’appui du membre blessé et le contre-appui d’une ou deux cannes n’est pas correct, les structures ligamentaires ou le siège de la blessure continuent à être agressées et à souffrir. Bref, Michalak doit en baver ! Depuis trente-cinq ans que je prescris régulièrement des cannes anglaises à mes patients, je n’ai jamais vu une seule fois un pharmacien vendre ce matériel orthopédique en réglant correctement leur hauteur. Surtout aucune explication sur l’utilisation de la chose. Le plus souvent, l’action d’information de l’apothicaire se borne au choix de la couleur des cannes. Aucun mode d’emploi n’est fourni avec ces bâtons d’alu.. Les seules indications précisent que ce mode de locomotion s’adresse à des gens ne dépassant pas 2 mètres et 110 kg. J’ai même eu affaire à un kinésithérapeute qui croyait, canne de bois canne de fer si je mens je vais en enfer, que l’appareil orthopédique se tenait du côté malade…. Or, si la canne est placée du même côté que la blessure, elle ne décharge que d’un chouïa l’appui et, au final, ce n’est pas elle qui vous porte mais l’inverse. Autrement dit, on ne fait que promener sa canne tout en lui faisant prendre l’air, ce dont elle se fout éperdument.
Et les professionnels de santé (médecins, pharmaciens, voire même très souvent kinésithérapeutes), qui peuvent être compétents pour leurs actes médicaux, sont archi nuls pour l’utilisation de cette chose, peut être parce qu’elle est « anglaise ». Allez savoir. Je passe plus de temps sur mon vélo que devant la télé, mais de temps en temps je capte des images de stars du ciné ou de l’écran, c’est dire aussi des ministres, en train de clopiner du bad side. N’est-ce pas Delarue, Drucker ou madame Lagarde, elle qui veille sur notre Economie ?
Pourquoi la majorité des gens blessés ou qui souffrent d’arthrose à une articulation à la hanche au genou ou à la cheville portent-ils la canne du mauvais côté. That is the question ? Deux explications en dehors de l’ignorance du bon usage. Quand on a mal à un genou, on met naturellement la genouillère sur l’articulation malade, ou alors c’est grave. Puis, dans la foulée, comme dans une logique réflexe, on saisi sa canne du côté où ça va mal. Par association, le public non professionnel mais malheureusement pas uniquement, porte la canne du côté blessé. Or, je ne vais pas le répéter cent fois, la canne, placée du côté opposé permet de décharger, au moins de moitié, le poids qui, autrement, pèserait sur l’articulation blessée.
Mais pour que cela soit efficace, il est impératif d’avancer en même temps le membre inférieur touché et la canne du côté opposé.. J’ignore si vous avez été majorette ou bidasse mais, si ce n’est pas le cas il faut vous entrainer. On lance sa jambe gauche blessée en même temps que la canne saisie par le bras droit ! Simple. Mettez de la musique militaire si ça vous aide. Si cette synchronisation ne se fait pas, la blessure souffre et le patient remet son bâton là où il ne faut pas, aggravant son cas. Le cas Frédéric Michalak nous montre que comme la Guerre de cent ans, ce dossier anglais n’est pas gagné. Une star du sport qui a fréquenté assidûment les salles d’attente des médecins et chirurgiens, qui a déjà subi une opération du genou droit en novembre 2006 avec, dans la foulée, six mois de rééducation continue de déambuler à l’envers ! C’est vous dire comment se passent les choses au fin fond de la Creuse. Renseignement pris auprès du journaliste de France Télévisions, et mon enquête pourrait disculper le rugbyman : peut-être bien que Michalak tenait la canne à gauche pour pouvoir serrer des mains. Conclusion, si vous êtes blessé, cessez d’être poli.
[1] intertitre et titre de la Rédaction
[2] Rappelons que, le 26 avril, l’ouvreur des Sharks, s’est sérieusement blessé à la 8e minute du match opposant son équipe aux Waratahs. Le beau garçon s’est fait mal au genou gauche lors d’un mauvais appui. Selon les dépêches d’agence le dossier Michalak se résume ainsi : « sans choc ni impact mais avec une hyperextension du genou, la jambe tendue au-delà d’une amplitude maximale naturelle ». Diagnostic : distension des ligaments du genou gauche. Après, retour en France et consultation d’un chirurgien toulousain, il est décidé de ne pas opérer mais de jouer la carte de la cicatrisation et de la rééducation. D’où port de la genouillère articulée et de deux cannes anglaises au début pour soulager l’appui sur le ou les ligaments endommagés. Puis d’une seule plus tard.
Spécialiste en cannes, peut-être, mais pas en grammaire ! L’expression “au final” qu’emploie cet honorable toubib est aussi boiteuse que Michalak, voire davantage, car la guérison de ceux qui l’utilisent – de plus en plus nombreux – semble hors de portée.
Elle se compose en effet de l’article “au”, suivi de l’adjectif “final”… sans que le moindre NOM soit inséré dans l’expression ! Autrement dit, c’est une absurdité grammaticale.
Rappelons à ceux qui n’étaient pas là qu’aucun nom “final” n’existe en français. Une finale, oui ; un final, non.