Ce livre est un exploit. Sa publication un miracle. Sa lecture, une révélation : bienvenue dans les pages d’un Un Homme à abattre, contre-enquête sur la mort de Robert Boulin de Benoït Collombat.
Dans un vieux pays démocratique, berceau des droits de l’homme, qui inventa le concept de séparation des pouvoirs, et pratique l’alternance politique, un ministre en exercice fut tué dans de mystérieuses circonstances. Depuis 28 ans, la Justice et la police française, soutenues par certains medias, s’acharnent, en niant les évidences, à maquiller grossièrement l’assassinat de Robert Boulin en suicide. Au cours de sa minutieuse enquête, Collombat met au jour une énormité : le cadavre de Robert Boulin a été découvert deux fois.
À l’époque Raymond Barre, Premier ministre, Christian Bonnet, ministre de l’Intérieur, Yann Gaillard , directeur de cabinet de Boulin, lui ont confié avoir été informés de la découverte du corps entre 1 et 2 h du matin dans la nuit du 29 au 30 octobre 1979. Quant au procureur général de Versailles, notoirement lié au SAC [1], il s’est, à la même heure, rendu sur les lieux de la « découverte ». Or, c’est officiellement à 8 h 40 le 30 octobre que le corps du ministre a été trouvé par une patrouille de gendarmes motocyclistes baignant dans les 50 cm d’eau d’une mare de la forêt de Rambouillet.
Ces 7 heures de décalage étaient indispensables à la mise au point des manipulations nécessaires au maquillage de l’assassinat en suicide.
Le livre de Collombat est une saga française, des heures sombres de l’occupation à nos jours, centrée sur un homme intègre, résistant de la première heure, ministre du général de Gaulle, de Pompidou, puis de Giscard. À son décès, Robert Boulin avait battu le record de longévité ministérielle, détenu auparavant par… Colbert.
C’est aussi la chronique de l’impuissance acceptée de 4 juges d’instruction face à l’obstruction systématique et aux sabotages délibérés de leurs investigations par la hiérarchie policière. Quant aux medias ( [2], ils ont fait preuve, jusqu’à la parution de ce livre, d’une constante et troublante unanimité assortie d’une extrême complaisance pour défendre et illustrer la seule –et invraisemblable- version officielle du suicide.
L’engrenage fatal se met en mouvement à la suite de l’annonce, au printemps 1979, par le président Giscard d’Estaing, de son intention de remplacer à l’automne son Premier ministre Raymond Barre, en chute constante dans les sondages, par Robert Boulin. L’arrivée de ce gaulliste historique à Matignon aurait eu mécaniquement pour effet de briser la carrière de Jacques Chirac.
Le RPR et son chef s’étaient lancés depuis 1976 dans une guérilla incessante contre Giscard. Boulin à Matignon, héritier beaucoup plus légitime que Chirac du gaullisme, aurait fait exploser le RPR, dont nombre de députés auraient rallié le nouveau Premier ministre, à la popularité intacte, favorisant ainsi la réélection de Giscard en 1981. A la fin de l’été 1979, des proches de Chirac abreuvent la presse de rumeurs calomnieuses et de pseudo-révélations sur un achat de terrain à Ramatuelle. Face à cette campagne, Boulin, qui se sait inattaquable, ne se contente pas de se défendre, il annonce publiquement son intention de contre-attaquer. En s’apprêtant à dévoiler les véritables turpitudes de ses détracteurs, que ses multiples fonctions ministérielles avaient portées à sa connaissance.
Le 29 octobre, Boulin sort du coffre de son bureau ministériel une pile de dossiers, les dépose à son domicile et de là repart sans escorte à un mystérieux rendez-vous dont il ne sort pas vivant. Jamais la justice ne trouvera –ni ne cherchera – ces dossiers.
Le remarquable travail de Collombat constitue un élément clé de la demande de réouverture de l’instruction sur la mort de Boulin, déposée par sa fille Fabienne et son avocat William Bourdon le 26 avril dernier. Pour rendre sa décision, le procureur général de Paris doit se prononcer sur l’existence de faits nouveaux…
[1] Service d’Action Civique, milice du parti gaulliste, chargée de basses besognes et des coups tordus, dissoute en 1982 après la tuerie d’Auriol. Jacques Foccart et Charles Pasqua en ont été de hauts responsables
[2] Pendant les 28 ans écoulés depuis la mort de Robert Boulin, l’omerta mediatique n’a été contredite que par un article de James Sarrazin dans l’Express en 1987, un éditorial de Philippe Alexandre sur RTL et dans le Parisien en 1988, un dossier dans le magazine confidentiel Golias en 1999 et un reportage du 90 minutes de canal + en 2002.
Je n’avais jamais entendu parlé de cette affaire, j’étais trop jeune à l’époque de l’assassinat de ce Ministre J’ai écouté du livre sur sur direct8 , il m’a donné envie de le lire.
Hier soir, sur le plateau de Guillaume Durand, deux vendus à la soupe : Séguela et Gallo…
Je ne sais pas si Benoït Collombat sera invité sur autant de plateaux que l’ex patron du Sac mit en examen dans diverses affaires de corruption. Je parle de celui qui parade sans complexe, comme un gentil grand-père, qui fait sa promo de sa bio ("aseptisée"). …
Je serais curieuse de connaitre le nombre de plateaux qu’il a fait, et combien de vraies questions lui ont posé les journalistes cou"""" ?
Le journal "L’Humanité" avait contesté la version du suicide au moins dès 1987 (15/12/87) et apporté, à diverses reprises, des témoignages et des faits qui en montraient l’invraisemblance. Voir notamment les articles des
- 18/08/1988 - 23/06/1989 - 15/01/2002 - 07/11/2002
Les 2 derniers articles sont consultables sur le site de L’Humanité. Il me semble qu’il y avait eu d’autres articles avant 87 qui émettaient des doutes mais je n’en ai pas les dates exactes. Cordialement. YS
Bonjour,
Ce n’est pas le style du Canard d’étouffer une histoire mouillant le RPR, ELF,le SAC…
Un des journalistes du Canard Enchaîné : Nicolas Beau a écrit un livre que je n’arrive pas à trouver LA MAISON PASQUA, il a eut une multitude de procès à cause de ce livre, je doute que le Canard fasse de cadeaux à" ces gens là".
Je ne connais pas cette affaire, je n’ai pas d’avis, j’attends de lire le livre.
Mais ton interrogation est intéressante et appelle une réponse.
Bsr,
Pourquoi ne pas leur demander ? Le Canard avait peut-être d’autres élements à lépoque.
Le Canard et en particulier LM Horeau ont toujours défendu contre des évidences la thèse du suicide de Boulin.
Pourquoi ?
Parce que le Canard, comme dans l’affaire du prêt de Bérégovoy a été en pointe pour déstabiliser Boulin.
Pourquoi ?
Il faut être bien ingénu pour croire que dans tous ses articles le Canard est seulment guidé par une "éthique" de la vérité ou de la justice.
Trop souvent le Canard est utilisé pour des gens pour en déstabiliser d’autre … et qu’importe les idéologies.
De même il faut être particulièrement naïf pour croire quze dans tous les cas le canard et ses journalistes enquêtent : trop souvent il redégueulent ce qui leur est amené clé en main par des gens bien informés, souvent mal intentionnés… ou par des journalistes qui ne peuvent passetr l’article dans leur rédaction.
Dans le cas de Boulin comme dans le cas de Béré le Canand a été utilisé et plutôt que de le reconnaitre ils s’enferrent dans leurs erreurs… et c’est pathétique !
C’est aussi simple et aussi malhonnête que ça ; désolé pour ceux qui croient encore au mythe du Canard… que néanmoins je lis toutes les semaines !