Avec dix victoires consécutives dans les primaires démocrates, le sénateur Barack Obama est presque déjà assuré d’emporter l’investiture, selon notre chroniqueur américain Doug Ireland. Mais Hillary Clinton compte encore sur l’appareil du parti et les délégués pour se sauver.
Il est désormais presque impossible d’imaginer qu’Hillary Clinton, encore qualifiée il y a peu de candidate « inévitable » du camp démocrate, puisse stopper l’offensive fulgurante de Barack Obama dans la course à l’investiture du Parti Démocrate. Excepté, bien sûr, si un élément majeur venait à bouleverser le jeu. Lors de la primaire de l’Etat du Wisconsin, le 19 février dernier, le jeune sénateur métis a tout simplement balayé l’ex-colocataire de la Maison Blanche avec 17 points d’avance (58 % des voix contre 41%), laissant derrière lui en fin de soirée une Hillary usée, fanée, fatiguée, désesperée et mortellement blessée. Cerise sur le gateau, le même jour, Obama a battu Hillary dans le caucus de l’Etat metissé d’Hawaï où il est né il y a 46 ans. Son score ? Trois contre un. Au total, cela fait donc dix victoires de suite pour Barack Obama et un million de voix de plus qu’Hillary depuis le Super Mardi du 5 février dernier.
Pourtant, le Wisconsin semblait démographiquement dessiné pour une victoire d’Hillary. Il s’agit d’un Etat majoritairement blanc où les Noirs représentent à peine 6 % de la population. Mais aussi un Etat où l’électorat est dominé par la classe ouvrière et les salariés se situant au bas de l’échelle. 57% des Wisconsinites gagnent en effet moins de 50 000 dollars par an et 22 % à peine des habitants ont suivi des études universitaires. Finalement, alors que toutes ces catégories sociales étaient sensées être favorables à Hillary Clinton, Obama l’a aisément emporté. Qui plus est, les femmes ont trahie Hillary et son fameux “gender gap” (fossé des sexes) est parti en fumée puisque Obama enregistre cinq points d’avance parmi les femmes du Wisconsin. Il a aussi écrasé Hillary parmi leurs maris, compagnons et fils puisque près des deux-tiers des hommes ont voté pour lui.
Obama dispose désormais d’un avantage de 150 délégués comparé à Hillary puisque 1 168 lui sont acquis contre 1 018 pour Clinton. Mais, selon les savants calculs de l’excellent Chuck Todd, directeur politique de la chaîne de télévision NBC et maître incontesté de la mathématique électorale, pour que la candidature de Hillary reste viable, elle doit gagner les primaires du 4 mars dans l’Ohio et au Texas avec au moins 65 % de délégués élus dans ces deux Etats. Hélas pour elle, le cas du Wisconsin laisse à penser que cela relève de la mission impossible pour la candidate.
Le Wisconsin et l’Ohio, deux Etats voisins, sont en effet presque démographiquement identiques. Ils font tout deux partie du “Rust Belt” littéralement “la ceinture de la rouille”, à savoir ces Etats de l’Amérique profonde peuplés de villes encore dynamiques il y a quelques années mais victimes de la désinstrualisation et des délocalisations d’usines à l’étranger. Dans les centre-villes, les commerces ont mis la clé sous la porte et il ne reste au mieux qu’un MacDonald’s ou un Blockbuster, une chaîne nationale de boutiques de locations de vidéos.
Lors de la semaine précédant le vote dans le Wisconsin, Obama a fini par trouver le bon ton sur les questions économiques en emprutant librement la réthorique déployée auparavant par le sénateur populiste John Edwards qui s’est retiré de la course à l’investiture après une séries de primaires où il n’était parvenu qu’en troisième position. Obama a si bien imité Edwards que le Washington Post, dont la ligne politique est néo-libérale, a accusé le sénateur métis de se livrer à « la guerre des classes ». Mais ça a marché dans le Wisconsin où Obama a attiré à lui tous ces ouvriers et salariés blancs qui constituaient le noyau dur pro-Edwards.
Il est plus que probable que le bond d’Obama au sein de la classe ouvrière déjà observé lors des primaires de Virginie, du Maryland et du Wisconsin lui permettra au pire de rivaliser, au mieux de battre Hillary dans l’Ohio. En clair : pas de 65 % pour madame Clinton dans l’Ohio.
Au Texas, une poignée de sondages publiés ces derniers jours donnent Obama et Hillary à stricte égalité. Mais ils ont tous été effectués avant que le résultat du Wisconsin ne soit connu, et donc, sans prendre en compte l’élan supplementaire que lui confère sa victoire la plus recente. De plus, le vote noir y pèse lourd. Très exactement 25 % des voix lorsque le Yankee blanc John Kerry était le candidat démocrate à la Maison Blanche. Avec Obama, les Noirs pourraient représenter un tiers des votants le 4 mars prochain.
Hillary compte sur une victoire massive chez les Latinos texans pour remporter la primaire. Mais un sondage national de l’institut Gallup publié cette semaine montre qu’Obama progresse au sein de cette communauté. A tel point que si Hillary conserve les faveurs des Latinos de plus de 40 ans, les plus jeunes lui préfèrent Obama.
Autre désavantage pour Hillary : les règles fort compliquées du Parti Démocrate au Texas. Celles-ci veulent que le nombre de délégués élus par circonscription dépende de la répartition des votes de l’élection du gouverneur. Or, en 2006, les Latinos ne s’étaient pas rendus massivement dans les urnes. Résultat : le nombre de délégués attribués aux circonscriptions où les Latinos sont majoritaires est inférieur à celui des autres circonscriptions favorables, elles, à Obama. C’est le cas des villes universitaires et des banlieues où résident les cadres diplômés de l’enseignement supérieur. Donc, point de 65% de delégués pour Hillary dans le Texas non plus.
Autre raison supplémentaire d’être ultra-pessimiste sur les chances d’Hillary l’ « Inévitable » de décrocher une importante victoire en Ohio ou au Texas : ces deux primaires sont ouvertes aux indépendants, c’est-à-dire ceux qui ne sont pas inscrits dans l’un des deux grands partis. Et la primaire du Wisconsin a encore montré que les indépendants réussissent à Obama puisqu’il y a gagné les deux tiers de leurs voix.
Depuis le Super Mardi, le staff de campagne d’Hillary a toujours proclamé haut et fort que l’Ohio et le Texas seront des pare-feux contre l’Obamamania qui se répand dans tout le pays. Or, avec ses dix victoires consécutives, Barack Obama est en pleine ascension et risque d’entraîner du monde dans son sillage. Une écrasante victoire d’Hillary Clinton en Ohio ou au Texas, ou dans les deux Etats, est maintenant exclue. Par contre, la victoire semble à portée de main d’Obama.
On a beaucoup parlé ces derniers jours des huit-cents super-délégués, ces notables du parti (gouverneurs, membres du Congrès, du Comité national du Parti Démocrate…) désignés d’office comme délégués, et donc non élus lors des primaires ou des caucus. Ils représentent pourtant un cinquième des quatre mille délégués qui siègeront à la convention d’investiture du parti. Environ quatre-cents d’entre eux se sont déjà prononcé en faveur de l’un des deux candidats avec une avance d’une centaine de délégués pour Hillary.
Quand la fonction de super-délégués a été créée en 1980 au lendemain de la candidature surprise de Teddy Kennedy contre Jimmy Carter, alors président en exercice, c’était justement pour éviter que ce schéma ne se reproduise. Et empêcher un candidat de l’emporter contre l’avis de l’establishment du parti. Or, cette année, Hillary est justement la candidate de cet establishment composé d’une part de riches donateurs qui financent le parti et, d’autre part, d’une majorité de ces élus qui ont déjà fait leur choix. Lors de sa campagne, elle a déclaré que même si elle n’obtenait pas une majorité de délégués élus lors de la convention d’investiture qui se tiendra à la fin août à Denver, dans le Colorado, elle compte sur les super-délégués, pour assurer sa nomination.
Néanmoins, si Barack Obama arrive à Denver avec une majorité des délégués élus doublée d’une majorité de voix recueillies lors des primaires et des caucus, les super-délégués prendront-ils le risque d’annuler une victoire légitime et démocratiquement gagnée dans les urnes ? Surtout s’il s’agit du premier présidentiable afro-américain ? La réponse est NON. Sans hésiter. Pourquoi ? Pour la simple et bonne raison que, le moment venu, les super-délégués ne penseront qu’à leurs carrières politiques et ne pourront jamais contredire la volonté des électeurs du parti au risque de se voir chasser de leurs postes lors de primaires de la vengeance dans deux ans. Et ces barons du parti ne voudront jamais courir le risque d’une abstention massive des Noirs et des jeunes lors de l’élection de novembre contre les Républicains : ces deux catégories apportent un soutien essentiel aux Démocrates.
Et, surtout, ces super-délégués, qui savent compter les voix, ne violeront pas la démocratie quand tous les sondages nationaux montrent depuis des mois qu’Obama est le candidat démocrate le plus à même de battre le Républicain John McCain (Hillary est, elle, systématiquement battue par McCain). Non, contrairement à ce qu’on peut lire ici et là, les super-délégués ne seront pas les sauveurs d’Hillary Clinton.
La campagne au sein du Parti Démocrate et le combat entre Hillary et Obama va se poursuivre encore pendant des mois mais le résultat final semble maintenant se dessiner. Seul un scandale inattendu de moeurs ou de corruption qui éclabousserait Obama, ou une gaffe verbale considérable de sa part qui défraierait la chronique pendant des semaines, serait capable de stopper sa marche vers l’investiture, sauvant ainsi le soldat Clinton.
Je me rappele quand on parlait de Giscard vs Mitterand, Mitterand vs Chirac, etc, alors je ne comprends pas l’indignation. Que devrait-on dire ? La candidate Democrat blanche vs le candidat Democrat noir ? Ce serait encore plus "insultif" pour les deux. Monsieur Clinton ? Déjà été pris.
C’est un FAIT, c’est Hillary son nom, que l’on parle d’elle au Sénat, a New York ou ailleurs. Pour la plupart des gens c’est une marque d’affection que de l’appeler Hillary au lieu de Mme Clinton. Elle l’a voulu ainsi parce que ça la rapproche du peuple qu’elle courtise. Elle le savoure, l’apprécie et en demande.
Quand ces deux candidats ont décidé de se présenter aux Présidentielles, ils savaient que la question de la race et celle du genre (féminité) jouerait un certain role, et d’ailleurs la dame Clinton et sa cohorte s’en servent bien (de chaudes larmes juste avant les élections, pas une mais deux fois, pour s’attirer la sympathie des consoeurs).
Personne ne lui manque de respect. Son baggage est souvent mis sur le devant de la scene parce qu’elle a un passée politique LOURD, on pointe le fait qu’elle espère se faire élire, non pas sur ses propres mérites mais celles de son mari, ou parce qu’elle demande aux électeurs de voter CONTRE son adversaire au lieu de voter POUR elle. Elle "s’insurge" contre les lobbyistes mais son directeur de campagne EST un lobbyiste, actif qui plus est. Elle se dit prête dés le premier jour à prendre les meilleures décisions, mais est incapable de prendre de bonnes décisions quand elle en a la possibilité (son vote pour Iraq et le nouveau pour l’Iran).
Si elle veut gouverner le pays de la même manière qu’elle dirige sa campagne, God help us. Et quand rien ne fonctionne contre Obama, elle utilise des tactiques dégueulasses sorties tout droit du "livre de Karl Rove" qu’elles a tant décriés par le passé. Si je ne m’abuse cela s’appele HYPOCRISIE. Ou pire encore, "je ferai tout et n’importe quoi pour gagner".
Par ailleurs le Ségolene vs Sarkozy peut être repproché à la presse française qui semble s’être ammouraché de Sarkozy au point de confondre leur job avec celui de porteur de rumeur, mais dans le cas qui nous occupe, Mme Clinton EST la candidate de l’establishment. Alors vraiment…