Comme Vincent Cassel, le thriller de Jean-François Richet sur Jacques Mesrine fait du gras !
Lors du tournage de « Mesrine », je rencontrais un des acteurs principaux qui me déclara tout de go : « Je tourne une merde. Le scénario est vraiment nul. On est tous obligés de réécrire nos dialogues au jour le jour. ». Cela ne préludait rien de bon et un an et demi plus tard, voici donc le résultat, « L’Ennemi public N°1 ». Si le premier volet sorti en octobre avait pu mystifier certains (dont la kritik et même quelques fidèles de Bakchich), le second devrait mettre tout le monde d’accord : c’est pathétique ! Avec « L’Instinct de mort », Richet filmait efficace, enchaînait plusieurs séquences d’action spectaculaire et l’on avait l’impression de regarder une grosse machine US.
On a donc eu la preuve que l’on pouvait faire aussi nul que les Américains : la belle affaire ! Ici, c’est une nouvelle fois le défilé des vedettes et un festival des barbes et de rouflaquettes : Olivier Gourmet sous la barbichette de Broussard, Gérard Lanvin et ses cheveux filasses, Vincent Cassel et ses fantaisies capillaires. C’est le gang des postiches à lui tout seul ! Et si la presse dans son ensemble s’est enthousiasmée à longueur de colonnes sur les 20 kilos pris par la star (ce qui en dit long sur le niveau d’analyse de nos confrères), Cassel se contente de regarder son bide qui gonfle et qui finit par dévorer l’écran.
Dans la France de Giscard, Jacques Mesrine est donc une bête traquée, l’ennemi public numéro 1 qui attend sa fin, forcément violente. Les deux heures de film sont donc un compte à rebours vers la mort Porte de Clignancourt commencé dans le premier épisode. Jean-François Richet filme énervé et se montre une nouvelle fois se incapable prendre parti ou d’adopter un point de vue. Mesrine anar, gentleman cambrioleur, dangereux mythomane ou héros post-moderne ? C’est toi, ami spectateur, qui choisira. Ici, Richet reste dans le décoratif et, comme Cassel, le film fait du gras. Il n’y a plus rien à filmer, plus rien à voir, juste 120 minutes de rien.
C’est alors que l’on se demande pourquoi Richet et son producteur Thomas Langmann ont étalé cette chose sur plus quatre heures de métrage. Pour faire passer le gogo deux fois à la caisse, comme Tarantino l’avait fait précédemment pour « Kill Bill » ? Pour sortir deux DVD et tenter de rembourser les 44 millions d’euros de l’entreprise ? Histoire de meubler, Mesrine braque un casino en Normandie, se fait arrêter, s’échappe, séquestre un milliardaire, torture un journaliste, se retrouve traqué… Il croise également quelques vedettes : Ludivine Sagnier, Mathieu Amalric, Gérard Lanvin, Samuel Le Bihan ou Olivier Gourmet. Mais ce ne sont que des esquisses de personnages, sans profondeur, ni personnalité. Qui étaient vraiment François Besse, Charlie Bauer ou Sylvia Jeanjacquot (maîtresse de Mesrine qui vomit le film un peu partout dans la presse), on ne le saura jamais. Reste des costumes vintage, des caméos sympas (Amalric est dément) et des éclats de rire en rafale, notamment dès que Lanvin, gauchiste hippie avé l’assent, ouvre la bouche.
On termine par ce que j’avais écrit et qui me dégoûtait dans le premier opus : la transformation de Mesrine en icône, en rock star du crime, voire en martyr. Ici, c’est encore plus flagrant. Mesrine est un homme à femmes, capable de séduire son avocate, un anar avec une vraie conscience politique, épris de liberté et ennemi des lois, un homme d’honneur qui va se farcir un journaleu d’extrême-droite (ce qui ne peut que réjouir le spectateur normalement constitué).
Le final laisse encore plus dubitatif : exécuté par les flics, achevé d’une balle dans la tête (on ne voit pas pourtant de flic tirer à bout portant une balle dans la tempe de Sylvia Jeanjacquot, comme l’a assuré le complice de Mesrine, Michel Ardouin), Mesrine est porté les bras en croix. Plus fort encore, l’affiche ! La tête de Mesrine légèrement inclinée, ensanglantée, ressemble furieusement à celle de « La Passion du Christ », de Mel Gibson. Mesrine-Jésus, même combat ? Langmann essaie-t-il de s’offrir un petit coup de pub-scandale pour bourrer les salles ? Encore plus perspicace que je ne l’imaginais, Langmann a précisé - sans rire - que la photo était belle, qu’elle a été prise sur le tournage, qu’elle n’a pas été photoshopé. « Il était dans la voiture de cette manière-là. On trouvait injuste et dommage de se priver d’une image qui reflète aussi bien le titre du film. » Fallait-il pour autant en faire l’affiche du film ? D’ailleurs, fallait-il faire ce film ?
Je pense que vous n’avez pas bien compris le film cher monsieur.
Si Richet ne prend pas parti, c’est pour mieux laisser apparaitre les contradictions de Mesrine…
Il voulait trop de choses à la fois…détruire le système et en profiter…
Une certaine sagesse sera d’ailleurs exprimée par son complice, François BESSE "je veux que le système continue d’exister pour pouvoir continuer à le rançonner".
Tout est là.
Si l’on écoute les témoignages, ici ou là, des "vrais" complices de Mesrine (Michel ARDOUIN, François BESSSE), Mesrine avait un côté égocentrique, et il prenait et faisait prendre à ses équipiers des risques inutiles pour faire parler de lui.
Et celà le film le montre très bien.
Que certains témoins de cette époque n’aiment pas le film est normal et inévitable : rien ne pourra jamais remplacer dans leur esprit le souvenir de ce qu’ils ont vraiment vécu, et c’est tant mieux.
Peu importe l’opinion même de certains acteurs (que vous ne nommez pas ; hein), sur le film au moment même du tournage : nous avons là l’un des tous meilleurs polars français de la décennie, et c’est tant mieux.
au passage, vous nous racontez tout le film… heureusement que je l’ai vu avant de vous lire…
Bien que je vous rejoigne sur le fait que parfois le film est un peu décousu, des plans faciles (lors de la traque par les gendarmes) des personnages creux (mais pas tous, loin de là : amalric est bon, Broussard aussi.
Je n’ai pas été convaincu par Cassel non plus,…
Mais ça m’a fait penser au bon vieux films policiers américains comme the french connection.
Je suis pour en feuilleton télé.
je rejoins néanmoins la grogne des internautes sur votre critique trop dure e à l’emporte pièce. ;.
on voit que vous n êtes sortis énérvé de ce film…
mais c ’est pas si pire quand même…
il fallait bien le faire ce film